2 millions de budget participatif : parking à vélo sécurisé, parc à chien, mur d'escalade, la ville de Caen laisse ses citoyens choisir

Deux millions d'euros seront disponibles chaque année pour financer les projets d'investissement ayant la faveur des habitants, via le "budget participatif" de la ville de Caen. Les votes sont ouverts jusqu'à la fin du mois de mars.

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Comment réconcilier les citoyens avec la démocratie ? En les associant peut-être un peu plus aux décisions qui concernent leur quotidien. Et l'échelon local apparaît comme le plus aisé pour expérimenter de nouvelles pratiques. Le concept de budget participatif est né en 1989 au Brésil, dans la ville de Porto-Allegre, en point dans le mouvement altermondialiste. Le principe : associer, partiellement, les citoyens aux décisions budgétaires de la collectivité. Une petite partie du budget de la ville, ou du moins son affectation, est soumis à la consultation (par un vote par exemple) des habitants. 

L'idée est apparue timidement en France à la fin des années 90 début 2000. Elle connait un coup d'accélérateur à partir du scrutin municipal de 2014. Fin 2019, le site vie-publique.fr recensait des budgets participatifs dans 80 municipalités françaises (six millions d'habitants concernés). En Normandie, le concept tend aussi à se développer. Depuis 2018, la commune d'Hermanville-sur-Mer utilise le site internet Cofonder pour permettre à ses administrés de proposer des projets mais aussi décider de les financer. A Rouen, un budget participatif est mis à disposition des conseils de quartier. Les communes de La Hague, dans la Manche, et d'Argentan, dans l'Orne, ont elles aussi décidé récemment de sauter le pas. Tout comme Caen, où l'idée figurait parmi les promesses de campagne du maire candidat Joël Bruneau lors du dernier scrutin. L'ex-capitale de la Basse-Normandie met deux millions d'euros par an au "pot commun", un budget dévolu à l'investissement qui a été voté en conseil municipal.

Un vote du budget participatif ouvert à tous les Caennais

Selon Sophie Simonnet, l'adjointe au maire en charge de la participation citoyenne, de la vie associative et de la politique de la ville, ce projet s'inscrit un peu dans la continuité des contrats de quartier noués avec les 12 conseils de quartier  caennais lors du précédent mandat. Adossé à une "plateforme participative" sur internet, il a l'ambition de s'adresser à tous les Caennais. "On essaye d'avoir une participation citoyenne de gens qui aujourd'hui sont peu présents dans les conseils de quartier comme les jeunes actifs qui ont des familles, qui ne peuvent pas forcément se déplacer pour des réunions le soir. Ça permet de toucher des citoyens caennais qu'on a du mal à toucher par ailleurs. "

Cette plateforme, intitulée "Je participe à Caen", est à la fois une boite à idées et un bureau de vote. A l'automne dernier, un appel à projets a été lancé. Plus de 300 ont été proposés. A charge ensuite aux services de la Ville de faire le tri." On a eu une première sélection avec une étude de recevabilité. Il fallait que ce soit des projets d'investissement. Par exemple, une fête pour l'accueil des nouveaux arrivants du quartier, on n'est pas dans des budgets d'investissement. Et les projets devaient être limités à 400 000 euros", explique Sophie Simonnet. Après l'estimation financière, les services techniques ont réalisé une étude de faisabilité (technique) pour chacun des projets. 

139 projets de citoyens soumis au vote

Depuis le 1er mars et jusqu'à la fin du mois, 139 projets sont soumis au vote. "Un certain nombre de projets (une cinquantaine) ont été fusionnés. Ainsi, sur un même site, on avait quelqu'un qui proposait un jeu pour enfant, un autre un terrain de boules, quelqu'un d'autre une fontaine à eau, etc ", explique l'adjointe au maire de Caen. D'autres ont été provisoirement mis de côté. "On a un projet qui est plutôt joli : la restauration de l'église du Vieux Saint-Etienne, en face de l'Hôtel de Ville, c'est à dire la rendre accessible, qu'on ne risque pas de se prendre une pierre sur la figure et qu'on puisse y faire des concerts, des choses comme ça. Là, on sait très clairement qu'on est plutôt à un million d'euros. C'est un des projets qu'on a retiré. Ce qui ne veut pas dire que la Ville de Caen ne le fera pas. Mais elle ne le fera pas dans le cadre des budgets participatifs. Elle le fera dans le cadre du budget de la restauration du patrimoine."

