Avec "Black Box", le musicien français propose un voyage blues par delà les frontières et le temps. Il est en concert ce mardi soir au Magic Mirror. Interview.
Dans "Black Box", votre disque, il y a la notion d'héritage...Quand on n'est pas noir, quand on est pas de Louisiane ou du Delta et qu'on est marqué profondément comme moi durant son enfance par la musique noire, ça donne une idée d'un héritage un peu universel, je n'ai pas besoin d'être noir ou du Delta pour s'approprier une musique et essyaer d'en faire une musique d'aujourd'hui. Ma démarche est à l'opposé du passéisme: si j'essayais de jouer du blues à la manière des années 40 ou 50, je pense que ça ne serait pas intéressant car je ne serais pas authentique. Je travaille à l'aide d'un sampler avec des tas de choses qui sont des documents sonores des années 30-40, je les mastique, je les retourne, je les détourne, je recompose des pièces à partir de ces voix pour faire une musique d'aujourd'hui.
D'où viennent ces voix ?
Ce sont des voix inconnues ou connues, des morts et des vivants. C'est un peu l'abolition spatio-temporelle des choses que me permet cet instrument de musique, le sampler, faire se cotoyer une voix des années 30 avec des cordes contemporaines. Il n'y a plus de frontières spatio-temporelles, morts et vivants peuvent se rencontrer.C'est une idée qui a nourri mon disque et mon projet. Il y a des chanteurs extrêmement vivants, africains et haïtiens, des rencontres, des gens que j'aime. Il y a aussi des voix qui viennent de la collection du musicologue américain Alan Lomax qui a passé sa vie à enregistrer, du quidam aux stars, tous les folklores des Etats-Unis puis ensuite des Antilles et même d'Europe. Son oeuvre couvre les années 30 jusqu'aux années 70. C'est grâce à lui qu'on connait le blues, qu'on a accès à tous ces artistes. C'est un mix de tout ça. Tout a été conduit d'une manière instinctive et ludique. Je ne suis pas un spécialiste, je ne suis pas musicologue, je n'ai aucun diplôme. Ce travail permet de faire redécouvrir des choses anciennes et aussi de les inscrire dans une continuité.
Quelle est votre conception du blues ?
Je le prends un peu comme une émotion musicale, c'est quelque chose qui, je crois, traverse tous les peuples, toutes les formes musicales, ce sentiment d'exprimer la vie, la joie, la tristesse donc d'apporter un supplément d'âme à sa propre vie surtout quand elle est un peu pénible. Je pense que ça c'est complètement universel. Du coup, je me dis que ce n'est pas forcément américano-américain et qu'on peut faire chanter ensemble des gens venus d'horizons différents.
Nicolas Repac est en concert ce mardi soir au Magic Mirror à minuit