La cueillette sauvage a commencé, les "naisseurs" de graines sont au travail à Wimille, prés de Boulogne-sur-Mer

Si le pépiniériste vend des végétaux, des arbres et des arbustes, ce n'est pas toujours avec ses propres graines qu'il les fait naître. A Wimille, la pépinière de la Cluse récolte les fruits et les graines à la main, avant de produire des végétaux locaux. Une cueillette dans le bocage boulonnais pour commercialiser des plantes adaptées au climat des Hauts-de-France.

En ce matin d’octobre, dans une pâture mise à disposition par un agriculteur voisin, Stéphane Jougleux et son équipe recensent une dizaine d’espèces de végétaux différents. " L à, on a des prunelliers, puis plus loin des fusains, au fond des érables sycomores et beaucoup d’aubépines" détaille Stéphane Jougleux, cogérant de la pépinière de la Cluse. La cueillette des fruits et graines sauvages, c’est un travail minutieux au résultat très coloré.

Installée à Wimille, tout a coté de Boulogne-sur-Mer, la pépinière commercialise depuis 1987 des arbres et des arbustes locaux issus de ses cueillettes. " On recherche des haies très anciennes, installées avant les années 70, pour avoir des variétés qui n’ont pas été modifiées génétiquement par des croisements avec des plantations dont on ne connait pas la provenance " explique Stéphane Jougleux.

Rapidement l’équipe des cueilleurs se met au travail : ce matin-là, le jeune Romuald et ses 3 collègues vont " plumer" les branches de l’aubépine, sans casser les tiges ni faire éclater les fruits." Il ne faut pas se tromper de variété, l’aubépine monogyna ne contient qu’une seule graine, pas deux comme l’aubépine laevugata", un détail qui a son importance, puisque le but de la récolte, c’est la préservation de chaque espèce, sans croisement.

L’aubépine, c’est ce petit arbre rustique qui peut atteindre 6 à 12 mètres de hauteur. Avec sa silhouette arrondie et son feuillage épineux, il se couvre de fleurs blanches au printemps qui donneront dès le mois d’août des petits fruits rouges, appelés cenelles, un régal pour les oiseaux.

Symbole de nos haies bocagères, elle a bien failli disparaître victime de maladies. " On ne pouvait plus la planter, elle était porteuse du feu bactérien, mais aujourd’hui, c’est quasiment terminé et la demande des clients est forte" se réjouit Stéphane Jougleux.

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la cueillette sauvage de la pépiniére de la Cluse à Wimille (62) ©FTV Isabelle Girardin

Au total, 400 kg de fruits d’aubépine entièrement récoltés à la main, qui dépulpés donneront 50 kg de graines. Stockées au froid, elles seront plantées l’année prochaine. " On ne cueille pas plus de 30% des baies de l'arbre" précise Stéphane. " La cueillette est sauvage mais pas brutale."

Planter pour être au plus près de l’écosystème naturel

Depuis quelques années, l’entreprise a adhéré à la marque "Végétal Local". Une marque portée par l’Office français de la biodiversité. Créée en 2015, par l a Fédération des Conservatoires botaniques nationaux, l 'Association Française Arbres Champêtres et Agroforesteries, veille au bon fonctionnement des écosystèmes.

Si on replante aujourd’hui des haies, il faut garantir l’origine locale des plants qui vont la composer. Créer un cercle vertueux où les plantes correspondent à leurs pollinisateurs qui eux-mêmes vont nourrir la faune sauvage. Des plantes non-natives peuvent décaler tout un cycle de reproduction, " faire rater aux abeilles la pollinisation et les empêcher de féconder les fleurs." Conséquence : la famine chez certains papillons ou un manque de fruits pour les oiseaux qui doivent constituer des réserves avant leur vol migratoire. Tout est imbriqué. En ratant ces rendez-vous, on trouble la biodiversité.

Pendant des années, le monde horticole a massivement importé des plantes de Belgique ou des Pays-Bas. Moins chers, ils ont colonisé nos jardins, nos campagnes. En replantant pour seulement verdir, l’homme a créé la pagaille.

Nous sommes des naisseurs, c'est-à-dire que nous démarrons la culture à partir de la graine que nous avons nous-même récoltée

Stéphane Jougleux, cogérant de la pépinière de la Cluse

De mi-août à mi-octobre, les cueillettes vont se succéder à la pépinière de la Cluse : noisetiers, charmes, églantiers. Graines à pulpe ou graines vertes, autant de graines à nettoyer avant de les faire germer. " Nous sommes des naisseurs, c’est-à-dire que nous démarrons la culture à partir de la graine que nous avons nous-même récoltée" sourit Stéphane. Chaque année, on sème ici, 15 km de ligne. Installées en pleine terre, les jeunes pousses seront bichonnées et il faudra au moins 2 ans, avant que les petits plants ne soient vendus.

" Nous répondons à des commandes groupées de particuliers organisées par des communautés de communes, mais aussi à des commandes de collectivité, de la Fédération de chasseurs, de l'ONF ou encore dans le cadre de l’opération Plantons le décor" rappelle Stéphane. "Les mentalités progressent et quand une plante est acclimatée, il y a moins de perte." Un avantage pour le client aussi !

Aujourd’hui, en France, 90 producteurs adhérent à la marque végétale locale, une histoire de patience et d’harmonie avec la nature.

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