Le maire, cet élu que l’on ne respecte plus

Incivilités, insultes, violences, sentiment d’abandon, de nombreux maires de France ont décidé de raccrocher l’écharpe et de ne pas se représenter en mars prochain. Les autres tentent de se convaincre que la consultation lancée par le Sénat débouchera sur des propositions concrètes.
 

Lui aurait bien voulu se représenter en mars prochain. Son dernier mandat disait-il. Le septième comme maire de Signes, petite commune du Var, située non loin du circuit du Castellet créé par Paul Ricard, son mentor en politique. Et il aurait été élu haut la main une nouvelle fois. Mais le 5 août dernier, Jean-Mathieu Michel, 76 ans, est mort percuté par une camionnette en tentant d’empêcher un dépôt sauvage dans un bois de sa commune.

Un tragique fait divers qui a ému la France entière au cœur de l’été, mais surtout beaucoup d’élus locaux, maires, adjoints ou simples conseillers municipaux confrontés chaque jour, et de plus en plus, aux incivilités, aux insultes et à la violence. En première ligne face aux mécontentements de leurs administrés, y compris sur des sujets qui dépassent largement leurs compétences. Sylviane Tison, maire d’une commune d’une centaine d’habitants dans le Lot a subi plusieurs agressions ces dernières années, y compris à son domicile.
 

Maire de Belmont-Sainte-Foi (Lot) ©France 3
 

Réseaux sociaux 

De nombreux élus le constatent, en ville comme à la campagne la société est devenue plus violente, tout comme les rapports avec la population. Notamment à cause de la libération de la parole sur internet via les réseaux sociaux. Un défouloir virtuel où plus aucun filtre n’existe et qui peut parfois se poursuivre dans la rue. Face à ce déferlement de haine, certains édiles n’hésitent plus à signaler les auteurs aux forces de l’ordre ou directement à la justice. Pour Jean-François Vigier, maire de Bures-sur-Yvette en Essonne,  ces comportements sont désormais quasi systématiques sur de nombreux dossiers.
 
Maire de Bures-sur-Yvette (Essonne) ©France 3


Consultation nationale

La mort Jean-Mathieu Michel a provoqué un électrochoc et le Sénat a immédiatement lancé une grande consultation auprès des maires (et de leurs adjoints). Ils ont jusqu’au 15 septembre pour répondre à dix-sept questions. Un sondage pour dresser une sorte de cartographie des menaces et agressions auxquelles sont confrontés les élus. Leurs réponses devraient permettre aux sénateurs de formuler des propositions pour le futur projet de loi "Engagement et proximité" sur les conditions d’exercice des mandats locaux qui sera examiné début octobre. En 2018, 361 maires et maires adjoints ont été victimes d'"atteintes volontaires à l'intégrité physique", selon une note du service des statistiques du ministère de l'Intérieur en date du 8 août, qui précise que ces chiffres ne sont pas exhaustifs. 
 
 

Trop tard pour beaucoup

Selon l’association des maires de France, un édile sur deux ne se représentera pas aux prochaines municipales. Et dans certaines communes rurales, les habitants se pose désormais cette question : "Aura-t-on un maire en mars prochain ?" Car évidemment la médiatisation du mal-être des maires en a refroidi plus d’un et les candidats ne se bousculent pas (plus) au portillon.

Si la question des violences et autres agressions a pu peser dans leur décision, beaucoup de ces élus qui ont décidé de raccrocher l'écharpe tricolore évoquent aussi une perte de sens dans leur mission et des pouvoirs transférés petit à petit vers les intercommunalités, alors qu'ils continuent de supporter les responsabilités pénales en cas de problème sur leur territoire. 

Alors certains n'hésitent plus à poser une autre question, plus sensible celle-ci : si l'intercommunalité devient la norme, la fonction de maire ne va-t-elle pas tout simplement devenir obsolète ? Des perspectives qui ne vont pas forcément motiver les éventuels candidats à s'engager dans cette mission de plus en plus périlleuse.


    

 
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