Après 58 ans d'existence, ce fleuriste emblématique d'Amiens fermera le 31 décembre : "on a suivi la clientèle, on était les confidents d'une vie"

Le fleuriste Alain Décoration situé sur la place Gambetta d'Amiens ferme définitivement ses portes le 31 décembre après un refus de renouvellement de leur bail. Ouvert il y a 58 ans, ce commerce a vu passer plusieurs générations de clients et de familles, les accompagnant dans les évènements heureux et malheureux de leur vie.

Le fleuriste amiénois Alain Décoration ferme définitivement ses portes le 31 décembre 2023. En cause : le refus du bailleur de renouveler le bail de ce commerce historique de la place Gambetta.

"Il y a eu un refus du bailleur, tout simplement, avec naturellement une indemnité d'éviction", confirme Alain Bourbal, le propriétaire. La procédure est toujours en cours, "mais ce qui est sûr, c'est que le magasin ferme dimanche". Il leur restera ensuite une semaine pour ranger et rendre les clés.

Une affaire de famille

Alain a pu compter sur son épouse, Patricia, pour tenir ce magasin de fleurs, en compagnie de leur fils, Justin. "Au départ, c'était ma mère qui le tenait, c'est une affaire familiale", précise-t-il. Celle-ci avait un magasin fleuriste en 1965 à Amiens et a repris les locaux actuels "en 1973-1974", qui appartenaient auparavant à un pâtissier.

"Ma mère est restée jusque dans les années 2000, aidée par mon épouse qui a ensuite tenu l'affaire jusqu'à maintenant. Ma mère me disait 'ce magasin est vu de partout, c'est un emplacement en or'. Il est vu de la cathédrale, de la rue de la République...", se rappelle Alain.

La famille l'a pris de façon "brutale" le non-renouvellement du bail, même s'ils s'y attendaient. "Je pense aux clients qui sont complètement dépaysés, parce qu'on a trois générations : on a eu les parents, les enfants, les grands-parents". Le magasin a suivi de nombreuses trajectoires de vie, de la naissance au deuil, et fait partie intégrante de la vie de beaucoup d'Amiénoises et Amiénois. "Ils sont surpris, ils ne s'attendaient pas à ce qu'on ferme aussi rapidement".

D'ailleurs, depuis l'annonce de la fermeture, "c'est presque un défilé continu parce que ça se dit vite". Ils n'hésitent pas à apporter leur soutien. "Ils disent  'ce n'est pas possible, mais qu'est-ce qu'on va faire ?Qu'est-ce qu'on va devenir ?'". Bien qu'il soit touché, Alain préfère rester pragmatique : "il y a d'autres fleuristes à Amiens, on n'est pas irremplaçables !".

Un lieu chargé de souvenirs

Alain et sa femme gardent d'importants souvenirs de ce lieu. Mais ce qui les a le plus marqués, ce sont les clients. "On était connu par les institutions, les administrations, la préfète venait voir ma mère, mon épouse. On a suivi la clientèle, on était les confidents d'une vie : on voyait les parents se marier, après ils avaient leurs enfants". Aux évènements heureux se sont aussi ajoutés des moments plus malheureux, comme les décès.

"C'est ça qui était notre bonheur, d'avoir ce partage, de nous faire confiance en participant à des évènements, parfois tragiques certes, et de faire partie de la vie des Amiénois. C'est ça tout le bonheur : de pouvoir aider comme on pouvait", détaille Alain Bourbal.

Le dernier jour, c’est dimanche soir. On avait pensé à inviter quelques personnes. Il nous reste à peu près 8 jours pour nettoyer le magasin, les clés seront rendues dans 6-7 jours. Mais on ne sait pas trop ce qu’on veut faire, on n’a pas le cœur à ça.

Alain Bourbal

En somme, jusqu'à la fin, Alain Décoration a été "un magasin qui travaillait bien, c'est ça qui est aussi un peu triste, ce n'est pas un magasin qui était en déconfiture". C'est donc une page de vie qui se ferme, mais une autre qui s'ouvre pour Patricia Bourbal qui, à l'âge de 65 ans, prendra sa retraite : "elle n'a jamais compté ses heures", résume son mari qui, de son côté, poursuivra sa profession de libraire en livres anciens.

Quant à leur fils, "il va aller de l'avant, il a 42 ans. Il a aidé sa mère pendant 20 ans dans le magasin, il était salarié, il était même plus que ça, c'était le bras droit". Alain souhaite aussi rendre hommage à tous les employés qui ont travaillé au sein du magasin, pour certains pendant plus de 30 ans. "La plupart sont partis" depuis.

Il souligne également qu'il ne reste "plus beaucoup de vieilles maisons" sur la place Gambetta : "il reste Jean Trogneux, Lafarge, Martel, le Gambetta, qui est un café de père en fils, un des premiers de la place", conclut-il avant d'ajouter qu'une "transformation s'est opérée" sur la place Gambetta.

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