Lundi 29 janvier, la Saur a contacté en urgence par téléphone plusieurs milliers d'habitants du sud de Caen pour les prévenir d'une altération de l'eau potable. Si une situation normale a été rétablie en quelques heures, la communication envers la population pose question.
Un numéro inconnu, non masqué, vous appelle. Vous décrochez, une voix préenregistrée vous informe que vous allez devoir écouter un message urgent. Si vous êtes encore au bout du fil, une voix robotisée vous explique que la qualité de l'eau produite par l'usine de traitement dont vous dépendez est "altérée".
Le procédé est surprenant. D'ailleurs, au-delà de la surprise, c'est l'incompréhension, voire l'inquiétude qui s'est emparée de bon nombre d'usagers, lundi 29 janvier. "Ah bon, c'était un message important ?, réagit une habitante du secteur. Ça ressemblait à un démarchage téléphonique, j'ai raccroché".
"On me dit que l'eau est altérée, mais puis-je la boire ou pas ?"
Car, à l'instar de l'eau distribuée par l'usine de traitement du sud de Caen, l'information urgente transmise par la Saur n'était pas très claire. "Un problème technique est survenu dans les usines de production d'eau potable du sud de Caen (...) L'eau, le goût et l'aspect de l'eau distribuée dans le sud de Caen ont été altérés".
Et la voix de conclure en affirmant que les techniciens travaillaient pour permettre un retour à la normale au plus vite.
"Le message apporte plus de questions que de réponses, déplore un usager. Quelle est la nature de l'incident ? Était-il grave ? Et surtout, peut-on consommer l'eau ou non ?"
Dans le doute, certaines écoles ont paré au plus pressé en distribuant de l'eau en bouteilles aux enfants. Des mairies ont prévenu leurs administrés via des applications mobiles.
Des améliorations à apporter au système d'alerte
Pour un problème de cette ampleur, et s'il convenait d'alerter la population rapidement, pourquoi les médias n'ont-ils pas été prévenus ? Pourquoi n'y a-t-il pas eu de communiqué sur les réseaux sociaux ?
La Saur nous donne des éléments de réponses. La communication envers la population a été diligentée en lien avec l'ARS, donneur d'ordre dans ce type de situation, et Eau du Bassin Caennais. Cette dernière a décidé de passer par le biais téléphonique pour contacter les usagers de l'eau.
Pour autant, un élément important manquait dans cette communication. L'eau potable distribuée était-elle, oui ou non, impropre à la consommation ? En l'absence d'information, les abonnés pouvaient penser que non. Cela dit, le simple fait de recevoir un message d'alerte était de nature à faire douter.
"On va remonter cette remarque à nos équipes et à l'ARS, afin d'être plus précis si ce genre de situation venait à se reproduire", nous dit-on à la Saur.
Un problème de pH de l'eau survenu dans le week-end
Quant à l'Agence régionale de santé, après une sollicitation dès lundi 29 janvier, elle nous a transmis un communiqué... au lendemain de l'incident.
Dimanche midi, un incident technique survenu dans la nuit de samedi à dimanche sur l’usine de production d’eau potable du sud de Caen a été signalé. Cet incident a entraîné une augmentation du pH de l’eau distribuée et une altération possible du goût, de l’aspect et de l’odeur de cette eau (qualités organoleptiques) sur plusieurs communes.
Communiqué de l'ARS du 30 janvier 2024
L'ARS poursuit en expliquant que la situation était "revenue à la normale sur l'ensemble des points de distribution lundi 29 janvier au soir", qu'elle avait été suivie "dès son signalement le dimanche", et qu'elle n'avait "pas entraîné de restriction de consommation".
La différence entre limite et référence de qualité
L'entité sanitaire a également tenu à préciser que le pH de l'eau constituait une "référence de qualité", et non une "limite de qualité". Cette dernière porte sur les paramètres "de nature à générer des effets immédiats ou à plus long terme sur la santé". La référence, elle, considère "des substances sans incidence directe sur la santé".
Et l'ARS d'ajouter : "une eau dépassant cette référence n'est pas automatiquement non consommable". Encore fallait-il le savoir, ce qui n'est, avouons-le, pas à la portée de tous.