A l'occasion de la Journée internationale des étudiants, la Fédération des associations étudiantes picardes a organisé, jeudi 17 novembre, une distribution de sacs de denrées de première nécessité sans condition de ressources. La longue file d'attente devant l'épicerie AGORAé à Amiens témoigne de leur précarité croissante.
Ce jeudi 17 novembre, plusieurs dizaines d'étudiants attendent patiemment leur tour sur le trottoir devant l'épicerie AGORAé, rue des francs mûriers à Amiens. Cette échoppe a été créée en 2015 dans un objectif de lutter contre la précarité et l'isolement.
S'ils devaient payer leur sac de première nécessité, ils débourseraient une douzaine d'euros. Mais dans le contexte économique difficile, marqué par une inflation de 6,2 % en un an, la gratuité devient nécessité.
"Je touche une bourse. Avec mon loyer, mes charges, je n'ai pas les moyens de me faire un plein de courses tous les mois. Du coup, ça aide beaucoup", témoigne un étudiant.
Chacun repart avec un sac en toile contenant des conserves, des yaourts, du lait ou encore du savon et des protections hygiéniques.
Une "action coup de poing"
La distribution, sans condition de ressources, est organisée par la Fédération des associations étudiantes picardes (Faep) à l'occasion de la Journée des étudiants. Une "action coup de poing" selon son porte-parole Maël Erman, qui rappelle qu'un étudiant sur deux ne mange pas à sa faim.
De nombreux étudiants doivent d'ailleurs travailler pour se nourrir, en acceptant parfois des horaires incompatibles avec leurs cours. Le rapport de l'Observatoire national de la vie étudiante sur leurs conditions de vie révèle justement que 48% d'entre eux estiment que leur activité rémunérée a des effets négatifs sur leurs études ou leur bien-être.
Mesures d'urgence et concertation nationale
Les étudiants en situation de précarité, même s'ils ne sont pas boursiers, peuvent bénéficier du "repas à 1€", un dispositif prolongé jusqu'à Noël : "Il ne faut pas qu'ils restent isolés, avec leurs difficultés : le message, c'est vraiment de s'adresser aux Crous qui peuvent proposer ce repas pour les étudiants boursiers, mais aussi pour tous les étudiants en précarité", a annoncé la ministre de l'Enseignement supérieur Sylvie Retailleau le 7 novembre sur Sud Radio.
D'autres mesures d'urgence ont déjà été prises avant l'été en faveur du pouvoir d’achat estudiantin, comme le gel des droits d’inscription universitaire et des loyers en résidence étudiante, la revalorisation des aides au logement (APL) ou encore une aide exceptionnelle de solidarité de 100 euros pour les bénéficiaires de bourses sur critères sociaux.
En réponse à la vidéo d'une étudiante en détresse, Sylvie Retailleau a reconnu début novembre que cette réponse d'urgence "ne [gommait] pas les problèmes de fond" et annoncé la mise en place d'une "concertation nationale et territoriale sur la vie étudiante".
Pas de grande réforme avant 2024
Toutefois, les représentants des étudiants ne voient qu'une augmentation pérenne des bourses pour sortir les plus précaires de cette situation et vont suivre de près la réforme de la ministre : "On sera présents au niveau institutionnel pour parler de la réforme des bourses, pour porter nos positions, réformer en profondeur ce système pour ne plus avoir à faire des distributions dans ce style-là. On espère que ça bougera, mais on attend pas la réforme avant au moins 2024", assure Maël Erman.
Une réforme essentielle comme le prouve le "succès" de la distribution à l'AGORAé : pour faire face à la demande, la Faep a dû piocher dans les stocks de l'épicerie pour fournir plus de 500 sacs.