Le RC Lens a enregistré une perte de 10,1 millions d'euros la saison dernière

Le Racing Club de Lens a enregistré au terme de la saison 2014-2015 une perte de 10,1 millions d'euros, d'après les derniers comptes déposés au greffe du tribunal de commerce d'Arras.

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La saison 2014-2015 a été particulièrement pénible pour le Racing Club de Lens : sur le terrain, avec la 20e et dernière place en Ligue 1 synonyme de relégation à l'échelon inférieur, comme en coulisses, en raison des difficultés rencontrées par son actionnaire majoritaire Hafiz Mammadov, incapable de faire face à ses engagements financiers. Privés de recrutement et surveillés de près par la DNCG (Direction Nationale de Contrôle de Gestion), les Sang et Or sont quand même parvenus à limiter les dégâts, mais enregistraient au 30 juin 2015 une perte de 10 136 066 euros. C'est ce que révèlent les derniers comptes de la Société Anonyme Sportive Professionnelle (SASP) Racing Club de Lens approuvés lors de l'assemblée générale ordinaire du 23 décembre 2015. Ils ont été déposés au greffe du tribunal de commerce d'Arras le 1er février 2016. 

Cette perte de 10,1 millions  d'euros n'a rien d'une anomalie en soi, peu de clubs professionnels de football en France étant à l'équilibre. Elle est même inférieure à celles enregistrées par le RC Lens au terme des saisons 2011-2012 (-15,16 millions) et 2012-2013 (-11,8 millions). Mais elle reste néanmoins préoccupante.  

Chiffre d'affaires en hausse 

Lors de son bref retour dans l'élite la saison dernière, le RC Lens est parvenu à accroître son chiffre d'affaires nets de 44,78% : il s'élèvait au 30 juin 2015 à 23 617 430 euros contre 16 312 298 euros au terme de l'exercice précédent. Cette hausse est principalement liée aux droits TV perçus en Ligue 1 : même en finissant dernier du championnat, Lens a empoché 14,51 millions d'euros selon le rapport 2014/2015 de la DNCG, contre 5,88 millions la saison d'avant en Ligue 2.


Les ventes de la boutique, elles, ont chuté de 31,8% (0,88 million d'euros contre 1,29 million au 30 juin 2014), en raison des travaux de rénovation du Stade Bollaert-Delelis et de la délocalisation des matches à Amiens et à Saint-Denis. Les derniers comptes déposés cette année au greffe du tribunal de commerce d'Arras ne donnent pas le détail des recettes de billetterie. Avec une moyenne de 17 205 spectateurs en moyenne contre 31 016 en 2013-2014, on aurait pu penser qu'elles étaient en baisse, mais elles se sont finalement élevées à 6,16 millions selon le rapport de la DNCG, sans doute grâce aux trois rencontres organisées au Stade de France (contre l'OM, le PSG, le LOSC). Du coup, les recettes hors droits TV et ventes de la boutique sont restées stables, légèrement supérieures à 9 millions d'euros. Le sponsoring, en revance, n'a rapporté que 2,62 millions selon la DNCG. Grâce à l'ensemble de ces recettes, le déficit d'exploitation a pu être ramené à -11,64 millions d'euros contre -20,76 millions en 2013-2014.

Recettes du Racing Club de Lens2014-20152013-2014
Droits TV14,51 millions €5,88 millions €
Ventes boutique0,88 million €1,29 million €
Autres (billetterie, abonnements, sponsors...)9,1 millions €9,14 millions €
TOTAL chiffres d'affaires net23,61 millions €16,31 millions €
Pour ce qui est des recettes hors chiffre d'affaires, le RC Lens a encaissé 3 645 803 euros de "produit de cession vente joueurs". Une somme qui semble correspondre à la vente au Stade Rennais du jeune défenseur Dimitri Cavaré pendant le mercato d'hiver. Au total, les Sang et Or ont enregistré 29 491 554 euros de produits


