Avec la réussite de nombreux footballeurs professionnels, certains parents projettent sur leur enfant un avenir prodigieux dans le foot. Au point d'en faire une obsession et d'avoir des comportements inappropriés, voire agressifs sur le bord du terrain. La fédération de foot de l'Oise a édité un guide de bonne conduite à leur usage.
Sur le terrain, ils sont une bonne dizaine affublée de leur tenue rouge et d'une chasuble verte ou jaune. Bonnet sur la tête, gants en laine aux mains, il fait froid pour cet entraînement de foot. Mais les joueurs, qui ont entre 8 et 9 ans, ne ménagent pas leurs efforts. "Il faut donner une solution au porteur du ballon, les gars".
Un sport plaisir chez les plus jeunes
Dans sa longue parka noire, Rémi Savejvong, le responsable de la formation à l'AS Beauvais Oise, donne des consignes. Ici, seuls les éducateurs ont la parole. Les parents sont sagement installés derrière la rambarde. En silence. Le cadre est posé : aucune intrusion parentale n'est tolérée. "Il ne faut pas qu’ils crient après les enfants. Il ne faut pas qu’ils perturbent les enfants, confirme Rémi Savejvong, On veut toujours le meilleur pour nos enfants. Mais inconsciemment, ils peuvent mettre la pression sans le vouloir et ça peut empêcher les enfants de prendre du plaisir."
Mais parfois, notamment lors de matchs à l’extérieur, certains parents peuvent déraper. Xavier Leroux est le papa de Théophile qui joue en U9. Il a été témoin de comportements inadaptés de la part de parents de joueurs : "ils mettent la pression aux enfants. Et ça se traduit par des enfants qui s’énervent ou qui mettent des coups. Il y a même des parents qui entrent sur le terrain pour mettre la pression aux éducateurs. Ça, oui, on l’a déjà vu dans des tournois où il n’y a même pas d’enjeu si ce n’est le plaisir des enfants", déplore-t-il.
Des comportements que les enfants eux-mêmes dénoncent. L'un nous dit que "les parents, ils parlent trop autour du terrain." Un autre avoue que "ça m’embête un peu parce que ça me déconcentre."
Le projet M'Bappé
À l'AS Beauvais Oise, il est hors de question de parler de projet M'Bappé, cette expression utilisée pour désigner ces parents qui rêvent de voir leur enfant devenir une star du ballon rond et dont certains vont trop loin. Des dérives qu'explore le documentaire 450 gr, le poids de la passion réalisé par Farid Bouahla :
"450 gr, c'est léger, c'est le poids d'un ballon de foot, explique le réalisateur. Mais il peut se transformer en un poids écrasant quand les parents ont une perception du foot qui part à la dérive. J'aimerais essayer d'éveiller les consciences sur le fait que ce sont aujourd'hui les jeunes joueurs qui payent les dérives actuelles du foot. Trop de parents aujourd'hui pensent pouvoir maîtriser toutes les composantes qui peuvent amener un jeune joueur à devenir professionnel. Mais il y a très très peu d'élus pour énormément de candidats. Les chiffres le disent. On regarde le football à travers le prisme du professionnalisme en oubliant qu'avant tout, il est amateur."
Mokhtar Behladj approuve cette règle de non-intrusivité parentale du club où son fils Mohammed évolue en U8 : "il ne faut pas se projeter comme ça, leur donner des objectifs. Ils sont trop jeunes. Beaucoup trop jeunes. Pour l’instant, ce n’est que de l’amusement."
"On voit des parents qui poussent leur enfant à s’entraîner tous les jours alors que ça doit venir des enfants. Ils doivent motiver par eux-mêmes. Quand j’étais petit, mes parents ne me poussaient pas, ça venait de moi", raconte Darlens François, joueur professionnel du club isarien.
Dans l'Oise, la fédération vient d'éditer un guide de bonnes conduites à destination des parents. Certains clubs ont déjà programmé des journées de sensibilisation en lien avec le documentaire de Farid Bouahla.
Avec Haron Tanzit / FTV