Depuis plusieurs semaines les pédopsychiatres du centre hospitalier de Lens se mobilisent pour dénoncer leur charge de travail et le manque d'effectifs. Sur six pédopsychiatres, le service ne tourne aujourd'hui qu'avec deux médecins. Une situation qui ne peut pas durer pour les syndicats.
"Ça fait 12 ans que je suis permanent syndical. Maintenir pendant près de deux semaines un taux de participation à la grève de 20%, ce n'est pas anodin" constate Patrice Ramillon, secrétaire adjoint FO Santé à Lens.
Ce 30 mai, les pédopsychiatres du CH Lens entament le 13ème jour de grève. Au programme, une animation réalisée par les agents de pédopsychiatrie pour présenter les enjeux de la mobilisation.
Plus que deux pédopsychiatres pour tout le centre hospitalier
Ce point de non-retour est le résultat de nombreuses difficultés qui s'accumulent. "Au fil des mois, les différentes alertes portées en interne au Centre Hospitalier de Lens sur cette situation critique (...), se sont heurtées à une méconnaissance institutionnelle de la réalité du volume d'activité de notre service de pédopsychiatrie et aux difficultés structurelles médicales pour y répondre" relate le préavis de grève de FO Santé.
Initialement composée de six pédopsychiatres, l'unité survit désormais avec deux d'entre eux, qui n'exercent pas à temps complet. La pression sur le suivi des 2400 enfants répartis dans dix unités fonctionnelles "devient très préoccupante" dénonce FO. D'autant plus que depuis la pandémie de Covid, les besoins ont augmenté de 40% et la santé mentale des jeunes s'est particulièrement dégradée.
Autre problème, cette pénurie médicale peine à être comblée. Les stagiaires ne souhaitent plus y réaliser leur internat, et de nouveaux médecins ne sont pas recrutés. La situation est également trop tendue pour prendre le temps de former des travailleurs étrangers, "faut-il encore qu'ils aient une appétence pour la pédopsychiatrie" relate Patrice Ramillon.
À terme, le syndicat craint que le développement d'activités, déjà validées et financées par l'ARS ne puisse avoir lieu, alors que le recrutement de paramédicaux est déjà en cours. Les rapports entre les personnels mobilisés et la direction sont particulièrement tendus, et la grève qui devait durer du 17 au 24 mai, a été reconduite jusqu'au 30.
"Des enfants qui vont enkyster leurs troubles"
Les grévistes se mobilisent donc pour réclamer le recrutement en urgence de médecins, l'accès au soin pour tous et la pérennité des recrutements dans les services. "Notre revendication ? Pouvoir continuer à répondre de façon satisfaisante aux besoins en santé mentale de la population qui ont explosé ces trois dernières années. Ne pas laisser s'enkyster dans la population du bassin minier les troubles psychiques qui peuvent, s'ils ne sont pas traités, se transformer en trouble psychiatrique" explique le secrétaire adjoint FO.
Car au-delà des difficultés organisationnelles, c'est la santé mentale des plus jeunes qui est mise en danger. Ne pas prendre en charge les troubles psychiatriques avant l'âge de 14 ans, cela fait des "enfants qui vont enkyster leurs troubles et nourrir les prises en charge de psychiatrie adulte. L'enjeu est considérable, c'est un enjeu de santé publique pour le futur" poursuit le syndicaliste.
Les pédopsychiatres peuvent compter sur le soutien du pôle psychiatrie adulte, mais également du pôle femme mère enfant et des équipes paramédicales. Le premier jour de mobilisation, 70% des équipes ont pris part à la grève.