Trois personnes comparaissaient à partir de mercredi 10 juin devant le tribunal d'Amiens. Ils sont soupçonnés d'avoir forcé la main à plusieurs centaines de personnes pour vendre des matelas. La justice reproche également à ces commerçants itinérants d'avoir blanchi l'argent des ventes.
Dans de nombreux cas, le procédé était similaire : après avoir frappé à la porte, échangé quelques mots, les vendeurs pénètrent jusque dans la chambre, jettent le matelas présent dans la foulée, en installent un nouveau, puis demandent au propriétaire de le régler sur le champ. Cette méthode de vente expéditive est au coeur du procès qui s’est ouvert à Amiens ce mercredi 10 juin.
151 plaignants
Les prévenus, deux parents et leur fille, sont poursuivis pour escroquerie, blanchiment d'argent, association de malfaiteurs et fraude fiscale. Des opérations au préjudice de 151 plaignants qui leur ont permis, au cours des années, de se constituer un patrimoine de deux millions d’euros. En 2015, alors qu'ils résidaient à Gauchy, dans l'Aisne, ils ont été arrêtés après qu'un homme de 84 ans s'est plaint du passage de deux "agents de préfecture" venus changer son matelas.
La famille, issue de la communauté des gens du voyage, allait jusqu’à prétendre, dans certains cas, que l'ancienne litterie était composée d’amiante, tandis que leurs produits étaient homologués par la Nasa. "C’est un véritable bulldozer, affirme Stanislas de la Royere, avocat des parties civiles, à propos du père de famille. Bulldozer vis-à-vis du tribunal, bulldozer vis-à-vis à du procureur. On peut imaginer quelle était son attitude lorsqu’il mettait le pied dans la porte et qu’il imposait ses conditions de vente à des gens pour certains extrêmement vulnérables."
"Une vie de travail"
L’enquête ne s’arrête pas là. Elle s’intéresse au train de vie de la famille, qui ne déclarait que des faibles revenus et touchait même les allocations familiales. Des terrains, des véhicules, des caravanes et même un coffre-fort contenant plus de 1,3 millions d’euros ont pourtant été mis au jour. "L’économie d’une vie de travail" pour Paul-Henri Delarue, avocat des prévenus, qui estime que ses clients sont "victimes de manière disproportionnée de l’institution judiciaire".
Il n’a jamais contesté qu’il n’avait pas déclaré une grande partie de ses ressources, du fruit d’une activité qui était extrêmement prenante et qu’il a consacrée exclusivement à la sauvegarde des intérêts d’un de ses enfants, qui est lourdement handicapé.
Mercredi, le procureur de la République a requis trois ans de prison dont un an ferme à l’encontre du père de famille, ainsi que des amendes de 15.000 et 5.000 euros pour sa femme et sa fille. Après la plaidoirie de leur avocat le lendemain matin, le jugement a été mis en délibéré au 2 juillet.