La cour d'appel de Paris a annulé lundi un non-lieu dans l'enquête sur la vente de l'hippodrome de Compiègne et demandé la mise en examen de deux anciens collaborateurs d'Éric Woerth, une décision qui relance l'affaire dans laquelle a été blanchi l'ex-ministre.
Selon cette décision révélée par le site du journal 20 minutes, la Chambre de l'instruction a ordonné un supplément d'information dans l'enquête sur la vente controversée de cet hippodrome autorisée en 2010 par Éric Woerth, alors ministre du Budget.
Les magistrats réclament la mise en examen de Cédric de Lestrange et Sébastien Proto dans le volet non-ministériel de l'affaire qui avait abouti à un non-lieu ordonné par le juge d'instruction en août 2015, conformément aux réquisitions du parquet. Le syndicat forestier Snupfen, partie civile, avait fait appel.
Indices "graves et concordants"
Dans des extraits de son arrêt, la cour d'appel relève l'existence d'"indices graves et concordants" à l'encontre de Cédric de Lestrange et Sébastien Proto et demande leur convocation en vue de leur mise en examen pour ,"abus d'autorité par une personne dépositaire de l'autorité publique".
La cour d'appel demande que Cédric de Lestrange soit également poursuivi pour "favoritisme" et que la Société des courses de Compiègne, (SCC), en tant que personne morale, soit mise en examen pour recel d'abus d'autorité et de favoritisme.
Cédric de Lestrange était conseiller en charge des politiques immobilières de l'État auprès d'Éric Woerth au ministère des Comptes publics. Sébastien Proto a été directeur de cabinet de l'ex-ministre Valérie Pécresse à Bercy (2011-2012). Très proche de Nicolas Sarkozy, il a notamment inspiré son programme économique et social en vue des présidentielles de 2012 et 2017.
L'affaire relancée
"Les investigations sont relancées, on va enfin pouvoir faire constater que des actes illicites ont été commis et en pleine connaissance de cause", s'est réjoui Grégory Saint Michel, avocat du député PS du Nord Christian Bataille, à l'initiative de la procédure.
Visé par une enquête distincte pour "prise illégale d'intérêts", Éric Woerth a obtenu un non-lieu fin 2014 devant la Cour de justice de la République (CJR), compétente pour les délits imputés à des membres du gouvernement en exercice.
Au centre du dossier: la décision qu'il a prise en mars 2010 pour autoriser par arrêté la vente de 57 hectares de la forêt de Compiègne (Oise), accueillant un golf et un hippodrome, à la SCC, pour 2,5 millions d'euros.
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Les opposants, qui ont dénoncé une vente à prix bradé, soupçonnaient l'ancien ministre, élu dans l'Oise, d'avoir voulu favoriser la SCC, dont était membre son suppléant de l'époque Christian Patria, décédé depuis, et dont le président, Antoine Gilibert, était adhérent de l'ex-UMP. L'ex-ministre s'en est toujours défendu, assurant avoir agi dans le cadre d'une politique globale de vente des biens fonciers non essentiels au service public.
Les opposants ont échoué à faire annuler cette cession devant la justice administrative qui a estimé leur demande irrecevable, selon une source proche du dossier. L'affaire avait longtemps pesé sur l'avenir politique d'Éric Woerth. Depuis, il a aussi bénéficié de deux relaxes dans l'affaire Bettencourt.