Des charges encore élevées

Lors de la saison 2014-2015, les charges totales du RC Lens se sont élevées à 39 627 620 euros (+0,13% par rapport à la saison précédente). Le club est parvenu toutefois à réduire légèrement ses charges d'exploitation de 1,84 million d'euros (-4,84%). Le principal effort a porté sur les "salaires et traitements" qui sont passés de 14,45 millions à 12,58 millions (-12,9%). Les charges sociales ont diminué elles aussi par conséquent (-23,41%). Contrairement à l'an dernier, les comptes consultables ne donnent pas le détail par catégorie de personnel (joueurs, entraîneurs, personnel administratif). Le président lensois, Gervais Martel, avait toutefois indiqué que la Direction Nationale de Contrôle de Gestion (DNCG) avait plafonné la masse salariale joueurs à 6,5 millions d'euros. Le club a par ailleurs été interdit de recrutement.

Charges d'exploitation du RC Lens2014-20152013-2014
Achats de marchandises0,89 million €0,88 million €
Autres achats et charges externes11,32 millions €9,48 millions €
Impôts, taxes1,68 millions €0,87 million €
Salaires et traitements12,58 millions €14,45 millions €
Charges sociales4,48 millions €5,85 millions €
Autres charges d'exploitation5,27 millions €6,53 millions €
TOTAL charges d'exploitation36,22 millions €38,06 millions €
En revanche, les "autres achats et charges externes" sont passés 9,48 millions à 11,32 millions d'euros (+19,4%). Les comptes déposés ne fournissent pas le détail de ces charges qui regroupent en général des frais extrêmement variés (loyers, frais de transport et d'organisation, honoraires, eau, électricité, fournitures, téléphone, location de matériel, etc...). A l'évidence, la délocalisation des matches au Stade de la Licorne à Amiens et au Stade de France à Saint-Denis ont constitué un surcoût. Le club a toutefois bénéficié d'un petit coup de pouce de la mairie de Lens qui ne lui a pas fait payer de loyer pendant la rénovation du Stade Bollaert-Delelis, malgré le bail emphytéotique qui lie le Racing et la municipalité jusqu'en 2052.


Si les charges d'exploitation du RC Lens ont baissé, les charges exceptionnelles, elles, sont passées de 1,12 million d'euros à 3,15 millions (+181,25%). Parmi elles, on trouve un peu plus d'1 million d'euros de provisions liées à la rénovation du Stade Bollaert-Delelis, 382 000 euros liés à une régularisation et un redressement auprès de l'URSSAF, mais aussi 1,55 million dûs à l'annulation d'un "crédit vendeur" et au solde d'une caution concernant le Golf d'Arras. Comme nous l'avions déjà expliqué, la SASP Racing Club de Lens a fusionné en 2014 avec son ancienne holding, la Financière Sang et Or, qui appartenait auparavant à Gervais Martel sous le nom de GM Finance. Cette holding était à la fois propriétaire du RCL et du complexe golfique cédé en 2012 à la société Marlimon Capital. Une société détenue par deux proches de Gervais Martel, Didier Lignier et Jean Monturi (Marlimon = MARtel-LIgnier-MONturi) et qui n'a pas pu honorer ses engagements. En raison de la fusion, le club a donc hérité de certaines charges liées au golf arrageois. Il convient toutefois de signaler que 500 000 euros de "reprise de provision crédit vendeur golf" figurent en contrepartie dans les produits exceptionnels et réduisent d'autant la note. 

