Chez les chrétiens, le dimanche de Pâques célèbre la résurrection de Jésus Christ. Pour l'occasion, au cours de la vigile pascale, la veille, de plus en plus d'adultes se font baptiser. C'est le cas de Maxime Traullé et Sidonie Youlu qui ont trouvé "une paix intérieure" grâce à leur "chemin vers la foi".
Cette année, pour Pâques, environ cinquante adultes sont baptisés dans la nuit de samedi 8 à dimanche 9 avril pendant la vigile pascale dans les différentes églises de la Somme. Ils étaient 29 en 2022.
Alors, qu'est-ce qui explique ce rebond ? Nous sommes partis à la rencontre de Maxime et Sidonie, deux adultes qui se font baptiser ce week-end.
"Maxime, tu n'es pas baptisé donc on ne se verra plus une fois que je serai partie"
Maxime Traullé, 19 ans, est étudiant en licence de droit à l'Université de Picardie Jules Verne. Son chemin vers le christianisme a débuté à la suite de trois événements, "notamment la perte de deux personnes qui m'étaient proches et une rupture amoureuse". Mais c'est surtout son arrière-grand-mère qui a participé de ce déclic. "Elle m'a dit : Maxime, tu n'es pas baptisé donc on ne se verra plus une fois que je serai partie".
Il commence alors à lire la Bible, à s'intéresser à Dieu et à aller à la messe des étudiants tous les jeudis soir à l'église Saint-Leu. Pourtant, son chemin vers la foi n'a pas été tout tracé. "J'ai eu une période très darwinisme : pour moi, c'était des faits, la science avant tout, il fallait des preuves".
Un autre événement, en plus de la parole de son arrière-grand-mère, est aussi venu marquer sa vie. "Je me posais des questions par rapport à mes sentiments envers mon premier amour et on m'a conseillé de faire une prière, relate le jeune homme. Je me suis adressé à Dieu et je lui ai demandé si je devais tourner la page ou continuer dans cette voie-là".
Le lendemain matin, "et pendant toute la journée, j'avais une musique en tête : c'était 'Tourner la page'. Je ne connaissais pas du tout la musique et le soir, j'ai tapé les paroles sur Youtube, j'ai écouté la musique et ça a été lucide, limpide. Je me suis dit : Dieu est là, il m'a répondu, c'est à mon tour, je me dois de vivre pour lui".
Il y a eu une conjoncture d’événements qui ont fait que je me suis tourné vers Dieu. Et de fil en aiguille, je me suis retrouvé dans le chemin pour faire le baptême, l’eucharistie et la confirmation.
Maxime Traullé, étudiant en licence de droit à l'UPJV
Maxime souligne que son chemin vers la foi l'a beaucoup aidé "par rapport à mes relations avec les autres". Cet introverti de nature "avait beaucoup de mal avec tout ce qui est vie sociale, parler avec les autres, faire le premier pas". Mais il explique que la religion lui a permis "d'avoir cette écoute en plus, de pouvoir faire le premier pas, d'aider et aussi de ne pas se laisser déborder par les mauvais sentiments : la jalousie, la haine, la colère. Ça m'a apaisé". Aujourd'hui, il est fier de "vivre selon les principes du Christ".
Désormais, il s'investit beaucoup dans la vie de la paroisse. Il assiste à la messe des étudiants tous les jeudis, se rend aux processions et suit les enseignements prévus à l'aumônerie des étudiants. "C'est tout nouveau mais je me suis occupé de la sécurité pour le chemin de Croix. Après, je suis encore très jeune, très novice dans la vie catholique, je n'ai pas encore fait beaucoup de choses, j'essaie d'en faire au maximum", confie-t-il.
"J’étais pratiquante et j'assistais à la messe sans être baptisée"
De son côté, Sidonie Youlu, aide-soignante retraitée de 65 ans, a une toute autre histoire. Elle a toujours cru en Dieu depuis son plus jeune âge. "Je suis originaire du Congo Brazzaville et je suis venue à Amiens à 26 ans". À son arrivée, elle arrête de prier pendant un moment car étant évangéliste, elle ne trouvait pas d'église qui lui convenait.
