L'opéra de Lille remonte un opéra joué à l'époque en 1660, à l'occasion du mariage de Louis XIV et Marie-Thérèse d'Autriche. Le public pourra découvrir "Xerse" - prononcer "Cerssé" - du 2 au 10 octobre à Lille. Un événement inscrit dans le cadre des festivités de" Renaissance".
Donner un opéra monté une seule fois, à l'occasion du mariage de Louis XIV à Marie Thérèse d'Autriche: c'est le défi, "passionnant", que relève l'opéra de Lille en présentant Xerse, de Cavalli, dont la représentation à Versailles avait marqué "la naissance de l'opéra en France".
"C'est une véritable recréation: Xerse, tel qu'on va le présenter à l'opéra de Lille, n'a jamais été joué depuis 1660", s'enthousiasme Emmanuelle Haïm, directrice musicale.
Xerce ou l'histoire du roi de Perse partant conquérir Athènes
La première représentation de "Xerse", qu'il faut prononcer "Cerssé", est une date importante de l'histoire de la musique en France car "elle fonde toute la tradition de l'opéra français, constituant un événement musical mais aussi historique", explique la directrice de l'opéra Caroline Sonrier.En ce milieu du XVIIe, Francesco Cavalli (1602-1676), élève et successeur de Monteverdi, est un compositeur de renom, dont les opéras font recette à Venise. A partir de 1654, on y donne Xerse, pur produit de la tradition lyrique vénitienne, qui retrace l'histoire du roi de Perse partant conquérir Athènes.
L'influent cardinal Mazarin, originaire des Abruzzes, "tente alors d'implanter le compositeur italien en France alors que l'opéra n'existe pas encore dans le royaume", rappelle Mme Sonrier.
Du ballet pour plaire au "Roi soleil" et fonder la tradition française de l'opéra
Mais pour plaire au jeune Louis XIV (1638-1715), il est impensable de ne pas adjoindre un ballet, genre dont raffolait le "Roi soleil".Le surintendant de la musique royale Lully (1632-1687), de son vrai nom Giovanni Battista Lulli et arrivé en France à l'âge de 13 ans, "impose des intermèdes dansés, qui sont totalement séparés de l'intrigue principale, celle de l'opéra de Cavalli", note Maud le Pladec, chorégraphe. "Cette rencontre de deux cultures musicales va fonder toute la tradition de l'opéra français", dit Mme Sonrier.
A l'occasion du mariage de Louis XIV à Marie-Thérèse d'Autriche
Mais cette représentation a aussi un autre dessein: affermir la puissance de celui qui allait marquer d'une main de fer tout le XVIIe siècle. "A travers cet opéra, il s'agit d'encourager le roi dans sa fonction, de lui donner la force de devenir vraiment un roi", explique Guy Cassiers, metteur en scène. "Le mariage entre Louis XIV et Marie-Thérèse d'Autriche était conçu pour maintenir la paix en Europe et on trouve exactement le même mariage de raison à la fin de Xerse".En cette année du tricentenaire de la mort de Louis XIV, cet opéra permet également de montrer à quel point la musique a permis de servir la politique de la royauté.
Une voix de basse plutôt qu'un castrat
"Les ballets somptueux donnés à Versailles seront un véritable outil de propagande adressé au monde pour faire passer le message de la toute-puissance de Louis XIV", explique Mme Haïm.Aussi, pour les besoins de la noce, certains changements sont nécessaires: dans la version vénitienne, la voix de Xerse était interprétée par un castrat. Inconcevable de représenter un roi avec une telle voix, une basse la remplacera.
Un événement "Renaissance"
L'idée de faire renaître de ses cendres cet opéra est également liée à "Renaissance", thème d'une série d'événements culturels dans la capitale des Flandres du 26 septembre au 17 janvier.Mais pour ressusciter cette oeuvre, la direction musicale a dû faire face à de nombreux écueils, parmi lesquels le manuscrit, "datant de 1694, donc nettement postérieur à sa première représentation, comportant beaucoup d'inexactitudes".
"On s'est ainsi lancé dans une aventure passionnante et on a dû faire un authentique travail de recréation à tout point de vue, dans la distribution des chanteurs, le diapason, les instruments utilisés, les morceaux manquants", explique Mme Haïm.
Les représentations de "Xerse" auront lieu du 2 au 10 octobre à Lille, le 18 octobre à Vienne (Autriche) et les 10 et 12 janvier 2016 à Caen.
