La crise sanitaire du Covid-19 n’en finit pas d’avoir des conséquences pour la quasi-totalité des milieux économiques, y compris pour les médecins. Les cabinets se sont peu à peu vidés des patients, hésitants à consulter pour d’autres pathologies, en pleine épidémie.
Pour consulter le docteur Trailin, désormais, il faut faire le tour de son cabinet et patienter devant sa fenêtre. La salle d’attente est fermée afin d’éviter la promiscuité entre les patients. "On a la chance dans ce cabinet d’avoir des portes-fenêtres, ce qui nous permet de recevoir directement les gens de l’extérieur", explique Barbara Trailin, médecin à La Chapelle-d’Armentières dans les Hauts-de-France.
Un baptême du feu
Cette jeune médecin, France 2 l'avait rencontrée il y a un an, le jour de son installation. Ils la retrouvent aujourd’hui, masquée et protégée par une surblouse. Cette bataille contre le coronavirus, c’est en quelques sorte son baptême du feu. "Je ne m’attendais pas à tout ça. Je savais que ça pouvait arriver, mais en aucun cas, on est formés à la médecine de catastrophe. On a découvert les choses au fur et à mesure et on s’y est adapté”.
Barbara Trailin n'a pas géré de cas de coronavirus jusqu'à présent, mais elle passe du temps à calmer les anxiétés des patients. “On parle toujours de deuxième vague, alors j’aimerais savoir si elle va vraiment avoir lieu, si on doit continuer les gestes barrières, combien de temps ça va durer…”, se demande une patiente.
"Des patients ne veulent pas consulter pour un infarctus"
Ses patients, elle les reçoit au compte-gouttes. Beaucoup ont déserté son cabinet depuis le début de l’épidémie, jusqu’à mettre leur vie en danger : “J’ai eu des patients qui ne voulaient pas consulter pour un infarctus du myocarde, ils voulaient attendre que l’épidémie passe. En les rappelant, je me suis rendue compte qu’ils devaient voir un cardiologue rapidement. Il y a des gens que j’ai réussi à rattraper. Et puis il y en a d’autres, pas du tout”, se désole la jeune médecin.
5 000 € de pertes
L’absence de patients, c’est aussi des revenus en chute libre. Barbara Trailin fait le bilan à l’heure de la pause déjeuner : “Ça me fait une perte de 5 000€ brut sur le mois. C’est énorme, et aujourd’hui je n’ai pas les moyens de faire autre chose que de payer mes factures”. Pour les jeunes généralistes, frais professionnels et charges sociales pèsent lourd dans la balance.
En attendant une embellie, le docteur Trailin s’est lancée dans les télé-consultations. Elle a aussi repris ses visites à domicile. C'est l'heure des retrouvailles dans une résidence pour personnes âgées, avec un couple d’octogénaires : “On attendait de la voir en vrai. C’est l’habitude qu’elle vienne tous les mois pour nos médicaments", se ravit le mari.
Entre ces trois-là, une relation de confiance s’est nouée au fil des mois. Et la médecin généraliste a peur :“Ce qui me ferait vraiment mal au coeur, c’est de pouvoir être un danger pour eux et de les contaminer”. Alors face au virus, elle ne baisse pas la garde. Ses lingettes désinfectantes ne quittent plus sa trousse de médecin.