Elbeuf-Lescouvé, un quartier du sud-ouest d'Amiens (Somme), a intégré début janvier 2024 la liste des quartiers prioritaires. Il pourra désormais bénéficier d'aides financières spécifiques. Les habitantes rencontrées souhaitent surtout que des actions soient mises en place pour améliorer la qualité de vie des enfants.
Elbeuf-Lescouvé a rejoint la liste des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). Ce quartier du sud-ouest d'Amiens devient ainsi le 10e quartier de la Somme à rejoindre ce dispositif. Dans l'Oise, Montupet et Jaurès-Gare-Gournay, à Creil, ont également intégré les QPV cette année.
Une enveloppe d'1,5 million d'euros par an
Si cette classification est un indicateur plutôt négatif, signe que la population s’appauvrit, c’est aussi une bonne nouvelle. Cela signifie que, depuis le 1er janvier 2024, ces quartiers peuvent bénéficier d’aides financières dans le secteur de l’éducation ou encore de l’insertion professionnelle. Les acteurs sociaux d'Elbeuf-Lescouvé vont bénéficier d’une enveloppe spécifique d'1,5 million d'euros par an, mise en place par Amiens Métropole.
"Il s'agit de pouvoir travailler avec ces structures qui sont déjà très actives [le centre social et les différentes associations du quartier, ndlr] pour redéployer des crédits si possible et permettre, soit d'avoir de nouvelles actions, soit de pouvoir faire bénéficier plus d'habitants des actions qui existent", explique Valérie Lambert, directrice habitat et politique de la Ville à Amiens métropole.
"Tout le monde a des problèmes pour se nourrir"
Le quartier Elbeuf-Lescouvé est composé majoritairement de logements sociaux. Les activités sportives et culturelles font défaut. Mais les habitants s'y sentent relativement en sécurité. Brigitte Riquier, retraitée, y habite depuis 22 ans.
Au début, quand on est arrivé, on se faisait insulter, il y avait des voitures brûlées, de la drogue… Mais depuis, c'est calme, il n'y a pas de problème, ça a vraiment changé.
Brigitte Riquier, habitante d'Elbeuf-Lescouvé depuis 22 ans
En ce glacial vendredi 12 janvier, comme presque tous les jours, Brigitte Riquier se rend au centre social du quartier. L'épicerie solidaire y assure une distribution alimentaire bimensuelle pour 50 familles. Elle est ouverte à tous, sans conditions de ressources, avec des produits à prix très bas. "On a de tout, on a aussi bien des personnes âgées que des familles très nombreuses. Tout le monde a des problèmes pour se nourrir. [...] On a beaucoup de demandes", observe Sandrine Veiller, bénévole à l'épicerie solidaire.
"Pas assez de sécurité pour les enfants"
Audrey Jeanne, mère de deux enfants, habite le quartier depuis 10 ans. Selon elle, ce placement en quartier prioritaire devrait être l'occasion "d'améliorer la vie pour les enfants". Une demande formulée par plusieurs personnes au centre social.
Même si Audrey Jeanne estime qu'"il y a beaucoup moins de risques qu'il y a cinq ans quand il y avait des deals", et qu'"il y a à peu près tout ce qui faut", la jeune femme considère qu'il n'y a "pas assez de sécurité pour les enfants au niveau des sorties des écoles" et regrette qu'il n'y ait pas d'espaces de jeux pour les enfants. "Ils ont tout enlevé il y a quelques années de ça et ils n'ont pas reconstruit depuis", se désole-t-elle.
"Il faut inclure les concernés dans les discussions"
L'intégration d'Elbeuf-Lescouvé dans le dispositif QPV donne donc de l'espoir aux habitants et au centre social. "Ça va permettre à d'autres structures qui n'interviennent que dans les quartiers prioritaires de se réimplanter. Je pense notamment au dispositif de réussite éducatif qui n'intervient que sur les quartiers prioritaires autour de la parentalité", pointe Mélissa Bronchart, directrice-adjointe du centre social.
Amiens Métropole assure vouloir "construire avec les habitants des actions supplémentaires". "On ne part pas de zéro, ce n'est pas un quartier qui était abandonné", souligne Valérie Lambert. Sur le terrain, les bénévoles espèrent que les actes suivront les promesses et surtout qu’ils seront adaptés aux besoins des résidents.
"Il faut que ça aille au bout, que ce ne soit pas que de la façade, mais que ce soit en lien avec les habitants et leurs besoins. Il faut aussi inclure les concernés dans les discussions", souligne un bénévole de l'association MDR (Mobilisation Dynamisme, Réussite) qui accompagne les jeunes issus de PQV d’Amiens.
La France compte désormais 1 362 quartiers prioritaires, dont 46 en Picardie. Le dispositif concerne cinq millions d'habitants en situation de précarité économique. En tout, 111 quartiers y ont fait leur entrée en 2024.
Avec Marie Roussel et Noémie Furling / FTV