Le professeur caennais Gilles-Eric Séralini s'est dit prêt ce mardi à publier les données "brutes" qui lui ont permis de conclure à la nocivité d'un maïs OGM et d'un pesticide...
... mais à condition que les organismes officiels ayant autorisé ces produits fassent de même avec le pesticide.
"Nous voulons qu'il y ait une contre-expertise et que les données qui leur ont permis de valider ces données, puisqu'ils en sont si sûrs, soient rendues publiques.
Après, nous on rend tout public", a dit le chercheur français lors d'une conférence de presse au Parlement européen à Strasbourg.
Données contre données
Lundi, l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a mis en ligne toutes les données qu'elle a utilisées pour donner son avis favorable à l'autorisation de commercialisation du maïs OGM NK603, dénoncée par l'équipe du Pr Séralini dans une étude choc et controversée publiée en septembre.
"C'est une demi-victoire, une première transparence", a commenté le scientifique, qui a dit attendre la même mesure concernant le pesticide Roundup, "le plus utilisé dans le monde" et pour lequel aucun test sanguin n'a jamais été pratiqué selon lui sur les animaux qui consomment ce produit à faible dose.
Les conclusions de l'équipe du Pr Séralini ont été vivement critiquées alors qu'elles n'ont pourtant permis "ni moratoire ni autorisation" pour le maïs OGM ou le pesticide, a observé le scientifique. A l'inverse, "les données des agences ont servi à les autoriser pour des millions voire des milliards de gens, sur des bases ridicules", a-t-il martelé.
Une étude dénigrée
Son étude, très médiatisée, faisait état d'un risque accru de tumeurs mammaires et d'atteintes hépato-rénales pour les rats nourris avec le maïs OGM, associé ou pas à l'herbicide Roundup, deux produits du groupe américain Monsanto.
L'étude a été rejetée en novembre par l'EFSA qui a pointé des "lacunes importantes" dans sa conception et sa méthodologie.
"Ce n'est pas parce que les instances officielles dénigrent notre étude que ses résultats sont scientifiquement invalidés", s'est défendu mardi le professeur français.
Il a annoncé avoir remis à un huissier toutes les données brutes de son étude (notamment les résultats d'analyse de sang pratiquées sur les rats étudiés). Ces données pourront être rendues publiques lorsque celles ayant mené à l'autorisation du Roundup l'auront été.
Une plainte pour diffamation
Le scientifique et son équipe ont annoncé qu'ils comptaient porter plainte pour diffamation contre ceux qui les ont accusés d'avoir falsifié des données.
Une plainte a déjà été déposée fin décembre contre Jean-Claude Jaillette, journaliste et auteur d'un livre pro-OGM, et contre le scientifique et ancien ministre français Claude Allègre, selon le Comité de recherche et d'information indépendantes sur le génie génétique (Criigen) dont le Pr Séralini est membre.
L'eurodéputée française Corine Lepage -qui compte parmi les fondateurs du Criigen- a dénoncé un traitement inéquitable au détriment des anti-OGM.
"Je demande qu'on réévalue les études qui ont permis la mise sur le marché, avec les mêmes critères que ceux qui ont permis de juger celle de Séralini", a-t-elle dit, dénonçant un "deux poids, deux mesures au détriment de la santé des gens".