Un jour, elle discute avec le pasteur qui la suivait au Congo Brazzaville. "Il m'a demandé pourquoi je ne priais pas alors que depuis mon plus jeune âge, j'étais active. Quand je lui ai dit qu'il y avait une église catholique en face de chez moi, il m'a dit d'y aller". Elle a alors franchi le pas et, tous les dimanches pendant 30 ans, elle s'y rendait pour la messe.
"J'étais pratiquante et j'assistais à la messe sans être baptisée", avoue-t-elle. Pourtant, la retraitée a fait baptiser ses quatre enfants. "En plus, j'ai un fils autiste, je croyais qu'il ne pouvait pas être baptisé. Il ne savait pas lire, je suis allée vers les prêtres pour leur demander et ils m'ont dit que c'était possible, que ça n'avait rien à voir avec le fait de savoir lire et écrire. Et ça s'est fait."
Alors, pourquoi pas elle ? Ce n'était "peut-être pas le bon moment, je n'avais peut-être pas reçu l'appel de Jésus". C'est seulement l'année dernière qu'elle a décidé de se lancer. "Mon chemin vers le baptême, c'est personnel, c'est intime. Je me suis dit que je venais à l'église, que j'étais retraitée, alors pourquoi ne pas le faire ?" Elle qui connait d'ailleurs tous les prêtres les a surpris "car ils pensaient que j'étais baptisée".
Je me dis que ce baptême est une réponse à un appel, il y a quelque chose de spirituel, quelque chose d’intime. Finalement, je ne peux pas expliquer ce qui m'y a mené.
Sidonie Youlu, aide-soignante retraitée
Durant sa préparation au baptême, "j'ai appris que j'étais dans la religion avec un pied dehors". Elle s'est aussi rendue compte que "c'était vraiment en phase avec ma personnalité, avec ce que je recherchais chez le Christ et je savais que j'étais vraiment chrétienne. Ça m'a rendu heureuse, ça m'a conforté dans ma vie de chrétienne et dans ma quête vers le Seigneur".
Son baptême lui procure "une joie" et une "paix intérieure", d'autant plus qu'à cause d'un événement personnel douloureux, elle a été contrainte de voyager et aurait pu le manquer à la dernière minute. "Les astres sont alignés", se réjouit-elle. Pour celle qui fréquente l'église catholique depuis 30 ans sans être baptisée, elle peut se permettre de souffler. "Je me dis : enfin !", conclut-elle.
"C'est un phénomène qui prend de l'ampleur"
La hausse du nombre de baptêmes d'adultes est "un fait global en France" et pas seulement dans la Somme, explique Monseigneur Gérard Le Stang, évêque d'Amiens. En 20 ans, "on est passé de 2000 baptêmes à Pâques à plus de 5000 en 2022", rien que pour les adultes.
Pour lui, l'explication va de soi : "c'est l'action de Dieu". Mais plus globalement, il constate "qu'on a maintenant des générations où les enfants ont été beaucoup moins baptisés, si bien que les gens deviennent chrétiens par la suite d'une conversion, d'une découverte de la foi chrétienne, des ressources du christianisme", analyse-t-il.
Il ajoute qu'il existe "une expérience de découverte qui est volontaire et libre". Les adultes intéressés par la question spirituelle "ont des ressources numériques, ils n'ont pas directement à venir frapper à la porte des presbytères ou d'une église. Ils font de nombreuses recherches qui les amènent vers l'Eglise catholique".
A Amiens, rien qu’à la cathédrale, il y a 14 baptêmes d’adultes cette année.
Mgr Gérard Le Stang
Les contextes politique, social, économique ou encore sanitaire jouent aussi beaucoup. "Aujourd'hui, quand vous regardez le développement des Chat GPT, de l'intelligence artificielle, vous vous dites : mais finalement, qu'est-ce qui est vrai, qu'est-ce qui est faux ?" A cela s'ajoute un "climat anxiogène et des inquiétudes sur l'avenir, en plus des introspections vécues par les personnes pendant la période Covid".
Pour lui, tous ces éléments "touchent leurs réflexions intimes sur le sens de la vie, l'espérance, l'avenir". Il constate également "une tentation de la violence chez les jeunes générations, mais il y a aussi cette tentation, cette attirance attirance vers la transcendance", conclut l'evèque.