Un mur d'escalade à Venoix, un garage solidaire à la Pierre-Heuzé, la création d'une piste cyclable à la Maladrerie, une boite à livres au Chemin-Vert ou la création d'un jardin inclusif à la Colline aux oiseaux, voilà une courte sélection des projets sur lesquels sont amenés à se prononcer les Caennais. Mais pas qu'eux. "Pour s'inscrire sur la plateforme, il faut soit habiter à Caen soit avoir une activité sur Caen : ça peut être une activité associative ou travailler sur Caen." Chaque votant peut voter pour autant de projets qu'il le souhaite. "Ce n'est pas parce qu'on est un habitant du Calvaire Saint-Pierre qu'on n'a pas le droit de voter pour un projet qui plaît beaucoup au Chemin-Vert par exemple. Mais on ne peut voter qu'une fois par projet."

En moins d'une semaine, 700 personnes ont déjà participé à ce scrutin inédit à Caen. Certains des 139 projets bénéficient d'un label "coup de cœur", un label attribué par les conseils de quartier. "Il y a plus de 600 conseillers de quartier (volontaires ou tirés au sort) à l'échelle de Caen. Ce sont souvent des gens très engagés pour leur quartier. On estime donc que c'était important qu'ils puissent donner leur avis. En ce moment, on réunit tous les conseils de quartier et ils élisent leur projet coup de cœur." Un label qui, pour autant, n'a pas valeur de vote. 

L'association des conseils de quartier au budget participatif ne se limite pas une simple recommandation sur la plateforme de vote. "On va réaliser le projet par quartier qui obtiendra le plus de votes. On s'engage donc à réaliser 12 projets, de façon à ce qu'il y en ait bien un par quartier", assure Sophie Simonnet,  "Ce projet sera réalisé avec la commission du conseil de quartier en charge du budget participatif. C'est le conseil de quartier qui va travailler avec les techniciens de la ville de façon à réaliser ce projet. On proposera au porteur de projet de rentrer dans le conseil de quartier concerné et de participer à cette commission pour la réalisation de son projet."

Une réalisation des projets étalée dans le temps

Une enveloppe annuelle de deux millions d'euros pour une douzaine de projets qui peuvent, en théorie, atteindre les 400 000 euros : la feuille de route semble trop ambitieuse. "Les projets sont de montants très très variés. Et ce ne sont pas toujours les projets les plus onéreux qui suscitent le plus d'enthousiasme", estime Sophie Simonnet, en s'appuyant sur l'expérience passée des contrats de quartier, "La plupart ne sont pas sur un montant de 400 000 euros. Un aménagement d'une aire de jeux, genre city stade par exemple, on est plutôt sur 150 000 euros." 

Si l'adjointe au maire de Caen se dit "pas du tout inquiète sur la question budgétaire", c'est parce que la réalisation des projets retenus va s'étaler dans le temps. "Pour réaliser un projet un peu global comme des tables de pique-nique et un terrain de boule supplémentaire plus une partie potager, le temps de retravailler ça avec les services, ça prend plusieurs mois. Il va y avoir un certain nombre d'allers-retours entre les habitants et les services de la Ville, il y a des choses qui vont être modifiées en cours de route, etc... Et comme on s'engage à réaliser ces projets sur l'ensemble du mandat, il n'y aura pas de sujet financier." La municipalité ambitionne même de faire "deux à trois projets par quartier sur la saison 1".

La saison 2, avec un nouvel appel à projets et de nouveau vote, est programmée en 2024. Elle accompagnera la mise en place des nouveaux conseils de quartier. "Ça permettra aux nouveaux conseillers de redémarrer avec des projets nouveaux." Objectif annoncé : réaliser deux "saisons" au cours de ce mandat.

 

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