"L'autoroute de la drogue" : en immersion avec les douaniers de l'Oise sur l'A1, les routiers en ligne de mire

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"Enquêtes de Région" vous propose L’A1, l’autoroute de toutes les drogues : avec les douaniers des Hauts-de-France qui, dans l’Oise, recherchent les trafiquants comme les consommateurs. ©France Télévisions

On la surnomme "l'autoroute de la drogue". C'est l'autoroute A1, celle qui relie le Benelux et le nord de la France à la région parisienne avec100 000 voitures et 20 000 camions par jour. En 2022, la douane des Hauts de France n'a jamais autant intercepté de marchandise, notamment au péage de Chamant près de Senlis.

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Chaque jour, les douaniers des Hauts-de-France traquent les trafiquants et les consommateurs de drogues qui circulent sur l'autoroute A1, entre Paris et la Belgique, en traversant les Hauts-de-France. Située au carrefour de l’Europe, la région est au centre des problématiques liées aux drogues. Le trafic comme la consommation de stupéfiants y sont en plein expansion. 

Un trafic croissant sur 30 ans

Avec 100 000 voitures et 20 000 camions par jour, l'A1 est l'autoroute la plus empruntée d'Europe. C'est un axe majeur pour les trafiquants, dans les deux sens de circulation. Cannabis, cocaïne, LSD, héroïne, extasie... Les quantités de drogues, notamment de synthèse, qui y transitent ont fortement augmenté au cours des 20 à 30 dernières années. 

En provenance du sud de l'Europe, remontent principalement les produits dérivés du cannabis et la cocaïne. Dans l'autre sens, depuis la Belgique, les camions en provenance des ports d'Europe du Nord sont plus souvent susceptibles d'acheminer de la cocaïne et des drogues de synthèse. 

Il y a certains types de produits nouveaux, de drogues de synthèse. Donc on est amenés à effectuer des consignations des marchandises pour une analyse en labo.

Un douanier

France 3 Hauts-de-France

La quarantaine d'agents de la brigade de Nogent-sur-Oise sillonnent l'autoroute 7 jours sur 7, 24 h sur 24. Leur grande force est leur mobilité, pour un meilleur effet de surprise. Ils peuvent intercepter leurs cibles en voiture ou à moto. Pour les fouilles, ils ont parfois le renfort d'un chien dépisteur.

"Il y a certains types de produits nouveaux, de drogues de synthèse. Donc on est amenés à effectuer des consignations des marchandises pour une analyse en labo, pour déterminer réellement la teneur du produit et sa dangerosité. Et puis, même, la qualification du produit en tant que tel, avec des nouveaux produits de drogues de synthèse qui existent et qui sont créés régulièrement par des chimistes dans des laboratoires clandestins", explique un douanier qui traque les stupéfiants de jour comme de nuit.

Des saisies record en 2022

En 2022, 2,6 tonnes de drogue ont été saisies dans les Hauts-de-France, dont une demi tonne en Picardie. Cela représente 100 % d'augmentation des saisies en Picardie en un an, principalement de cocaïne.

La plupart des saisies de drogue exceptionnelles se font sur le péage de Chamant, près de Senlis (Oise). En octobre 2022, 211 kilos de drogue dure (59 kilos de cocaïne et 152 kilos de kétamine) qui étaient cachés dans l'habitacle d'une voiture particulière, en provenance du Benelux et à destination la région parisienne, ont été interceptés. Valeur sur le marché estimée de cette prise record : 13 millions d'euros.

L'an dernier, la douane des Hauts-de-France n'a jamais intercepté autant de marchandises. "Et quand on voit la quantité, c'est quand même assez important, puisque 50 kilos de cocaïne c'est 50 kilos de cocaïne pure démultiplié par la coupe. Donc, c'est plusieurs centaines de kilos revendus dans la rue. Sachant que je rappelle que un gramme de cocaïne, c'est 60 € le gramme", commente Michael Lachaux, le directeur régional des douanes. 

