La ville de Caen a voté le passage à 4,5 jours de classe dès septembre 2013. Dans l'Orne, le village d'Aube fait parti des nombreuses communes qui demandent une dérogation pour mettre la réforme en oeuvre en 2014.
A Aube, un village de 1.400 habitants dans l'Orne, maire, instituteurs, employés communaux et parents d'élèves voient le passage à la semaine de 4,5 jours à l'école au mieux comme un "casse-tête", au pire comme une "catastrophe". "On a besoin de temps pour résoudre ce véritable casse-tête et pouvoir proposer de vraies activités à l'école", explique Jean-Marie Vercruysse, maire de cette commune à une heure trente au sud-est de Caen et qui, comme tant d'autres, a demandé une dérogation pour ne passer à la semaine de quatre jours et demi qu'en 2014.
Une équation financière
"Accueillir les enfants le mercredi matin, cela veut dire au moins mettre en place une garderie le matin, et donc embaucher du personnel communal en plus", explique l'élu sous l'étiquette MoDem qui préside l'Association des maires ruraux du département.
"Le samedi matin, ça aurait été moins cher car il n'y avait pas besoin de garderie, étant donné que la plupart des parents ne travaillent pas. Mais le Conseil général a fait savoir qu'il n'organiserait pas de transport le samedi", ajoute M. Vercruysse. Interrogé par l'AFP, le Conseil général a indiqué seulement "préférer le mercredi pour des raisons de coût" car ce jour-là, des bus circulent déjà pour le secondaire qui pourraient être utilisés aussi pour les écoliers.
"Sans ménage ni cantine, rien que pour l'encadrement des enfants, il y en a pour 120 à 130 euros par enfant et j'ai 240 enfants, sachant que l'éducation c'est déjà presque la moitié du budget communal", détaille l'élu dont l'association réclame un report des aides (50 euros par enfant en l'occurrence) prévues par l'Etat pour l'heure uniquement pour les communes qui passent dès la rentrée prochaine aux quatre jours et demi, selon l'association.
A voir en vidéo : les équipes de France 3 Basse-Normandie ont eu confirmation de ces inquiétudes en allant dans les villages de Saint-Pois et de Sourdeval dans la Manche.
Caen va dans le sens du gouvernement
A l'inverse la ville de Caen, dirigée par le député-maire socialiste Philippe Duron, a décidé de mettre en oeuvre cette réforme des rythmes scolaires dès septembre 2013. En milieu urbain ce n'est pas tant la question du mercredi ou du samedi matin qui fait débat : les parents d'élèves se demandent si le temps péri-scolaire doit être mis en place après la classe (de 15h30 à 16h30), ou en rallongeant la pause déjeuner. Illustration avec notre reportage.
Retour à Aube. La compétence des personnels encadrant inquiète aussi le maire : "dans les campagnes ce n'est pas évident de trouver des gens avec le Bafa (brevet d'aptitude aux fonctions d'animateur). Et même s'il y a des chômeurs, le Bafa, ça ne s'obtient pas en une semaine. Il y a une expérience à acquérir". Par ailleurs, "toutes les communes vont avoir besoin des même personnes au même moment, un cuisinier le mercredi midi ou un animateur après la classe, à l'heure la plus favorable pour les enfants", ajoute-t-il.
Une loi qui risque de tourner au gâchis
"C'est dommage. Il y a parfois une misère culturelle en milieu rural que la réorganisation des rythmes scolaires pourrait potentiellement combler. Ici, on pourrait organiser des activités découverte faune et flore" poursuit le maire. L'école est une question particulièrement sensible à la campagne: "C'est la plus belle carte de visite d'un maire rural" en termes d'attractivité, souligne l'élu.
Derrière le clocher octogonal d'Aube, où vécut la comtesse de Ségur, toutes les institutrices de maternelle ont fait grève contre la semaine de 4,5 jours. A l'école primaire, pimpante avec son bardage en bois, plusieurs institutrices auraient été favorables au travail le samedi matin et pensent que l'on court à la "catastrophe" en supprimant la pause du mercredi pour les enfants.
Les activités péri-scolaires, c'est du "blabla"
Les employées communales de maternelle qui, en milieu rural, aident les institutrices pendant la classe et assurent souvent ensuite la garderie, n'y sont pas plus favorables: "Je suis absolument contre. Je fais 10 heures par jour à l'école, mon fils par conséquent aussi. La pause du mercredi, on en a besoin", explique l'une d'entre elles.
Quant aux parents, leurs représentants sont très remontés. "Les activités sur le temps scolaire, c'est du blabla. En pratique, les parents ne savent pas comment aller chercher leurs enfants le midi. Les nounous ne sont pas intéressées par une demi-journée de garde", affirme un de leurs représentants. Maire et représentants de parents craignent à terme des fermetures d'écoles de petites communes qui n'auront pas les moyens de proposer des activités aussi intéressantes qu'ailleurs.
(avec AFP)