S'accrocher à un tramway en marche pour se lancer un défi et épater la galerie : c'est le tram-surfing. Cette pratique illégale et dangereuse a déjà fait des morts en France. Elle semble avoir débarqué en Normandie ces derniers jours.
Le phénomène serait apparu au début des années 2010 en Russie avant d'essaimer un peu partout dans le monde. À Moscou, des casse-cou, souvent très jeunes, ont un jour eu l'idée de s'accrocher au métro pour voyager à l'œil et s'offrir une bonne dose d'adrénaline, non sans oublier de s'équiper, au préalable, d'une caméra pour la postérité. Depuis, les réseaux sociaux ont explosé et le dangereux défi a évolué. Du subway-surfing des origines, on est passé au tram-surfing. Des premiers cas ont été recensés tout récemment en Normandie.
C'est la police nationale du Calvados qui a donné l'alerte cette semaine sur les réseaux sociaux. Une vingtaine de cas (22) ont été recensés du 6 au 11 avril sur le réseau de transport de l'agglomération caennaise. Alertées par l'opérateur Kéolis, les forces de l'ordre indiquent s'être rapidement saisies du problème.
"Sinon, ça va être l'escalade avec les réseaux sociaux et il faut absolument éviter un drame", explique notre interlocuteur. La police nationale a ainsi mis en place un Groupe de Partenarait Opérationnel (GPO) avec Keolis et les polices municipales de l'agglomération. Présence sur le terrain, réorientation des caméras de sécurité mais aussi plan de prévention dans les collèges et lycées, font partie des axes de travail.
"Notre cible, ce sont les 13-16 ans"
Si, pour l'heure, aucune interpellation n'a eu lieu, les premiers éléments recueillis par les policiers convergent vers un public mineur. "Notre cible, ce sont les 13-16 ans. Ça se passe souvent après les sorties d'école, vers 17 heures", indique Dominique Rocha, directeur de Keolis Caen Mobilité, "et dans certains quartiers".
Si certains tram-surfeurs ont été aperçus par les conducteurs, ce sont surtout les traces laissées par leur passage sur le matériel qui ont révélé l'existence du phénomène. "On a constaté que des jeunes s'asseyaient sur le nez de requin de nos rames et ça les abîmait. On a été obligé d'en rentrer certaines au dépôt. Ça crée un certain nombre de perturbations et de dysfonctionnements, à la fois en termes d'exploitation et de dégâts matériels".
22 000 euros de dégâts
La facture s'élève pour le moment à 22 000 euros pour Keolis Caen Mobilité qui a déjà déposé deux plaintes. "Le sujet n'est pas tant là", affirme Dominique Rocha, "Il y a surtout le danger que courent les personnes qui font du tram-surfing. Les conséquences peuvent être dramatiques. Un jeune qui tombe peut mourir, il faut quand même le dire." Ainsi, à Lyon, deux adolescents âgés de 15-16 ans ont perdu la vie en 2016 et 2021 dans des circonstances similaires. Ces deux drames n'ont pas empêché d'autres jeunes de tenter ce défi l'année suivante.
Pour eux qui s'en sortent indemnes, cela peut tout de même coûter cher : une amende de quatrième catégorie pouvant aller jusqu'à 750 euros. À Caen, le procureur estimerait, selon notre interlocuteur à la police nationale, que le tram-surfing relève du délit d'entrave au bon fonctionnement d'un véhicule affecté au transport public (code des transports), un délit passible de 6 mois de prison et de 3 750 euros d'amende. De quoi dissuader d'éventuels trompe-la-mort ?
Un tiktokeur en ligne de mire
Chez Keolis Caen Mobilité, Dominique Rocha semble constater une forte diminution de ce type d'incidents depuis que les deux premières plaintes ont été déposées. Une troisième devrait suivre très prochainement. "Tout est parti d'une vidéo d’un tik-tokeur d’Hérouville qui a suscité des vocations. On sait maintenant qui c'est. Il a été identifié." L'opérateur du tramway de l'agglomération caennaise espère enfin que les vacances scolaires, qui débutent ce vendredi 19 avril au soir, mettront fin à ce dangereux phénomène.