"De grands feux rituels, des banquets, des combats" : la fête celte de Beltaine anime Samara pour célébrer le retour de la saison claire

C'est l'une des quatre fêtes celtes qui rythmaient le calendrier de nos ancêtres : Beltaine marque le retour de la lumière et du printemps. Près d'Amiens, le parc naturel et archéologique Samara célèbre ce moment tout le weekend avec de nombreuses animations. L'événement correspond aussi à la réouverture du parc après la pause hivernale.

Feux rituels, cueillette avec des druides, concerts d'instruments de l'âge du bronze, légendes, conférences et jeux de pistes : ce week-end, les traditions celtes sont célébrées au parc naturel et archéologique Samara à l'occasion des fêtes de Beltaine. 

Cet événement marquait le retour de la "saison claire", à mi-chemin entre les solstices d'hiver et d'été. Des rituels protecteurs étaient organisés pour commencer la période de l'allongement des jours, de la renaissance de la nature et donc, du retour de toutes les activités d'extérieur comme la chasse, l'agriculture ou encore la guerre.

La redécouverte des fêtes anciennes 

C'est en 1897 qu'un agriculteur de l'Ain trouve, par hasard, des fragments métalliques en bordure de son champ. Il s'agit en réalité d'une découverte archéologique à la valeur scientifique inestimable : "une grande table sur laquelle est noté le calendrier gaulois, indique Margot Lepage, chargée de communication du parc Samara. Ce calendrier mentionne les quatre grandes fêtes lunisolaires qui rythment l'année chez les Celtes."

Dont celle de Beltaine, placée sous le signe de la lumière et célébrée à l'époque autour du 1er mai. "Beltaine est encore célébrée aujourd'hui en Irlande, ajoute Margot Lepage. On y allume des grands feux comme le faisaient vraisemblablement les Gaulois. Ces feux symbolisent la lumière, mais sont aussi utilisés pour purifier le bétail avant la saison claire." Les animaux passaient à travers la fumée des feux pour être protégés contre les épidémies. 

Une tradition qui n'est pas sans rappeler les feux de la Saint-Jean, fête célébrée fin juin, autour de l'équinoxe d'été. À Samara, les feux ont été allumés à 10 heures ce samedi et seront entretenus jusqu'à la fin de la fête, à 18 heures, dimanche 21 avril.

"On ne fait pas de cérémonies autour du feu, mais de la médiation, on explique les traditions, légendes et à quoi servaient les feux de bel chez les Gaulois. On n'est pas dans la reconstitution folklorique, mais il y a de la médiation sous la forme de contes et d'activités" précise Margot Lepage. Des activités qui permettent de comprendre différents aspects de cette fête, car "Beltaine, à l'époque Gaulois, ce sont de grands feux rituels, des banquets rituels, des combats rituels". 

Contes et légendes celtes de Beltaine 

Les histoires que les celtes se racontaient au coin des feux de Beltaine n'étaient pas écrites, ce sont des traditions orales. Dans de nombreuses provinces, leur transmission a été interrompue par l'invasion des Romains puis la christianisation. Elles ne sont donc pas parvenues jusqu'à nous dans leur intégralité, mais des chercheurs ont réussi à en reconstituer certaines. 

Depuis l'aube des temps, le monde est équilibre entre une saison claire et sombre.

Romain Plichon

Chef du pôle médiation culturelle - Somme patrimoine

"Le folklore celtique a été largement conservé en Irlande, les premiers moines chrétiens ont posé à l'écrit avec des éléments christianisés, mais qui reprenaient dans la structure, l'histoire et l'étymologie, note Romain Plichon, chef du pôle de médiation culturelle de Somme patrimoine. Des historiens, archéologues ont travaillé sur ces légendes du VIe siècle et séparé ce qui était très ancien et ce qui découlait de la christianisation, en utilisant notamment des méthodes linguistiques." Des traces se retrouvent aussi dans les légendes de Bretagne. 

