Le 22 novembre 1936, les funérailles de Roger Salengro, ministre de l’Intérieur du Front Populaire, rassemblèrent 1 million 200 000 personnes, du jamais vu depuis celles de Victor Hugo. Roger Salengro s’est suicidé. Il n’a pas supporté d’être accusé de désertion.
Des années après, l’écho de la Grande Guerre résonne encore de façon dramatique.
1912 : Roger Salengro est appelé sous les drapeaux. Au cours d’une permission, ce jeune et brillant militant socialiste manifeste contre la loi des 3 ans qui allonge la durée du service militaire. Il est dès lors inscrit sur le fameux carnet B, la liste des suspects à surveiller en cas de guerre.
Cela lui vaudra d’être emprisonné lors de la mobilisation d’août 1914. Libéré, Salengro se porte volontaire pour le front.
La guerre, Roger Salengro la fera en Artois et en Champagne, comme « cycliste du chef », agent de liaison. Le 7 octobre 1915, fidèle à une promesse conjointe, il part récupérer les papiers d’un ami, tombé dans les lignes ennemies. Il disparaît. Quelques mois plus tard, un conseil de guerre écarte tout soupçon de désertion. Le soldat Salengro est acquitté, et pour cause puisque les Allemands l’avaient fait prisonnier. En novembre 1918, à son retour, il pèse à peine 40 kilos.
Des années plus tard, Roger Salengro, ministre de l’Intérieur du Front Populaire est devenu l’homme à abattre pour les ligues d’extrême-droite qu’il veut dissoudre.
Le 14 juillet 1936, l’Action Française lance une campagne de presse. Le quotidien dénie à Roger Salengro le droit d’honorer la tombe du Soldat Inconnu au motif
qu’il aurait déserté pendant la guerre. Rien n’arrêtera plus la calomnie d’une violence inouïe.
Le 17 novembre 1936, Roger Salengro se suicide. Avant de se donner la mort, il écrira :
Je ne suis ni un déserteur, ni un traître.