Reports d'échéances

Lors de cette saison 2014-2015 très tendue sur le plan financier, le RC Lens est parvenu à obtenir des reports d'échéances concernant ses emprunts. D'après le bilan du précedent exercice (2013-2014), le club aurait dû rembourser la saison dernière 1 242 000 euros d'emprunt (hors intérêts). Il n'en a finalement remboursé qu'à peine la moitié : 610 052 euros. Au 30 juin 2015, le Racing avait donc encore 4 360 407 euros de dettes auprès d'établissements de crédit. Le principal emprunt - gagé sur le foncier du centre technique de la Gaillette - a été contracté il y a déjà plusieurs années auprès de la compagnie Swiss Life. Selon L'Equipe, le club aurait dû s'acquitter d'un coup d'un versement de 3,2 millions d'euros d'ici mars 2016. Mais là encore, Lens semble avoir obtenu un nouveau sursis. En effet, en annexe des comptes, à la rubrique "Etat des échéances des créances et des dettes à la clôture de l'exercice", seuls 659 000 euros apparaissent dans la case des échéances "à 1 an au plus". De quoi soulager encore cette saison, la trésorerie du club. 3 595 407 euros restent toutefois à verser "à plus d'1 an et 5 ans au plus" et 106 000 euros "à plus de 5 ans". .

Etat des dettes du RC Lens2014-20152013-2014
Emprunts et dettes auprès des établissements de crédit4,360 millions €4,970 millions €
Emprunts et dettes financières divers (dont compte-courants d'actionnaires)8,920 millions €5,620 millions €
Dettes fournisseurs7,187 millions €3,095 millions €
Dettes fiscales et sociales3,969 millions €8,248 millions €
Autres dettes0,005 million €0,003 million €
Avances et acomptes reçus6,194 millions €-
TOTAL Dettes30,63 millions €21,93 millions €
Les dettes à l'égard des fournisseurs, du fisc et des services de l'état sont quasiment identique à celles du précédent exercice (un peu plus de 11 millions d'euros en cumulé). En comptabilité, ces dettes prennent en compte les provisions programmées pour des paiements ultérieurs, prévus à court terme. Le club semble juste avoir donné la priorité cette fois au paiement des impôts et des charges, par rapport à ses fournisseurs. Ces derniers semblent avoir accordé des délais de paiement, ce qui a sans doute permis de préserver la trésorie du club jusqu'à la fin de la saison. Au 30 juin 2015, les disponibilités en caisse étaient en effet de 2,2 millions d'euros (contre 1,9 million au 30 juin 2014). On note par ailleurs la présence au passif de 6,19 millions d'euros "d'avances et acomptes reçus". A l'été 2014, le RC Lens avait notamment perçu une avance de 5 millions d'euros de la part de Lagardère Sports (ex-Sportfive) qui gère les droits commerciaux du club. Une pratique courante dans le football.  

Hafiz Mammadov, actionnaire fantôme... ou presque

L'état des dettes laisse apparaître également dans le bilan 8,92 millions d'euros d'"emprunts et dettes financières divers". Il s'agit principalement des intérêts courus (1,28 millions) et des comptes courants d'associés (7,64 millions), c'est-à-dire des avances consenties par les actionnaires qui peuvent, à terme, soit leur être remboursées, soit être transformées en "produits exceptionnels". Les comptes déposés au greffe du tribunal de commerce d'Arras ne donnent cette année aucun détail, contrairement à ceux du précédent exercice. Au 30 juin 2014, sur les 5,62 millions d'euros d'''emprunts et dettes financières divers", on trouvait un compte-courant de 3,5 millions d'euros de RCL Holding, la société parisienne dirigée par Gervais Martel et financée par Hafiz Mammadov, qui détient 99,8% de la SASP.


Cette somme n'a pas été convertie depuis en produit exceptionnel. Elle s'additionne donc aux 4 millions d'euros versés par la holding la saison dernière. Le club avait annoncé en effet avoir reçu 1,5 million d'euros d'Azerbaïdjan en octobre 2014 puis 2,5 millions au mois de décembre suivant, par l'intermédiaire d'un certain Anar Mammadov, fils du ministre des Transports azerbaïdjanais (sans lien de parenté avec l'actionnaire majoritaire de Lens). Hafiz Mammadov s'était engagé toutefois à injecter 14 millions supplémentaires qui ne sont jamais arrivés. Mais en raison de l'interdiction de recrutement et de l'encadrement de la masse salariale, les besoins ont été moindres et ont pu être un tout petit peu compensés, notamment par la vente de Dimitri Cavaré. 

