"L'ambiance est pesante, mais il faut garder espoir" : la mobilisation continue chez Metex, l'usine d'Amiens nord dans l'attente d'un repreneur

Placée en redressement judiciaire le 20 mars, l'usine Metex Noovistago à Amiens nord traverse une période d'incertitude. Salariés et direction espèrent voir arriver une offre de reprise solide pour pouvoir continuer l'activité et sauver les 280 emplois du site.

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Des dizaines de personnes, munies de leurs drapeaux et de leurs gilets orange siglés CFDT, se sont rassemblées ce vendredi 12 avril devant l'usine Metex Noovistago, à Amiens nord. Elles sont venues de la Somme et de l'Oise pour soutenir les quelque 280 salariés de l'usine qui produit de la lysine, un acide aminé utilisé pour l'alimentation animale. La date n'est pas choisie au hasard : l'usine ferme pour 15 jours à compter de ce jour. Une fermeture "prévue de longue date", rassure la direction, pour des opérations de maintenance obligatoires, qui se tiennent tous les trois ans.

Dans l'attente d'un repreneur

Mais la situation financière de l'entreprise, placée en redressement judiciaire le 20 mars dernier, laisse planer un doute chez certains salariés, qui craignent de ne pas voir leur usine rouvrir comme prévu le 26 avril. "Aujourd'hui, c'est très dur, il y a toujours la crainte que l'entreprise ne redémarre pas, confie une élue du CSE. Tant qu'il n'y a pas un document signé de la part d'un repreneur, on est toujours dans le doute." La reprise, c'est le mot qui est sur toutes les lèvres chez Metex en ce moment. Les investisseurs intéressés ont jusqu'au 6 mai pour déposer leur offre auprès des administrateurs judiciaires. Pour le moment, deux offres seraient sur la table. Un potentiel repreneur aurait également visité le site ce jeudi 11 avril.

Mais chacun sait ici que l'avenir de l'usine est avant tout conditionné par le prix du sucre, matière première principale de la production de lysine, qui a beaucoup augmenté en peu de temps. Cette augmentation est l'une des principales causes des difficultés financières rencontrées par l'entreprise. C'est en ce sens que la CFDT, comme la direction du groupe, fait appel à l'État. Le ministre de l'Industrie Roland Lescure leur a d'ailleurs rendu visite le 8 avril.

Des "négociations en cours" entre l'État et les sucriers

"Le dossier est aux mains de l'État, car sans un prix compétitif du sucre, le repreneur ne pourra rien faire, explique Samir Benyahya, délégué CFDT chez Metex Noovistago. Le ministre a assuré qu'il y avait des discussions sérieuses en cours avec les sucriers, donc j'ai envie de croire ce qu'il nous a dit. J'ai appris d'ailleurs qu'il serait en visite dans la région lundi prochain, donc on ira lui faire un petit coucou, lui rappeler que la situation est urgente et qu'il est temps de donner des réponses."

Ça fait deux ans que les salariés vivent dans l'angoisse, dans l'inquiétude, il y en a beaucoup qui commencent à fatiguer. Il y a des gens en arrêt maladie, d'autres qui ont démissionné.

Samir Benhyahya, délégué CFDT chez Metex Noovistago

Marylise Léon, secrétaire générale de la CFDT, le syndicat majoritaire chez Metex Noovistago, a fait le déplacement. "C'est une belle usine, une installation extrêmement importante, les volumes sont gigantesques. C'est un bel outil industriel, c'est important de pouvoir maintenir ces compétences et ces savoir-faire, déclare-t-elle. C'est aussi un enjeu pour l'État de souveraineté, puisque c'est la seule usine qui produit cet acide aminé en Europe."

Avec cette nouvelle journée de mobilisation, le syndicat veut apporter un peu de soutien aux salariés qui vivent dans l'incertitude depuis plusieurs mois. "Ça fait deux ans que les salariés vivent dans l'angoisse, dans l'inquiétude, il y en a beaucoup qui commencent à fatiguer, constate Samir Benhyahya. Il y a des gens en arrêt maladie, d'autres qui ont démissionné. L'ambiance est très pesante, mais il faut garder espoir."

"Nous nous battons pour l'emploi, pour l'outil industriel"

Quelques semaines plus tôt, juste avant le placement officiel en redressement judiciaire, il soulignait toutefois que la direction et les salariés partageaient le même objectif, "sauver la boîte". Aujourd'hui, Rudolph Hidalgo, le directeur général à la transition de Metex assure lui aussi que le rassemblement est "à l'image de la mobilisation que la direction et l'ensemble des syndicats mettent au service de la résolution du problème".

Il se veut rassurant, et promet que l'activité reprendra comme prévu le 26 avril, même si les prix du sucre n'évoluent pas dans l'intervalle. "On a déjà en stock du sucre qu'on avait acheté avant, et sur lequel on travaille, donc la production des semaines à venir n'est pas le sujet. Le sujet, c'est de passer la fin du mois de juin, et d'ici là, on aura déjà avancé avec les offres qui seront sur la table en mai, et on saura comment on traverse l'été", assure-t-il. 

Il espère lui aussi que les négociations sur le prix du sucre aboutiront. Il affirme par ailleurs qu'une "réflexion" est lancée au niveau européen sur le "dumping", une forme de concurrence déloyale, qui est un autre enjeu essentiel pour l'entreprise.

Depuis quelque temps, les producteurs chinois inondent le marché européen avec leur lysine moins chère, mais avec un impact beaucoup plus élevé sur l'environnement. "Nous savons qu'une réflexion est en cours au niveau européen, il y a eu une prise de conscience, et la prise de conscience, c'est la première étape nécessaire pour arriver à une réflexion sur une éventuelle protection des frontières sur ce marché." Enfin, il souhaite adresser "un message d'optimisme et de mobilisation" aux salariés. "Nous nous battons pour les emplois, pour l'outil industriel, et pour la souveraineté alimentaire française", assure-t-il. 

Avec Claire-Marine Selles / FTV

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