Jeudi 4 novembre, un TER a percuté un groupe de migrants sur une voie ferrée située à l'est de Calais, près d'un campement, faisant un mort et trois blessés. Un nouveau drame sur la route de l'exil, qui survient sous fond de tension entre militants et autorités.
Le drame s'est déroulé à la nuit tombée, vers 18h30, jeudi 4 novembre, dans le quartier du Beau-Marais, près du centre-ville de Calais. Un train express régional (TER) a percuté un groupe de migrants sur la voie ferrée de la ligne Dunkerque-Calais.
Bilan : un mort, un blessé grave et deux blessés légers. Ces deux derniers seraient de nationalité érythréenne.
Le conducteur du train a lui été entendu par les policiers. "Il a vu un groupe de migrants sur le bord de la voie au dernier moment, à la sortie d'un virage", rapporte le procureur de la République du tribunal de Boulogne-sur-Mer. Il a commencé à freiner mais n'a pu éviter de les percuter."
Un drame qui en rappelle un autre. Le 12 octobre dernier, dans le Pays basque, trois migrants perdaient la vie, fauchés par un TER, sur la route de l'exil, comme le rapporte le quotidien Sud Ouest.
"La violence est quotidienne, incessante."
"Des gens traversent quotidiennement des rails, alors qu'on ne s'étonne pas que la mort soit au bout." Ces mots sont ceux de Jean-Claude Lenoir, président de l'association Salam qui vient en aide aux migrants sur la côte d'Opale. Celui-ci dénonce "une violence quotidienne et incessante" dont font l'objet les migrants. "La dangerosité est partout, que ce soit en mer, sur les autoroutes ou bien sur les voies ferrées."
Jean-Claude Lenoir pointe du doigt des responsables : "Le gouvernement fait peu de chose pour que cela s'améliore. Monsieur Darmanin (ministre de l'Intérieur) a une grosse part de responsabilité dans ce qu'il se passe aujourd'hui. Tout comme les préfets qui obéissent aux ordres sans sens critique."
Pour éviter ces drames, c'est "en amont" qu'il faut agir, selon le militant de Salam. "Le nerf de la guerre, c'est déjà de mettre fin à la procédure Dublin", assure-t-il. Ce règlement qui impose aux migrants de déposer leur demande d’asile dans le pays qui l’a contrôlé en premier, souvent la Grèce, l'Italie ou encore l'Espagne.
Une voie ferrée souvent traversée par les migrants
C'est près du restaurant Burger King de ce quartier pavillonnaire du Beau-Marais, au bord de la ligne de chemin de fer, que s'est déroulé l'accident.
De nombreux migrants traversent fréquemment les rails à cet endroit, afin de rejoindre le centre-ville de Calais.
"La sécurisation de cette voie est demandée de longue date par Natacha Bouchart ", explique-t-on au cabinet de la maire de Calais.
Dix-sept personnes se trouvaient dans le TER mais "aucun n'a été blessé", selon
le procureur. Le parquet a ouvert une enquête pour homicide involontaire.
Vers 20h00, les secours avaient quitté les lieux et les équipes de la SNCF étaient
toujours présentes sur les lieux de l'accident
La ligne de TER, interrompue à la suite de l'accident, a repris du service ce vendredi 5 novembre, a annoncé la SNCF, via Twitter.
Un drame sous fond de tensions
Cet événement survient dans un climat tendu entre les associations et les autorités sur la question migratoire à Calais. Jeudi, jour du drame, les forces de l'ordre sont intervenues pour démanteler un campement à l’autre bout de la rue du Beau-Marais, près de Marck. Des migrants et militants associatifs avaient alors tenté de s'y opposer.
Une grève de la faim est par ailleurs actuellement suivie, depuis le 11 octobre, par deux militants souhaitant alerter sur les expulsions de sans-papiers. Un jeûne auquel vient de prendre fin un troisième membre, le prêtre Philippe Demeestère qui souhaite poursuivre son "combat autrement".
Proposition de mise à l'abri temporaire
Ce vendredi 5 novembre, à 14 heures, le médiateur Didier Leschi, envoyé par l'Etat pour trouver des solutions à cette crise, donnait une conférence de presse.
Pas de nouvelle proposition, mais le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration en a profiter pour rappeler l'intérêt de la création, annoncée le 3 novembre, d'un "sas d'hébergement de nuit ouvert tous les jours après les évacuations", à Calais. Une structure permettant d'accueillir temporairement 300 migrants la nuit, avant de les rediriger vers des hébergements pérennes.
Ce n'est "absolument pas une solution", réagissait Claire Millot, secrétaire générale de Salam, vendredi 5 novembre sur franceinfo.
"Multiplication des passages à travers la Manche"
Ces derniers jours, les tragédies se succèdent sur le littoral de la Manche. Dans la nuit de mardi 2 à mercredi 3 novembre, un migrant est mort en tentant de traverser la mer, alors qu'un second a été retrouvé inanimé à Wissant, jeudi 4 novembre en début de matinée. Depuis le début de la semaine, près de 800 migrants ont été secourus.
"Il y a une multiplication des tentatives de passages à travers la Manche", assurait Didier Leschi, jeudi 4 novembre, à franceinfo. Selon lui, il y aurait actuellement environ 900 migrants dans le Calaisis où "les passeurs ont réussi à établir une sorte de camp de base".