Coronavirus : les entreprises picardes en difficulté veulent l'exonération plutôt que le report des cotisations sociales

La situation est compliquée pour les entreprises et les travailleurs indépendants picards, alors que la perte sèche de deux mois de chiffre d'affaire pèse sur les trésoreries. Dans ce contexte, le report des cotisations sociales consenti par le gouvernement peine à rassurer.

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C'est une mesure exceptionnelle mise en place par le gouvernement : entre le 15 mars et le 15 mai, les cotisations sociales d'un peu plus de 18 000 entreprises picardes, soit près de la moitié d'entre elles, ont été reportées. Des entreprises dans l'incapacité, pendant le confinement, de s'acquitter de leur dû à l'Urssaf qui n'a par conséquent engagé aucune procédure habituelle de majoration ni de recouvrement.

 

"Posture de bienveillance"

"Pour l'instant, tout est figé, explique Christophe Dumoulin, chargé de relations publiques auprès de l'Urssaf. On est dans une posture de bienveillance." Mais après deux mois de confinement, ce sont près de 250 millions d'euros de cotisations qui manquent. Des cotisations qui servent à financer la protection sociale, reversées aux caisses de retraites ou encore aux Caf.

Heureusement, il reste néanmoins des entreprises en mesures de payer. C'est le cas notamment de la grande distribution, dont la majeure partie des enseignes n'a pas connu de cessation d'activité. C'est aussi le cas d'une partie de l'industrie et des services, comme par exemple les banques.

 

Le secteur de la restauration particulièrement touché

"Aujourd'hui, la situation varie selon les secteurs", poursuit Christophe Dumoulin. Parmi les plus touchés : celui de la restauration. Toujours selon les données communiquées par l'Urssaf, 72 % des établissements de l'hôtellerie et de la restauration sont concernés par le report des cotisations sociales pendant le confinement.

"Pour nous, la situation économique est catastrophique, alerte Charles-Edouard Barbier, vice-président de l'Union des métiers et des industries de l'hôtellerie (UMIH) de l'Oise. Il y a des établissements qui ont déjà mis la clé sous la porte et d'autres qui ne rouvrent pas parce qu'ils savent qu'ils n'atteindront pas leur seuil de rentabilité avec les mesures sanitaires."

 

L'exonération plutôt que le report

Le nombre de couverts dans les restaurants a considérablement baissé et la possibilité d'installer les clients en terrasse reste dépendante de la météo. Dans ce contexte, et pour absorber les coûts de personnel, le report de charges semble insuffisant. "Quid de la rentabilité si on ne peut remplir son établissement qu'à 50 %", reconnaît Christophe Dumoulin.

"Il nous faudrait six mois d'exonération pour refaire notre trésorerie, poursuit Charles-Edouard Barbier. Le report ne nous sert pas à grand chose si on ne retrouve pas de rentabilité derrière et nous ne rattraperons pas le chiffre d'affaire perdu."

Mais au delà de la question des cotisations sociales, c'est le désengagement des assureurs que la profession dénonce. Normalement, ces derniers assurent la prise en charge du chiffre d'affaire en cas de fermeture administrative. "Mais là, ils nous répondent que l'épidémie n'était pas prévue dans les clauses", pointe le vice-président de l'UMIH.

 

Inquiètude chez les artisans

Du côté des travailleurs indépendants aussi, la situation semble compliquée. L'ensemble de leurs cotisations sociales ont été reportées, selon une décision nationale. Ce qui représente près de 100 millions d'euros pour environ 36 000 travailleurs indépendant, en Picardie. Mais l'inquiètude demeure pour l'avenir, notamment parmi les artisans du BTP.

"C'est juste un report mais, en attendant, les charges fixes restent, explique Julien Cayet Panico, vice-président de la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb). Il va falloir une vraie reprise d'activité derrière pour amortir les pertes et permettre aux artisans de rembourser les prêts contractés."

 

La nécessité d'un plan de relance ambitieux

Une reprise incertaine pour le représentant de la Capeb : "Beaucoup de gens ont dépensé leur budget travaux pour bricoler eux-mêmes et avec le report des municipales, de nombreux marchés publics risquent d'être reportés." Pour l'heure, l'activité ne semble pas baisser mais le secteur compte sur le gouvernement, qu'il appelle à "mettre en place un plan de relance ambitieux, en favorisant les circuits courts, dont l'artisanat".

Un espoir partagé par une grande partie des entrepreneurs en difficulté pour qui le report des cotisations sonne comme une solution en demi-teinte. "C'est un peu comme une boule de neige qu'on pousse devant soi", reconnaît Christophe Dumoulin.

Des annonces ont d'ores et déjà été faites, qui évoquent une éxonération de charges exceptionnelle pour certains secteurs. Une décison qui ne revient pas à l'Urssaf mais aux pouvoirs publics et leurs ministres de tutelle, vers qui tous les yeux seront tournés dans les jours à venir.

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