"Ils sont surendettés, avec des difficultés financières, des difficultés familiales, des pensions alimentaires à régler et ils se laissent appâter pour 2 000 € ou 3 000 €, 4 000 €."

Sophie Jonquet, avocate de "passeurs"

France 3 hauts-de-France

Les routiers des "proies" faciles pour les trafiquants

Hors caméra, un chauffeur-routier espagnol avoue à nos journalistes avoir déjà eu des propositions pour transporter du cannabis en grande quantité. Avec la pandémie de Covid-19, les routiers, en difficulté économique, sont devenus des proies faciles pour les trafiquants. La plupart ont un profil similaire, selon Me Sophie Jonquet, une spécialiste qui a l'habitude de les défendre. "Ils sont surendettées, avec des difficultés financières, des difficultés familiales, des pensions alimentaires à régler et ils se laissent appâter pour 2 000 € ou 3 000 €, 4 000 €."

Les convoyeurs de drogue attrapés sur l'A1 sont souvent jugés au tribunal de Senlis. Ces "mules" encourent des amendes de centaines de milliers d'euros et jusqu'à dix ans de prison. Les têtes de réseau, elles, sont peu souvent poursuivies. Vu le nombre de saisies, la justice n'a pas les moyens d'approfondir toutes les enquêtes et de remonter les réseaux.

Les trafiquants sont prêts à tout pour ne pas perdre leurs précieuses marchandises. Les risques sont élevés, côté douaniers comme pour les transporteurs. Le directeur régional des douanes décrit une réalité sordide : "le contrebandier, son intérêt, c'est de ne pas s'arrêter. Pourquoi ? Parce que bien souvent, le transporteur, il est payé pour transporter la drogue d'un point A à un point B. Et si jamais il ne parvient pas à remplir son contrat, il y a un système d'amendes, au niveau des réseaux, qui peuvent aller sur jusqu'à des amendes physiques. On le voit sur les règlements de compte. Éventuellement, même la mort de certains protagonistes, en fonction des enjeux." 

Les douaniers des Hauts-de-France tentent à leur niveau d'endiguer le tsunami de produits stupéfiants qui déferlent sur l'Europe. Avec des saisies record et certaines drogues qui n'avaient encore jamais détectées, leur travail est loin d'être terminé.

"Drogue, les Hauts-de-France au cœur des enjeux"

Derrière les débats politiques, les faits-divers ou les décisions de justice, se cachent des enjeux profonds qui impactent l’ensemble de notre société : addictions, trafic, légalisation ou dépénalisation sont les sujets principaux de ce numéro d'Enquêtes de Région

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"Enquêtes de Région" vous propose trois reportages : L’A1, l’autoroute de toutes les drogues : avec les douaniers des Hauts-de-France qui, dans l’Oise, recherchent les trafiquants comme les consommateurs. Le cannabis de la discorde : légalisation, dépénalisation ou au contraire renforcement de la répression, un sujet qui divise la société. Qu’en est-il dans notre région et à nos frontières ? Une immersion aux Pays-Bas complètera cette enquête tournée à Amiens. Quand les vies dérapent avec l’addiction : un reportage émouvant avec des témoignages exceptionnels de celles et ceux qui ont un jour croisé la drogue et souffrent pour s’en sortir avec l’aide de professionnels. ©France Télévisions

>>>>Un magazine d'Enquêtes de région à voir ce mercredi 12 avril à 22h55 sur France 3 Hauts-de-France ou dans ce player ci-dessus ou en replay sur france.tv. Retrouvez l'ensemble des magazines des rédactions de France 3 Hauts-de-France. 

Pour compléter les reportages de la rédaction de France 3 Hauts-de-France, Ophélie Masure reçoit : 

  • Brandon Dutilleul, de l’observatoire français des drogues et des tendances addictives
  • Maroin Al Dadanchi, élu EELV de Lille et de la Métropole
  • Cindy Vandamme et Frédéric Brzozowski, de la Maison des ados de Lille 
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