Ce travail permet de mieux comprendre la conception du monde qu'avaient les Celtes, la symbolique de ces grandes fêtes et l'histoire de leurs dieux. La fête de Beltaine est d'ailleurs le théâtre d'un affrontement entre deux divinités : Belenos, dieu de la lumière et de la puissance et le roi Houx, dieu de l'hiver. 

"Depuis l'aube des temps, le monde est équilibré entre une saison claire et sombre, raconte Romain Plichon. Mais ce n'est pas aussi simple, il y a un peu de sombre dans le clair et de clair dans le sombre. Beltaine est l'annonce de l'arrivée de la lumière. Pendant ce moment où la terre meurt avec la saison sombre, le temps s'arrête et la terre se régénère. À Belltaine, les journées s'allongent, la chaleur revient, les animaux mettent bas, c'est l'annonce de la terre qui renaît et avec elle la défaite du roi Houx, qui est en fait le roi de l'hiver. Sa défaite se pressent à Beltaine. Mais s'il perd à ce moment, c'est qu'il a gagné en fin d'année dernière avec l'arrivée de la saison sombre."

Un cycle lumineux qui se poursuit jusqu'aux fêtes de Lugh, en août, marquant la victoire totale de Belenos à l'apogée de l'été. "C'est une tentative d'explication du monde, toutes ces histoires sont racontées pour nous aider à comprendre ce qu'il se passe, dans le ciel, chez les animaux, souligne Romain Plichon. C'est là où on en vient aux symboles : les Gaulois n'imaginaient pas littéralement qu'un dieu soleil se battait contre un roi houx, mais ces histoires sont symboliques, elles expliquent de façon intuitive des phénomènes complexes."

Une immersion festive dans le passé lointain

Si Samara célèbre Beltaine un peu en avance, c'est pour fêter sa réouverture après la pause hivernale avec de nombreuses activités et une présentation des nouveautés de la saison. Pour l'occasion, deux groupes de passionnés reconstituent différentes époques que les visiteurs peuvent découvrir grâce à un jeu de piste. 

"Les visiteurs rencontrent Jacques, archéologue du XIXe siècle, qui a perdu ses collègues archéologues dans l'espace et le temps, détaille Margot Lepage. Les visiteurs doivent les retrouver dans le parc pour comprendre la signification spirituelle de trois objets, de la préhistoire à l'époque Gauloise."

Ils rencontreront d'abord les Leukis, qui incarnent des celtes du Hallstatt, une période s'étendant de -750 av. J-C à -450 av. J-C. Une époque où apparaissent des tombes princières richement meublées, dont les fouilles archéologiques permettent de reconstituer le mobilier, comme un superbe trône de bronze nouvellement arrivé à Samara.

Puis, ils se dirigeront jusqu'aux Ambiani, une troupe incarnant les habitants du premier siècle avant notre ère. L'occasion d'observer les techniques de forgeage et de tissage de l'époque. Les plus jeunes peuvent même participer à un atelier pour devenir un véritable guerrier gaulois, pendant que leurs aînés assistent à des démonstrations de combats rituels. 

Pour les plus mélomanes, le parc accueille ce week-end un spécialiste du Carnyx, la trompette de guerre utilisée à cette époque par les premières lignes. Le Britannique John Kenny en a reconstitué grâce aux données de fouilles archéologiques et propose des conférences musicales, pour découvrir le son et les usages de l'instrument.

 

Enfin, le parc propose une nouveauté pour les tout-petits jusqu'à l'âge de 3 ans, les "préhistomômes" : un espace confortable où les bambins peuvent profiter de contes et de spectacles de marionnettes. Un éveil à l'Histoire tout en douceur. 

Si Beltaine ouvre le calendrier des fêtes de Samara, d'autres suivront en juillet, août et jusqu'à la fermeture du mois de novembre, où l'année se conclut par une autre célébration celte, celle de Samain. Elle marquera l'entrée dans la saison sombre et le retour du roi Houx, dans cette perpétuelle bataille entre ombre et lumière. 

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