Depuis le 15 juin, les personnels de santé de Philippe Pinel à Amiens sont en grève. Deux mois d'un bras de fer avec leur direction et l'Agence Régionale de Santé. Un bras de fer qui s'est durci le 14 juillet après l'expulsion des grévistes des locaux de l'ARS. Depuis, ils campent devant l'hôpital.
La quinzaine de tentes déployées devant les grilles de l'hôpital Philippe Pinel à Amiens commencent à accuser le coup. Elles sont plantées là depuis aujourd'hui 33 nuits. 33 nuits et 63 jours de grève pour les personnels. Médecins, infirmiers, aide-soignants...Ils se relayent pour qu'une présence sur site soit assurée 24 heures sur 24.
Les gens s'arrêtent
Sous la plus grande tente, des tables, des chaises, des thermos de café, des prunes et des gâteaux...L'Assemblée générale hebdomadaire vient de se terminer. "Normalement, c'est tous les mercredis, explique Emilie Seguin, infirmière. Mais hier, c'était férié. Alors on l'a décalée à aujourd'hui". Comme tous, elle porte sa blouse de travail...customisée !
On sent la bonne humeur dans ce petit groupe d'une dizaine de personnes. Et certainement pas la fatigue. Et encore moins le découragement. "On ne sent pas le mouvement faiblir, confirme la jeune femme. On tient le coup. Il faut dire qu'on est bien soutenus". Pour preuve les coups de klaxons des automobilistes qui empruntent le rond-point. "Souvent des gens s'arrêtent pour prendre de nos nouvelles, raconte Emmanuel, infirmier depuis 22 ans à Pinel.
Presque tous les matins, on a des croissants. Pendant la canicule, un monsieur venait tous les soirs nous apporter des bouteilles d'eau bien fraîches. On sent le soutien des gens. Ca fait du bien !"
Une cagnotte a été mise en place pour aider les grévistes.
Soutien des collègues du Havre, de St-Etienne du Rouvray et d'ailleurs
Et il n'y a pas que les particuliers qui affichent leur soutien. Des collègues d'autres hôpitaux psychiatriques, en grève ou non, sont venus rencontrer les grévistes de Pinel.
Depuis le 15 juin, environ 20% du personnel de l'établissement psychiatrique sont en grève. Et depuis l'expulsion des locaux de l'ARS mi-juillet, ils campent devant les grilles de l'hôpital. Ils assurent des tours de garde. "C'est un peu calqué sur notre organisation de travail. Il y a une équipe du matin, une équipe de jour et une équipe de nuit !
La nuit, on est au minimum 5. Mais on a été jusqu'à 12, compte Emmanuel.
Grévistes au travail
Et entre deux, ils vont travailler, réquisitionnés pour certains par la Direction. "On se plaint de ne pas être assez, ce n'est pas pour laisser nos collègues dans des conditions pires, justifie Emilie. Alors on va bosser tout en se déclarant gréviste. On vient aussi sur nos heures de repos et nos congés".
Le mouvement est parti spontanément parmi les agents hospitaliers. La plupart n'est pas syndiquée. "Évidemment, les syndicats nous ont aidé pour la logistique et pour le préavis de grève, reconnaît-on sur place. Mais leur intervention s'arrête là".
Et depuis 2 mois, leurs revendication n'ont pas changé. Pas de hausse de salaire, ni de prime. Juste plus de personnel pour de meilleures conditions de travail et une prise en charge plus humaine des patients. "Dans mon service, nous sommes deux pour 25 patients. Parmi eux, certains ont besoin de se retrouver dans l'une des deux chambres d'isolement, explique Emmanuel. Ces patients-là demandent beaucoup de temps de prise en charge. Et pour s'en occuper, on doit être deux.
Pendant ce temps, les autres patients sont livrés à eux-mêmes.
12 fins de CDD
La Direction a bien annoncé le recrutement de 10 infirmiers. Un recrutement lancé fin juillet et qui, selon les grévistes, fait suite à la fin de 12 contrats à durée déterminée : "ça ne compense pas. Ce que l'on veut pour le moment, c'est une table ronde avec la direction, l'ARS, les représentants du personnel et les représentants de notre collectif. Mais la direction reste silencieuse à cette demande".
Il n'y a plus de café. Il va falloir en refaire pour cette nuit. La 34ème sous la tente pour les personnels de l'hôpital Philippe Pinel à Amiens.