Les chiens sur la plage à Fort-Mahon, c’est fini ! En cet été 1976, la municipalité leur en interdit l’accès, au grand dam de leurs propriétaires. Mais ils savent se faire entendre, et vont même aller jusqu’à manifester. Morceaux choisis par une équipe de France 3 Picardie.
Eté 1976, levée de boucliers sur la digue de Fort-Mahon : les toutous sont bannis de la plage ! La mairie a pris cette décision suite à des accidents et des problèmes d’hygiène survenus l’année précédente, mais ça ne passe pas du tout auprès des "toutouristes". Les esprits s’échauffent, la résistance s’organise : manifestation, envoi de missives auprès de Monsieur le Maire. Même les chiens prennent la plume pour exprimer leur mécontentement !
Pour être tout à fait honnête, les toutous ont accès à la zone de bain en dehors des heures d’affluence : il faut juste se lever un peu plus tôt pour aller faire gambader Médor avant 9h, ou sacrifier l’apéritif du soir pour qu’il puisse se rafraichir les coussinets dans l’eau de mer après 19h. Il peut aussi s’ébrouer en journée sur une partie de la plage non surveillée.
Mais chez les estivants propriétaires de chiens, le sentiment d’injustice domine.
Je suis pour les chiens sur la plage… C’est la dictature complètement Franco, là !
Un vacancier très énervé
Le moins que l’on puisse dire, c’est que la présence des chiens sur la plage est un sujet clivant. Entre les adeptes du "jamais sans mon chien" et ceux pour qui la plage n’est dédiée qu’aux seuls humains, difficile de trouver un terrain d’entente.
On reproche aux premiers de laisser divaguer leurs animaux chéris, avec les risques qu’ils peuvent faire courir aux baigneurs. Le molosse pourrait bien être tenté de goûter la chair fraiche et dorée à point du vacancier alangui. Sans compter le chien-chien à sa mémère, si mignon, qui s’effarouche d’un lancer de ballon, et s’en venge en le déchiquetant rageusement.
On les accuse aussi de ne pas ramasser les déjections de leurs chers canidés, source de problèmes d’hygiène et de pollution. Une aire de baignade interdite d’accès en plein été, ça fait désordre. Pour le coup, il y a là de quoi mécontenter tout le monde !
Aux seconds on reproche leur ostracisme, leur égoïsme, et pire leur désamour du meilleur ami de l’homme. On les accuse de ne pas être plus propres que les chiens : dans leurs sillages, des mégots de cigarettes, des crachats, des pipis, des couches sales, des emballages plastiques, quand ce ne sont pas des bouteilles en verre.
Bref, les arguments sont affûtés de part et d’autre !
Mais dans ce genre de situation il y a un arbitre, c’est la commune à laquelle est rattachée la plage. Elle peut décider d’une interdiction totale ou partielle de la circulation des chiens sur la plage, en fonction de plusieurs critères : salubrité publique, affluence, revendications de la population, dangerosité, superficie de son espace balnéaire etc. Des amendes sont prévues, de l’ordre de 135 euros pour divagation, ou de 150 euros en cas de déjections canines non ramassées… De quoi réfléchir au modeste investissement de sacs à crottes !
Dans le cas de Fort-Mahon, cet été 76, Monsieur le Maire a reçu les protagonistes et se dit satisfait d’avoir su apaiser la grogne. Avec peut-être un seul regret, celui de n’avoir pu accueillir Brigitte Bardot... Aujourd’hui la commune peut d’ailleurs se targuer d’être devenue totalement toutou compatible, d’autant que depuis 2019 elle est nantie de son label Toutourisme.
Toutourisme, quezaco ?
Tout simplement, le label qui semble bien réconcilier tout le monde : lancé en 2007 par la ville de Troyes, son objectif est de faire cohabiter dans les meilleures conditions possible les toutous et leurs maîtres avec le reste de la population.
Dépliants informatifs et touristiques dédiés, sacs pour déjections canines mis à disposition, toutou bar à l’entrée des offices de tourisme sans oublier la petite friandise offerte au chien… Même les restaurants accueillent les canidés, gamelle d’eau offerte en prime !
Pour les plus de deux millions de français qui partent en vacances avec leurs chiens, comme pour les communes qui les accueillent, l’initiative a de quoi séduire. A toutous satisfaits, maîtres fidélisés ! Aujourd’hui, ce sont quarante villes en France qui ont décroché le label Toutourisme, dont six dans les Hauts-de-France.