Un bras de fer avec leur hiérarchie a poussé les CRS en poste à Calais à dormir dans leurs véhicules de service, en pleine mission à Calais.
"Contacter la presse, c’est le seul moyen de pouvoir se faire entendre" tranche Gérald*, un CRS qui fait partie du mouvement des Policiers en colère.Depuis mercredi dernier, lui et la compagnie de CRS 55 Marseille étaient logés au Suite Novotel de Coquelles, non loin de l’ancienne jungle de Calais où ils travaillent actuellement.
Punaises de lit
"Avant-hier, des collègues ont découvert, dans deux ou trois chambres, des punaises de lit. Il faut savoir que ce n’est pas la première fois que ça arrive. Il y a constamment des compagnies dans cet hôtel, c’est au moins la troisième fois. L’hôtel ne traite que les lits concernés."
Mécontents, les CRS contactent leur hiérarchie et leur administration pour demander une solution de relogement. "La seule chose qu’on nous ait proposé, c’est de changer de chambre les fonctionnaires concernés. C’est inadmissible, on a évidemment opposé un refus. Devant leur blocus, on a décidé de dormir dans nos véhicules."
"Nous avons traité l’intégralité de l’hôtel en Juillet, pour toute sûreté car c’est quelque chose de très rare, indique le gérant de l’hôtel, monsieur Konate. Il y a encore eu deux traitement sur six chambres la semaine dernière, on a traité les chambres incriminées et adjacentes. Les punaises de lit, c’est un problème national et mondial", juge-t-il.
La préfecture du Pas-de-Calais, de son côté, indique que les analyses menées dans l'hôtel n'ont pas permis de conclure à une contamination, ce qui contredit la version des fonctionnaires et de l'hôtel.
"Un peu compliqué ce soir"
Pourtant, les CRS ont photographié ces punaises, et filmé leur situation. "Comme vous pouvez le constater, nos conditions d’hébergement sont un peu compliquées ce soir" ironise le CRS qui tient la caméra, ses collègues entassés et endormis dans les camions.
"C’est pas pour demander un palace, qu’on fait ça. Je vous parle de nos conditions de vie, même pas des conditions de travail ! On demande un hébergement décent, aux normes, des vraies conditions de repos. Depuis trois ans, on est très sollicités, on travaille à flux tendus, avec des congés réduits au strict minimum légal. Si en plus on ne peut pas récupérer, vous imaginez ? La fatigue, la nervosité… ça peut très vite jouer sur la sécurité."
Ils passent 24heures sur le parking de l’hôtel et accusent le gérant de leur avoir verrouillé l’accès au hall et aux sanitaires.
"Faux aussi, répond monsieur Konate. Ils se sont servis des toilettes du hall comme d’une salle de bain, on leur a indiqué que ça n’en était pas une."
Il estime, pour sa part, que les tensions avec l’hôtel sont un dégât collatéral dans le conflit entre les CRS et leur hiérarchie. "C’est le seul moyen pour eux de se faire entendre, et ça ne m’étonne pas, on sait qu’il y a beaucoup de conflits sociaux chez les CRS. Après, accuser les compagnies privées, je trouve ça excessif", contrattaque monsieur Konate.
Pression du groupe Novotel ?
L’administration de la compagnie 55 reste en tout cas immobile jusqu’à ce que ses membres décident de contacter les médias. Ils informent leur hiérarchie qu’ils sont prêts à répondre aux interviews.
"Ah, là, oui ! On a eu une réponse dans la demi-heure. Ils n’aiment pas être pris en défaut. Et il faut savoir que la solution, ils l’avaient déjà, depuis le début ! Mais ils sont comme ça, ils veulent voir si on bluffe."
D’autant que, selon des sources syndicales, Novotel menace l’administration de rompre tous les contrats de logements avec les compagnies de CRS en France, l’Etat ne payant pas les chambres au prix fort.
Novotel, contacté par France 3 "dément formellement avoir menacé de rompre des accords commerciaux au principe qu'il existe, en France, le refus de vente, qui est interdit par la loi".
La compagnie est maintenant logée à Abbeville, à 1h20 de leur lieu de travail. Gérald, qui a fini son service à 7heures ce matin, se prépare à se coucher. Il est 9h00. "La considération, on se demande où elle est", conclut-il.