L'inquiétude des médecins face à l'annulation de prises de rendez-vous liée au reconfinement

"#SoignezVous". À travers ce mot-clé, des professionnels de santé alertent dans une tribune publiée sur Doctolib, sur les risques encourus lorsque les patients renoncent aux soins en période de confinement. Tour d'horizon de la situation avec des professionnels picards.

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Lors du premier confinement, un patient sur trois a renoncé aux soins ou les a reportés, par crainte de la Covid-19.

Avec le reconfinement, les professionnels de santé craignent que le phénomène ne se reproduise.  "Le nombre d'annulations de rendez-vous a augmenté de 30%" annoncent-ils dans une tribune publiée sur Doctolib, un site qui permet de prendre rendez-vous en ligne avec un praticien. 

Face à cette hausse, les quelques 10 000 praticiens signataires de cette tribune rappellent que les reports de diagnostics ou de prise de traitement peuvent avoir des effets critiques sur la santé, avec une aggravation ou la non-détection des maladies.

"On est obligé de travailler à l'aveugle"


"On a des reports de rendez-vous. Il y a des gens qui n'osent plus venir au cabinet. Les gens sont terrorisés" constate Lydia Bertrand, médecin à Amiens et présidente du syndicat des médecins libéraux. 

"Pour les mois de février, mars, avril, mai, ça a été complètement déréglé avec une baisse jusque 60% d'activité en une journée parce qu'on passait son temps à répondre et à tranquilliser les gens au téléphone" se souvient le Dr Georges Jung, médecin généraliste à Compiègne. 

Dans ce reconfinement, ce n'est pas une baisse de fréquentation qui inquiète les professionnels de santé mais bien ce dérèglement qui persiste, insiste le Dr Jung. 
"C'est surtout le décalage. Les patients ne vont pas faire leurs examens prescrits, même des radios ou des prises de sang. Ils annulent en disant 'on verra bien quand tout sera calmé'. Ils diffèrent tout et ça, c'est un problème aussi important que d'être contaminé. Il arrive un moment où c'est certain qu'ils prennent des risques. Autant dans mon activité personnelle, ça n'a plus rien à voir avec il y a 6 mois, mais autant le décalage qui avait déjà existé à la même période pour l'accès à d'autres spécialités est énorme, avec des renoncements qui sont dramatiques. Il y a des diabétiques par exemple, qui n'ont pas eu leur bilan de sang depuis 4 mois, 6 mois, certains depuis le mois de janvier. Il n'y a plus rien qui est fait. Je vois des patients actuellement avec des ordonnances. Ils devaient faire leur prise de sang avant de revenir me voir, ils reviennent sans avoir fait la prise de sang. On travaille mal, on est obligé de travailler à l'aveugle. Plus les patients sont espacés dans leur rendez-vous, plus ils ont tendance à arrêter leur traitement".
 

"Renoncer aux soins, c'est prendre un risque"


"Renoncer à consulter son professionnel de santé", c'est non seulement "prendre un risque" insistent les soignants dans la tribune, mais c'est aussi "devoir recourir à l'hôpital, déjà surchargé". 

Le CHU d'Amiens se veut rassurant. Il s'est organisé pour recevoir des patients atteints de la Covid-19, mais il continue de soigner les autres.
Pour autant, beaucoup pourraient éviter d'en arriver là comme l'explique le Dr Laure Domisse, chef de service des urgences adultes.
"Par exemple, je suis à la maison, je suis confinée. J'ai mal au ventre. J'ai des médicaments, je me débrouille et ça passe. Puis ça revient. Je n'appelle pas mon médecin qui peut me recevoir. J'ai peur d'aller au laboratoire alors que je peux faire une radio. J'ai trop mal. Ce n'est plus une opération simple mais une péritonite". 

Dans un communiqué publié le 2 novembre, les Ordres des médecins, des sages-femmes, des infirmiers, des chirurgiens-dentistes, des pharmaciens, des masseurs-kinésithérapeutes et des pédicures-podologues alertaient déjà sur ces risques et soulignent que contrairement à la première vague épidémique, "les cabinets et les officines restent ouverts" et "assurent les soins",  sur place, à distance ou à domicile, "dans des conditions optimales de sécurité sanitaire" soulignent les Ordres de santé dans un communiqué publié le 2 novembre. Ils rappellent que "la consultation, les examens et soins médicaux font partie des motifs de sorties autorisées", figurant sur l'attestation de déplacement dérogatoire. 
Prise en charge à 100% par l’Assurance maladie, la consultation vidéo est utile, précisent les médecins dans leur tribune, “pour un premier diagnostic, un renouvellement d’ordonnance, l’explication de résultats d’analyse ou encore pour écouter votre situation globale et psychologique”.


"Il y a moins de risques médicaux dans les cabinets"
 

"J'essaie de positiver mais on a besoin que les autorités disent aux gens de ne pas hésiter à venir chez les médecins, reconnaît le Dr Lydia Bertrand, on met tout en oeuvre pour qu'il n'y ait pas de contaminations. On demande juste de venir avec des précautions, comme de ne venir qu'à un parent pour accompagner un enfant et de respecter les règles d'hygiène sans oublier de se changer en rentrant de la consultation".

"Il y a beaucoup moins de risques médicaux dans les cabinets", 
confirme le Dr Jung, qui pose des limites à la télémédecine. "Un examen clinique ne se fait pas comme ça. Sur un bouton on peut faire un diagnostic, sur une photo d’accord mais on ne peut pas tout faire en télémédecine. Il y a des moments, il faut pouvoir se voir en face à face. Il faut pouvoir palper un ventre, il faut pouvoir ausculter vraiment un poumon et non pas faire à l’intuition". 

En cette saison, plus que jamais, les professionnels de santé rappellent également l'importance de la vaccination non seulement de la grippe mais aussi pour toutes les maladies infantiles. S'il s'adresse principalement aux personnes à risques, ce message concerne tout le monde.
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