En pleine tempête sanitaire, l'aéroport de Caen-Carpiquet évite le crash

Le secteur du transport aérien a été durement touché par la crise sanitaire en 2020. L'aéroport de Caen n'est pas épargné et enregistre une baisse de son trafic mais moins importante que la moyenne nationale.

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"2020 fut une année horrible pour les aéroports et le trafic aérien." D'emblée, Michel Collin le président de la CCI Caen Normandie, pose le ton, un ton résolument sombre : en moyenne, les aéroports français ont vu leur trafic diminuer de 70% l'an dernier. Pour Caen-Carpiquet, 2020 aurait dû voir le record de 2019 (304 769 passagers commerciaux) tomber. Finalement, seules 162 426 personnes ont transité par l'aéroport normand. Soit une baisse de 46,7%. "Un bilan satisfaisant", au regard de la situation nationale.

Si les périodes de confinement ont durement pesé sur l'activité du site, les motifs de satisfaction ne manquent pas, avec "un véritable rebond" cet été ,"un mois d'août plus important et plus profitable que le mois d'août 2019" et "une belle éclaircie sur les fêtes de fin d'année : sur Nice, Marseille, Toulouse, on remplissait les vols." Les résultats enregistrés par la nouvelle ligne Caen-Nice, lancée en pleine crise, sont également encourageants : "on a accueilli plus de 14 000 passagers, un score qu'on n'imaginait pas atteindre." Corrollaire de la situation sanitaire, l'explosion des vols sanitaires : 323 en 2020 contre 97 en 2019. 

Ce dernier point mis à part, ces différents éléments confortent la direction de l'aéroport dans ses choix de développement. "La stratégie de Caen repose sur les vols nationaux, de capitale régionale en capitale régionale, c'est notre point fort et durant cette crise il y a eu plus de résilience sur ces lignes que sur les vols internationaux." Un satisfecit qui sonne comme une feuille de route.

Deux partenaires historiques

"On espère reprendre le cours de notre histoire", indique Maryline Haize-Agron, la directrice de l'aéroport. Une histoire qui s'écrit depuis plusieurs années avec deux partenaires principaux. Le premier, Air France, a plus souffert que le second, Volotea : 62,88% de passgers en moins pour le Français contre une baisse de 20,84% pour l'Espagnol. "Le trafic affaire a été plus impacté que les vols familiaux et touristiques", explique Michel Collin.

La ligne Caen-Lyon assurée par Air France reprendra son activité le 26 mars prochain à raison de deux vols par jour en moyenne. En été, s'ajouteront Ajaccio et Calvi. "Nous n'avons pas d'inquiétude (au sujet d'Air France)", affirme Maryline Haize-Agron, "La compagnie a repris ses vols (à Caen) le 15 mars avant de reprendre à Orly. C'est un signe de confiance. A Caen, le programme est maintenu. Le marché est là, bien ancré."

Mais le premier temps fort de l'année sera pour Volotea avec la reprise du Caen-Marseille le 19 février prochain, avant l'ouverture d'une nouvelle ligne le 2 avril avec Montpellier. "Pour l'instant, elle doit fonctionner jusqu'au 8 octobre mais on souhaiterait la garder toute l'année", explique Céline Lacroix, directrice du développement de Volotea. Selon les deux parties, la billetterie enregistre déjà de bons résultats. "C'est une ligne qui est demandée des deux côtés, du côté de la Normandie et du côté du Languedoc", souligne Maryline Haize-Agron. L'étude de la provenance des passagers de la ligne Caen-Toulouse conforte également la compagnie aérienne dans son choix : 53% d'habitants de Nouvelle-Aquitaine contre 47% de Normands. "Il y a une aspiration des gens du sud à nous rendre visite", se réjouit Joël Bruneau, le président de Caen-la-Mer.

Un coup de pouce de Caen-la-Mer

L'agglomération vendra d'ailleurs soutenir financièrement l'aéroport confronté à un déficit de 500 00 euros en 2020. Des négociations "sont en cours", indique Joël Bruneau qui rappelle que "depuis 2014, chaque année l'exploitant assure, par sa gestion, la poursuite de l'exploitation sans requérir à l'aide de la communauté urbaine, contrairement à d'autres plateformes qui bénéficient de subventions de collectivités locales."

Et d'affirmer la nécessité d'assurer la pérennité d'un "un outil qui accompagne le développement économique du territoire", et pas uniquement en matière de tourisme.  "On a un bon retour des chefs d'entreprise. Pour un certain nombre de contrats, de négociations, il y a un moment où on a besoin de rencontrer ses interlocuteurs." Pour ne pas fragiliser le site, en cette période de crise, la communauté urbaine a fait le choix de prolonger de deux ans la délégation de service public attribué à la CCI Caen Normandie.

Une autre piste pour allonger la piste ?

"2019 a été une année record en termes de passagers mais on a diminué le nombre de rotations", rappelle Michel Collin. Dans le secteur aérien, les compagnies commencent à faire l'acquisition d'avions à la fois plus économes en carburant mais également plus gros et transportant plus de passagers. La compagnie Volotea va ainsi prochainement mettre en service des A319 et A320 sur la nouvelle ligne Caen-Montpellier. Dans les cartons de l'aéroport de Caen-Carpiquet figure depuis déjà quelques années le projet d'allonger sa piste pour accueillir, justement, des avions plus imposants.

En raison de la crise sanitaire, l'enquête publique qui devait avoir lieu en 2020 a été "décalée", selon les mots de Joël Bruneau président de Caen-la-Mer qui ne communique pas pour autant un nouveau calendrier. Officiellement, le projet reste d'actualité, à plus ou moins long terme. "C'est un projet qui prend du temps et l'aéroport de Carpiquet accueillant plus de 200 000 passagers, l'exploitant doit prendre en charge 25% de l'investissement." Compte tenu du manque de visibilité en termes de reprise de l'activité et des turbulences financières traversées par le secteur aérien, une autre piste semble se dessiner.

"On pourrait dans un premier temps exploiter à plein la piste actuelle." Pour accueillir les "nouveaux" avions, l'aéroport de Carpiquet aurait besoin de 300 mètres de piste en plus. Ces 300 mètres, il les a déjà mais ne peut les utiliser en raison de la proximité avec la route départementale voisine, une route empruntée par d'imposants transports en raison de l'absence de ponts. "L'idée, ce serait de dévier la RD9", indique Joël Bruneau, "Ce sont des travaux plus simples à réaliser. Mais ce ne sera pas pour tout de suite."

Quand l'ouest regarde vers l'est

La compagnie Flybe ayant été emportée par la crise sanitaire au printemps dernier, l'aéroport caennais n'a plus de liaison avec la Grande-Bretagne. "C'est toujours un souhait", indique Michel Collin, "Mais en ce moment, entre le Brexit, les complications douanières qu'il entraîne, et la crise sanitaire, nous n'avons pas de proposition actuellement. D'ici assez peu de temps, on pense qu'on pourra renégocier ce trafic là."

Fidèle à sa stratégie de développement sur le territoire national, l'aéroport lorgne plutôt de l'autre côté de l'hexagone. "Le sud est déjà bien pourvu donc on a plutôt envie de regarder vers Starsbourg, Mulhouse, vers l'est. Ce serait une bonne chose pour notre territoire." Maryline Haize-Agron confirme : "Ça fait partie de nos réflexions et de nos échanges avec les compagnies aériennes."

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