Une pénurie d'Amoxicilline dans sa forme pédiatrique sévit depuis quelques mois dans les pharmacies. En Normandie, les parents s'organisent comme ils peuvent avec la forme adulte, en gélules. Un gabarit pas très adapté aux jeunes enfants.
Ces dernières semaines, on parle dans les officines de la pénurie de l'Amoxicilline dans sa forme pédiatrique, un antibiotique à large spectre de la famille des pénicillines. Dans les pharmacies, on compte chaque jour les boîtes restantes, au gré de ravitaillements aléatoires.
"Là, on a zéro boîte pour enfant"
"Ça fait presque un an qu'on est en rupture d'Amoxicilline, ça va, ça vient. Là, on a zéro boîte pour enfant, mais 10 pour adultes", nous explique Héloïse Notre-Dame, pharmacienne au centre Saint-Sever à Rouen.
"On a un peu de stock d'Amoxicilline, ça dépend des jours, aujourd'hui ça va mais on ne sait jamais quand ça arrive, nous explique ce pharmacien de la place du Vieux Marché à Rouen, Nous manquons surtout de la forme pédiatrique."
"On se dépanne entre confrères"
À cette période de l'année où les infections ORL sont fréquentes et notamment chez les enfants, la pénurie de cet antibiotique souvent prescrit se fait difficilement sentir. Alors les professionnels s'organisent.
"Quand on est en pénurie comme aujourd'hui, on s'appelle entre collègues pour se dépanner, poursuit Héloïse Notre-dame de la Pharmacie des faïenciers au Saint-Sever à Rouen. On peut passer des heures au téléphone pour trouver des solutions. On appelle aussi les médecins pour qu'ils prescrivent d'autres médicaments."
Les parents se débrouillent
Les pharmaciens conseillent aux parents d'utiliser la forme adulte quand elle est disponible. Couper le médicament en morceaux, ouvrir la gélule, chacun fait comme il peut en fonction de l'âge du petit malade.
"J'ai eu la forme adulte en gélule. J'ai mis la poudre dans un yaourt, mais c'est un casse-tête à faire prendre ! Du coup j'anticipe avec le médecin pour qu'il prescrive un équivalent !", témoigne cette maman sur le Facebook de France 3 Normandie.
" Pour mon petit-fils la dernière fois, on a dû écraser des comprimés adultes et les diluer dans l'eau. Il ne voulait pas les prendre car le goût n'est pas bon !" raconte cette mamie.
En Normandie, galère pour les enfants. Ils n'ont plus le sirop, même pour les bébés ce sont des gélules, et encore ils en ont très peu !
Mélanie, sur le Facebook de France3 Normandie
"On manque de tout"
Mais les enfants ne sont pas les seuls à être impactés par les pénuries de médicaments. "Dans une ordonnance sur deux, il manque quelque chose, nous confie Héloïse Notre-Dame, on a jamais connu ça depuis 10 ans que je suis pharmacienne, c'est la première fois qu'il y a tant de ruptures de stock".
Manque d'Orelox, de collyre, de sirop, de cortisone, de spray ORL, d'anti-inflammatoire non stéroïdiens... La liste est longue à en croire cette pharmacienne qui reçoit entre 160 et 200 personnes par jour.
Pour un monsieur en récidive de pneumonie, on a passé une heure au téléphone avec les urgences. Il n'y avait plus d'Augmentin dans tout Rouen.
Héloïse Notre-Dame, pharmacienne à Rouen
Parfois les malades doivent se déplacer dans la région pour trouver le médicament dont ils ont besoin. "Un client est allé jusqu'à Dieppe pour être dépanné d'un médicament qu'il ne trouvait pas à Rouen."
🗣️"En début de semaine prochaine, on aura du stock d'Amoxicilline dans les pharmacies", confirme Aurélien Rousseau, ministre de la Santé.
— franceinfo (@franceinfo) December 15, 2023
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80% de nos médicaments sont fabriqués en Chine ou en Inde, ce qui nous rend dépendant pour leur approvisionnement. La France réfléchit depuis quelques années à relocaliser la fabrication de certaines molécules, comme le paracétamol, pour maîtriser leur production.
Bien qu'ils concernent notre santé, les médicaments sont des produits soumis aux mêmes variations de l'offre et de la demande que n'importe quel autre bien de consommation.
Depuis un an, l'Amoxicilline est en forte demande, ce que n'ont pas anticipé les fabricants, eux-mêmes soumis aux variations des prix des matières premières. On n’en a donc pas fini avec ces pénuries.