Quels enseignements pour la suite ?

La saison 2014-2015 a été un exercice d'équilibriste pour Gervais Martel et les dirigeants du RC Lens. Mais le club artésien ne pourra pas jongler éternellement avec des avances ou des reports de paiement pour préserver sa trésorerie. Surtout avec un actionnaire dans l'incapacité d'éponger les pertes du club. Cette saison, en Ligue 2, les Sang et Or toucheront 8 à 9 millions d'euros de droits TV en moins. Il faudra donc diminuer drastiquement les dépenses. En juin dernier, la DNCG a validé un budget de 20 millions d'euros, dixit Gervais Martel, avec une masse salariale plafonnée à 5 millions et une interdiction de recruter à "titre onéreux". Mais avec 39,6 millions d'euros de charges la saison dernière, ramener les dépenses à seulement 20 millions d'euros sera un challenge très difficile, pour ne pas dire impossible. A moins qu'Hafiz Mammadov, toujours aux abonnés absents, finisse par accepter d'ici juin prochain de céder le club à un nouvel investisseur capable de soulager les finances. Gervais Martel est à Bakou ce dimanche pour rencontrer son associé et actionnaire majoritaire. Jusqu'ici, seul le Belge Grégory Maquet (Century 21 Bénélux) a formulé une offre concrète d'achat : 2,5 millions pour acquérir la SASP et 15 millions d'euros pour alimenter les caisses. Mammadov n'a pas donné suite jusqu'à présent mais l'entourage de Grégory Maquet nous a indiqué que l'homme d'affaires n'avait pas renoncé à son projet. L'Atletico Madrid a également manifesté un intérêt avant de démentir toute intention de reprise.


Dans le rapport du commissaire aux comptes sur l'exercice 2014-2015, il est écrit que "la continuité d'exploitation de la SASP Racing Club de Lens pour l'exercice en cours est assurée par : 1/ des mesures prises par la Direction pour réduire les dépenses de fonctionnement ; 2/ des ventes de joueurs pour un montant de 17 millions d'euros dont 13 millions d'euros ont été réalisées en début de saison 2015/2016". Le club a sans doute tenu ces mêmes engagements, en juin dernier, devant la DNCG. La réduction des dépenses n'est pas chiffrée, contrairement aux recettes anticipées sur la vente des joueurs. Le commissaire aux comptes ne détaille pas le montant des différentes transactions, ni les joueurs concernés. Mais ces 13 millions d'euros encaissés en début de saison semblent provenir des ventes de Jeff Reine-Adelaide et Yacine Fortune à Arsenal, de celle de Baptiste Guillaume au LOSC, de l'indemnité de formation de David Faupala parti à Machester City et des pourcentages substantiels perçus sur trois transferts d'anciens joueurs formés à Lens (Geoffrey Kondogbia de Monaco à l'Inter Milan, Gaël Kakuta de Chelsea à Seville et Serge Aurier de Toulouse au PSG). Mais il manque encore 4 millions d'euros pour arriver aux 17 millions prévus. Lors du mercato d'hiver qui s'est refermé le 1er février, le club s'est séparé de deux joueurs (Christian Bekamenga et Stéphane Besle) pour alléger sa masse salariale mais ils n'ont pas été vendus. "J'ai eu des demandes pour mes joueurs qui ont été refusées parce qu'aujourd'hui on souhaitait garder l'équipe", a indiqué Gervais Martel lundi en conférence de presse. Le club a-t-il tenté un coup de poker afin de ne pas affaiblir son effectif et de préserver ses chances de montée en Ligue 1 en fin de saison, quitte à ne pas tenir ses engagements ? Ou faut-il en déduire qu'une bonne nouvelle va bientôt tomber pour l'avenir du club ? On devrait en savoir plus cette semaine, Gervais Martel ayant promis de s'exprimer en conférence de presse à son retour de Bakou.
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