C'est la première fois que Lydie Maninchedda reçoit un tel appel, alors qu'elle se bat depuis des années pour faire rapatrier en France ses petits-enfants âgés d'un à cinq ans.
Lorsque Lydie Maninchedda a pris la parole, sur notre site internet ou dans d'autres médias pour demander le rapatriement de ses trois petits-enfants, orphelins et isolés dans un camp après le décès de leur mère en Syrie, elle savait qu'elle s'exposait, mais ne s'attendait pas à être prise pour cible dans sa propre vie personnelle.
"T'aurais dû abattre ta fille"
"Ces interventions ont été à l'origine de l'appel d'un inconnu sur notre ligne fixe" explique-t-elle. C'était vendredi, vers 19 heures. Son mari décroche et un homme, qui se présente comme "un bon Français", se met à le tutoyer. "Il lui a dit : 'T'aurais dû abattre ta fille, pour tout ce qu'elle a fait'".Des mots glaçants, pour ce couple de Libercourt qui a appris le décès de sa fille il y a quelques jours seulement.
Julie Maninchedda, ancienne étudiante lilloise, s'était convertie à l'islam et avait fait la rencontre d'un Allemand, Martin Lemke, auprès de qui elle s'était rapidement métamorphosée.
Lorsque les deux partent en Syrie, fin 2014, leur premier enfant est âgé de dix mois. Maltraitée, elle finit par quitter le père de ses enfants, membre de la police de Daech, se remarie et envisageait même de revenir.
Elle a été retrouvée morte fin 2018, aux côtés de son nouveau mari et de son quatrième enfant, décédé également. Depuis, ses trois autres enfants se trouvent au camp de réfugiés de Al-Hol, dans des conditions "déplorables".
"Mon mari a essayé de défendre la mémoire de notre fille"
"Au début, mon mari a essayé de défendre la mémoire de notre fille" précise Lydie Maninchedda. "Il lui a plusieurs fois demandé son nom mais il n'a pas voulu le donner."Et d'ajouter : "L'appel a duré deux minutes, mais il aurait pu durer plus longtemps si nous n'avions pas raccroché."
"Appeler des parents qui sont en deuil, qui souffrent, je trouve ça déplacé !" tempête-t-elle. "J'appelle ça du harcèlement" puisqu"on vient jusque chez vous, dans votre vie personnelle pour vous agresser".
Deux jours plus tard, la Nordiste reste "choquée" par cet appel, le premier qu'elle reçoit en quatre ans de combat médiatique. Même si elle ne craint pas d'en recevoir d'autre – "on s'est mis depuis sur liste rouge" – elle envisage de porter plainte dès lundi, "notamment pour en dissuader d'autres".