À l'occasion de la Toussaint, nombreuses sont les familles réunies dans les allées du cimetière de la Madeleine, la plus grande et la plus verte des nécropoles amiénoises. La fête des saints est pour eux synonyme de retrouvailles, de dialogue et de bons souvenirs à se remémorer.
Le cimetière de la Madeleine arbore ses plus belles couleurs ce 1er novembre. En ce matin de Toussaint, les rayons du soleil viennent réchauffer les vallons du plus grand cimetière d'Amiens et les premiers visiteurs qui déambulent dans ses allées, les bras chargés de fleurs.
Sous les arbres, les tombes modernes cohabitent avec de vénérables caveaux ouvragés parfois envahis de mousse. Munie d'un couteau, Nicole, bientôt 88 ans, s'affaire à gratter la végétation sur une sépulture sur laquelle est adossée sa canne.
"Avec mon genou, mon mari m'avait prévenue de ne pas monter là et de laisser tout le monde dormir tranquille ! Mais je n'ai pas tenu compte de son avertissement : ça fait quand même un an que je ne suis pas venue voir les miens," s'exclame cette dame pleine d'énergie, dont l'époux, presque centenaire, n'est malheureusement plus en capacité de se déplacer.
Je fais ça par respect vis-à-vis de ma belle-mère et de ma belle-sœur : ce sont des gens qui ont été très gentils avec moi. Et ça reste, tout ça.
Nicolevenue voir sa belle-famille au cimetière de la Madeleine
Dialogue d'outre-tombe
Au détour d'une allée, on croise Valérie et Jean-Luc, bouquets de chrysanthèmes jaunes dans les mains. "On vient fleurir les tombes de nos parents et celle d'une dame qui était une amie de ma grand-mère. Elle n'a malheureusement plus de famille aujourd'hui, donc on la fleurit tous les ans," confie Valérie, qui vient plusieurs fois dans l'année nettoyer les sépultures. "Et aussi beaucoup pour me ressourcer. Et pour leur parler un peu," ajoute-t-elle.
"On leur raconte des petites anecdotes", glisse Laurence, accompagnée de sa sœur Sylvie. "On discute avec eux, même s'ils sont plus là," acquiesce cette dernière. Chaque Toussaint, les deux Amiénoises réalisent une tournée des cimetières pour aller rendre visite à leurs proches, répartis entre la Madeleine, Saint-Pierre et le Petit-Saint-Jean.
Se retrouver en famille
Sur un flanc de colline exposé au soleil, les stèles ont disparu au profit de petites plaques, de statuettes et de bouquets posés à même le sol. Dans ce jardin du souvenir multicolore reposent, dans une urne ou dispersées, les cendres de ceux qui ont choisi d'être incinérés.
Florence, Bernadette et Isabelle se retrouvent ici chaque année au pied du même grand arbre. C'est ici que leur grand-mère, décédée il y a douze ans, a fait le choix de répandre ses cendres. "C'est, je trouve, plus vivant et plus agréable. Un arbre, ça représente la vie, on se dit qu'elle est encore là, quelque part, au milieu de la nature," songe Bernadette.
La Toussaint est pour ces trois sœurs, aujourd'hui dispersées entre Amiens, Troyes et Aix-en-Provence, l'occasion de se retrouver. "On se réunit occasionnellement et ça n'empêche pas qu'on pense régulièrement à nos défunts," considère Florence, la provençale d'adoption.
C'est important pour nous que la famille se rassemble aussi pour des moments comme ça. parce que ça nous permet de repenser à de beaux souvenirs et de les faire revivre une fois de plus.
FlorenceVenue voir sa grand-mère au cimetière de la Madeleine
Célébrer la Toussaint, ce n'est finalement pas si triste.