Le retour de la momie au musée de Picardie après un an de restauration

C’est le retour de l’une des pièces les plus emblématiques du musée de Picardie et à la fois une des plus anciennes. Après un an d’absence, la momie Setjaïmengaou va retrouver sa place définitive avec ses deux sarcophages au musée de Picardie le 11 février 2023.

Partis en février 2022, la momie Setjaïmengaou et ses deux coffres sont de retour à Amiens. La vieille dame de plus de 2 600 ans avait quitté le musée de Picardie il y a un an pour bénéficier d'un check up complet et par la même occasion d'un examen approfondi.

Pour ce faire, la fragilité des éléments a poussé l'équipe du musée à les envoyer au centre de recherche et de restauration des musées de France (C2RMF) à Versailles. La momie n'avait pas été déplacée depuis 1994, date à laquelle elle avait été radiographiée au CHU d'Amiens. Une étape délicate pour l'équipe du musée qui doit anticiper la manœuvre et s'entourer de toutes les précautions au cours des déplacements.

À Versailles, la momie va y rester un an. Le temps de la dépoussiérer et de lui refaire une beauté. Il n'est pas question de la rendre neuve, mais de la préserver en l'état pour ralentir la décomposition et lui permettre de traverser encore de nombreuses années derrière sa vitrine.

Ses cercueils (interne et externe) aussi sont passés au crible. On ne sait toujours pas si les deux coffres sont liés à la momie et si le sarcophage lui correspond. Comme c'est lui qui porte le nom de la personne décédée, si c'est bien le sien, son nom est Setjaimengaou, fille d'Horsaiset et de Taânetenpamer.

Ce que l'on sait

La momie avait été acquise par la Société des antiquaires de Picardie en 1839 avant l'ouverture du musée. L'ensemble funéraire de Setjaïmengaou daterait de la XXVe-XXVIe dynastie (vers 664 av JC). Sa provenance est inconnue, mais serait probablement la nécropole thébaine. D'après les radiographies pratiquées en 1994, on sait aussi que Setjaïmengaou est une femme. Elle serait morte autour de ses 40 ans et aurait eu plusieurs enfants.

Trente ans plus tard, la momie est repassée entre les mains du professeur Jean-Marc Constans, du service de chirurgie maxillo-faciale de Bernard Duvauchelle pour un nouveau scanner. La restauration a permis de poser de nouvelles questions auxquelles l'équipe de médecins espère pouvoir répondre. Sa grande taille, par exemple, a été remise en cause. Celle donnée à l'époque était d'1m74. Les nouvelles analyses effectuées en janvier dernier ont mis en évidence une rupture de la colonne cervicale et dorsale, ce qui a pu élargir de façon artificielle la taille globale. Elle serait donc plus près d'1m50, ce qui correspond à la taille moyenne de l'époque.

Des secrets de la momie révélés

L'objectif est à la fois de documenter l'histoire de la femme Setjaïmengaou, mais aussi l'histoire de la momie dans ses techniques d'embaumement. "On a eu au C2RMF des analyses pour comprendre quelles sont les matières utilisées, note Agathe Jagerschmidt, conservatrice des collections archéologiques du Musée de Picardie. Aujourd'hui, en entrant à l'intérieur de la personne, on va pouvoir comprendre quelles techniques les embaumeurs ont utilisé pour redonner du volume à ce corps. Est-ce qu'ils ont placé des viscères momifiés dans le corps ou plutôt des linges".

Matière organique noire, yeux factices ou encore fibres textiles ont été examinés, même les insectes trouvés dans les bandelettes vont permettre d'en apprendre davantage sur la saisonnalité de la momification : "Je n'anticipais pas du tout ce qu'on peut faire avec cette machine, observe Agathe Jagerschmidt. On vient de comprendre qu'elle avait une carie de son vivant. Des toutes petites choses, mais qui réécrivent la vie de cette personne et qui nous rappellent que c'est une personne".

Tapis rouge pour une momie

Setjaïmengaou et ses coffres ont retrouvé les salles du musée. "La présentation n'est plus la même, remarque la conservatrice. Elle n'a plus toutes ses poussières, la tête est repositionnée, les deux yeux sont dans le bon sens". 

La momie sera officiellement présentée au public samedi 11 février 2023. Pour célébrer l'événement, des temps forts seront organisés tout le week-end, avec des ateliers et des animations autour de la momification et des hiéroglyphes. Une exposition présentera les résultats des études à travers des planches de bande dessinée.