L'ordre des médecins refuse l'installation d'un généraliste, le maire de la commune est en colère: "le système administratif pollue la santé"

Incompréhension à Bornel, dans l'Oise. Une médecin généraliste se voit refuser son installation dans un pôle de santé par l'ordre des médecins pour cause de cohabitation avec des sophrologues et une psychanalyste, des pratiques non conventionnelles. Un coup dur pour la commune qui n'a plus de médecins depuis bientôt un an.

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Dominique Toscani, maire de Bornel, dans l'Oise, ne décolère pas. L'odre des médecins refuse de donner son accord pour qu'un médecin généraliste puisse s'installer dans le pôle santé flambant neuf de sa commune. "Oui je suis très en colère. On marche sur la tête. Le système administratif pollue la santé. Nous avions trois médecins à Bornel dans le passé. Deux sont partis en retraite et une est partie en région parisienne parce qu'elle ne voulait pas rester toute seule dans un cabinet médical".

Cohabitation impossible

Après plusieurs mois de recherche, la commune de Bornel avait enfin trouvé un médecin généraliste, voire deux praticiennes prêtes à s'installer dans le pôle santé du village. "On a la chance d'avoir trouvé cinq médecins dont deux qui pourraient tout de suite exercer sur Bornel" déplore l'élu. 

Mais l'ordre des médecins de l'Oise en a décidé autrement. En réponse à la demande d'une des praticiennes, il refuse de donner son accord pour une installation sur ce site. "D'après un rapport récent de juin 2023 sur les dérives de pratiques non conventionnelles, la sophrologie et la psychanalyse n'étant pas assujetties aux professions médicales et ne peuvent donc exercer conjointement avec votre activité y compris avec des salles d'attente séparées" précise le courriel. 

Dans le pôle santé de Bornel, exercent en effet deux sophrologues et une psychanalyste, des pratiques dites non conventionnées. L'arrivée de la généraliste est donc bloquée.

"Tout le matériel est là"

Pour Stéphane Monde, propriétaire des lieux, c'est l'incompréhension. "Ce qu'on a fait, c'est offrir des conditions maximales aux praticiens, se défend l'entrepreneur. On savait dès le départ qu'un médecin ne pouvait pas partager sa salle d'attente avec d'autres activités non conventionnées donc on a intégré dans notre cahier des charges cette possibilité-là. Le médecin a sa cellule et sa salle d'attente exclusive. Nous, ce qu'on aimerait, c'est que l'ordre des médecins puisse venir apprécier les lieux dans leur configuration, voir s'il n'y a pas des possibilités pour trouver des solutions ensemble. Là le bâtiment est tout neuf, aux dernières normes, avec une configuration bien particulière donc si on doit faire des ajustements d'agencement, techniquement, ça peut représenter un surcoût significatif".

Sur place, le maire fait les comptes. "Tout le matériel est là : bureau, ordinateur, table électrique, les différentes balances pour un coût total de 7 000 €, financés par la communauté de communes des Sablons. J'ai à Bornel, 5 000 habitants. On a un bassin de vie d'environ 12 000. On peut s'égosiller sur la désertification médicale, mais encore une fois, arrêtons de bloquer les choses, s'insurge Dominique Toscani. A chaque fois qu'on a une solution, à chaque fois, il y a un blocage". 

Pour les Bornellois aussi, c'est la douche froide. "C'est très dommage, regrette une patiente parce que moi, j'ai ma maman de 88 ans. C'est très difficile de s'organiser pour trouver un médecin et l'emmener, donc je l'emmène à Beauvais pour qu'elle se fasse soigner. On est à 30 km. Toutes les personnes de son âge à Bornel ont le même souci". 

Déception partagée par les professionnels déjà installés dans l'infrastructure. Hélène Marzac est diététicienne et voit dans ce projet l'occasion d'un travail collaboratif. "Au niveau de l'éducation alimentaire, je pourrais en faire une partie, alléger le médecin dans son travail. Sur tout ce qui est diabète, cholestérol, je peux très bien faire l'éducation alimentaire au lieu d'avoir tout de suite un traitement médical. Et si moi aussi, je sens que l'éducation ne suffit pas, je peux conseiller à mon patient d'aller voir le médecin pour ne pas le laisser démuni".

La téléconsultation, une solution alternative

Dominique Toscani a saisi député et sénateur afin d'obtenir une dérogation auprès de l'ordre des médecins.

En attendant l'arrivée d'un généraliste, les 5 000 habitants de la commune peuvent se tourner vers une borne de téléconsultation installée à la mairie.

Contacté, l'odre des médecins n'a pas souhaité répondre à nos sollicitations.

Avec Grégoire Alcalay / FTV

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