Coronavirus – "Les gens n’ont plus envie d'acheter de la bière" : les brasseurs des Hauts-de-France sont dans le rouge

Avec la fermeture des bars et des restaurants, la consommation de bière a baissé drastiquement depuis le début du confinement. Dans les Hauts-de-France, deuxième région productrice, la filière s’inquiète de ne pas pouvoir écouler ses stocks et encourage les acheteurs à consommer local.
 

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"Honnêtement à part en temps de guerre, on n’a jamais vécu ça". Malgré son âge avancé, la plus vieille brasserie de Picardie, affronte un évènement inédit. Fondée en 1926, la brasserie De Clerck n’a jamais eu une activité aussi ralentie : "On a embouteillé une seule fois depuis le début du confinement, c’est-à-dire à peine 30% de ce qu’on produit d’habitude" se désole Joséphine De Clerck, directrice générale de l’entreprise basée à Péronne, dans la Somme.
 
Depuis la mi-mars, les cinq salariés de la brasserie sont au chômage partiel et ne sont mobilisés que pour envoyer quelques colis bien que "le nombre de commandes soit anecdotique" ajoute Joséphine De Clerck. Après un premier bilan, l’entreprise a perdu plus de 50% de son chiffre d’affaires au mois d’avril. "Les gens n’ont plus envie d’acheter de la bière, ils ne font plus d’apéros, plus de petits évènements. Surtout au début du confinement, il y avait pas mal d’anxiété et les gens n’avaient pas la tête à ça".

Pour écouler son stock de bières de printemps, la brasseuse a dû proposer des offres commerciales à ses clients : 2 achetées, 1 offerte. "C’est une bière de saison qui doit être bue rapidement, ajoute-t-elle. Je sais que si je ne la vends pas avant juillet, elle va me rester sur les bras".
 
Heureusement pour l’entreprise, il s’agit de la seule bière à écouler rapidement. Le stock de la petite brasserie n’est pas élevé et les autres gammes seront conservées en attendant des jours meilleurs.
 

10 millions de litres détruits en France

En revanche, d’autres brasseurs sont moins chanceux. Mardi 5 mai, le syndicat professionnel Brasseurs de France a annoncé qu’au moins 10 millions de litres de bière devraient être détruits, parce que non consommés à temps en raison du confinement. "La fermeture brutale des cafés, restaurants, l'arrêt des activités touristiques et l'annulation de tous les festivals et salons a laissé plus de 10 millions de litres de bières, majoritairement en fûts, en souffrance", a expliqué le syndicat à l’AFP.
 
Principale raison de cette destruction, les bières en vogue, souvent non pasteurisées au contraire des bières blondes classiques, sont plus fragiles. "Ce sont des bières très houblonnées, et si on les garde trop longtemps, quand elles dépassent deux à trois mois de conservation, l'effet olfactif et l'effet gustatif, l'arôme, disparaît", a expliqué Maxime Costilhes, délégué général de Brasseurs de France.
 

Les brasseurs des Hauts-de-France sont-ils concernés ?

"Certaines brasseries le seront, surtout celles qui produisent les bières IPA qui sont un peu fragiles au niveau des houblons, ou des bières blanches non pasteurisées" confirme Vincent Bogaert, président du syndicat des brasseurs des Hauts-de-France.

Depuis le début du confinement, il a déjà reçu de nombreux appels de brasseurs inquiets. "Certains brasseries ne vendaient qu’aux cafés et restaurants donc pour elles c’est catastrophique, admet-il. D’autres vendent aussi à des grandes surfaces, des particuliers ou des cavistes dont elles s’en sortent mieux".

Egalement gérant de la brasserie Saint-Germain située à Aix-Noulette, dans le Pas-de-Calais, l’artisan s’attend à voir certaines entreprises disparaître : "Il y aura des pertes surtout chez les tout petits brasseurs, ceux qui ont pu avoir des difficultés à avoir un prêt garanti par l’état. Ils espèrent se refaire avec la saison d’été mais vu comme c’est parti, c’est pas évident que les gens partiront en vacances".
 

25% des brasseries à l'arrêt

Selon le syndicat Brasseurs de France, environ 25% des brasseries sont actuellement à l'arrêt, faute d'activité et "70% des brasseries déclarent une perte de 50% du chiffre d'affaires ou plus depuis le 15 mars". Si près d'une brasserie sur deux a bénéficié d'un prêt garanti par l'État, et une sur quatre du fonds de solidarité, le syndicat estime qu’un "plan de relance fort doit accompagner la reprise" des cafés, hôtels et restaurants et du tourisme. Il réclame également une exonération des charges patronales et de production pour 2020.
 

Consommer local 

En attendant d’éventuelles aides de l’Etat, les artisans des Hauts-de-France misent sur le soutien de leurs clients. "Je souhaiterais qu’une petite partie des gens réalise que c’est important de consommer local et que ça soutient des entreprises à côté de chez eux. Vu la taille de notre entreprise, il ne suffit pas de grand-chose" espère Joséphine De Clerck.

De son côté, Alain Bahuchet, chargé de mission pour la marque régionale Terroir Hauts-de-France, tente de valoriser les bières locales sur les réseaux sociaux. "Il faut inciter les gens à choisir les brasseries de nos petits artisans plutôt que des grosses brasseries" insiste-t-il.
 
D’autant que la région, deuxième plus grosse productrice de bière en France après l’Alsace, compte plus de 150 brasseurs. De quoi consommer local sans prendre le risque de se lasser ! (avec modération, bien sûr).  
 
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