Le ministère du Travail a autorisé le licenciement des salariés protégés (représentants syndicaux ou délégués du personnel) de l'usine Whirlpool d'Amiens, symbole des délocalisations industrielles, considérant que le motif économique est établi, a-t-on appris mardi 14 mai de sources concordantes.
La décision du ministère du Travail va à l'encontre de celle de l'inspection du travail, qui avait refusé à l'été 2018 leur licenciement, considérant que ce motif n'était pas avéré. Dans une lettre transmise à l'un des salariés concernés en date du 10 mai que l'AFP a consultée, la direction générale du Travail estime que "l'employeur démontre l'existence de menaces concrètes et tangibles pesant sur la compétitivité du groupe Whirpool (...) nécessitant une réorganisation de l'entreprise".
"Par conséquent, la cause économique alléguée à l'appui de la demande d'autorisation de licenciement est établie (...) Le licenciement de M. X est autorisé", ajoute-elle, faisant valoir entre autres que la part de marché mondial de Whirpool est passée de 17% en 2014 à 15% en 2016. Le directeur général du Travail, agissant "pour la ministre", prend en compte le secteur d'activité du groupe au niveau européen.
"On est tous consternés"
"De manière complètement hallucinante", la ministre du Travail Muriel Pénicaud "a considéré, et elle est bien la seule, qu'il y a un motif économique pour licencier les salariés protégés de Whirlpool à Amiens", a fustigé auprès de l'AFP Me Fiodor Rilov, avocat des ex-salariés. Selon lui, cette décision concernerait une trentaine de personnes. "On est tous totalement consternés", a-t-il ajouté, annonçant attaquer la décision devant le tribunal administratif."Whirlpool va réussir à se dédouaner grâce au gouvernement Macron", a déploré dans un communiqué transmis à l'AFP la CGT de l'usine. Contactés par téléphone, les représentants syndicaux affirment attendre le courrier officier avant de réagir à la nouvelle. Associés à la réindustrialisation du site dans l'accord signé, ils pourraient être laissés pour compte.
Un symbole de la délocalisation industrielle
L'usine qui employait 246 salariés a fermé le 31 mai 2018 et sa production a été délocalisée à Łódź en Pologne. La société WN du Picard Nicolas Decayeux a toutefois repris environ 160 salariés. Le groupe américain avait justifié la fermeture, annoncée en janvier 2017, au nom de "la sauvegarde de la compétitivité" dans un contexte "de plus en plus concurrentiel".La lutte des salariés, alors en grève, s'était invitée dans la campagne présidentielle 2017 avec une passe d'armes sur place entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen durant l'entre-deux-tours.