La Cour de cassation a rejeté jeudi 7 décembre le pourvoi de Vincent Verschuere, cet éleveur de vaches laitières de l'Oise qui avait été condamné en 2022 à verser 106 000€ de dommages et intérêts à ses voisins qui avaient porté plainte pour nuisances sonores et olfactives.
"C'est une grande déception, ça me met un coup au moral", réagit à chaud Vincent Verschuere jeudi 7 décembre en fin de journée. La Cour de cassation vient tout juste de confirmer, dans son arrêt, la condamnation de cet éleveur de vaches laitières de l'Oise.
En mars 2022, il avait dû verser 106 000€ à des voisins qui se plaignaient du bruit et de l'odeur de ses vaches après la construction de deux hangars de 2 800m² en 2010 dans son exploitation située au centre du village de Saint-Aubin-en-Bray.
"On avait un espoir"
"Si on a été en cassation, c'est qu'on avait un espoir. On n'a aucun regret. La grande déception, c'est le résultat qui n'a pas été à la hauteur de nos espérances", appuie l'agriculteur de 34 ans, à la tête de sa ferme depuis 2009.
La Cour de cassation a jugé dans son arrêt, que l'AFP a pu consulter, que les nuisances "excédaient, par leur nature, leur récurrence et leur intensité, les inconvénients normaux du voisinage". Elle estime que "les bâtiments agricoles litigieux se [situent] en zone urbaine du village, [...] au sein de laquelle sont en principe interdites les constructions et installations dont la présence est incompatible avec la vie de quartier en raison des nuisances occasionnées".
Un autre jugement en 2024
La suite pour l'éleveur ? Le tribunal judiciaire de Beauvais doit encore statuer sur le second volet de l'affaire en 2024. Il devra "se prononcer sur ce trouble et décider quel aménagement du bâtiment peut être mis en place", explique Vincent Verschuere.
L'éleveur a proposé "une isolation côté riverain et la création d'une ventilation en toiture pour que l'air des bêtes soit renouvelé". Mais "on ne sait pas si le tribunal jugera cette proposition suffisante", souligne-t-il.
Si ce n'est pas le cas, le tribunal pourrait décider d'un "changement d'usage du bâtiment ou de sa démolition", ce qui mettrait fin à l'activité de l'éleveur.
Une bataille judiciaire qui dure depuis 10 ans
En 2010, l'agriculteur a investi 600 000€ dans l'extension de sa ferme à travers la construction de deux hangars de 1257 et 1550 m². Des constructions pour lesquelles il a obtenu l'aval de la mairie et une dérogation préfectorale, les hangars étant situés à moins de cent mètres des habitations.
Six voisins ont porté plainte pour nuisances sonores et olfactives et obtenu l'annulation de son permis de construire par le tribunal administratif d'Amiens en 2013, les hangars étant jugés trop proches du voisinage. L'éleveur a ensuite été condamné en 2018 pour "troubles anormaux du voisinage" par le tribunal judiciaire de Beauvais.
Et en mars 2022, la Cour d'appel d'Amiens a confirmé la condamnation prononcée par le tribunal de Beauvais, reconnaissant les nuisances olfactives et sonores du bâtiment, et l'a condamné à verser 106 000 euros de dommages et intérêts aux plaignants. Pour payer les 106 00 euros de dommages et intérêts, Vincent Verschuere a reçu une avance remboursable de 40 000 euros de la région Hauts-de-France et a contracté un emprunt bancaire de 60 000 euros.
Depuis les débuts cette affaire, trois des riverains plaignants "ont vendu leur maison et déménagé", précise l'éleveur.
Lundi 4 décembre, une proposition de loi visant à limiter ce genre de plaintes contre les agriculteurs, a été adoptée par l'Assemblée nationale.