"Un toit pour se reconstruire", c'est l'un des slogans du mouvement Habitat et Humanisme, représenté dans les cinq départements de Normandie. Aux exclus, aux mal-logés, elle propose des solutions avec pour ambition la réinsertion, le retour à la vie sociale.
"Le logement d'abord" : c'est le nom d'un vaste plan quinquennal qui a démarré en 2018. N’avons-nous pas aussi un président de la République ayant peu après son élection fait une promesse de zéro SDF ? (Il a depuis reconnu son échec sur ce point, parmi d’autres). Nous nous sommes habitués à voir beaucoup de monde à la rue, image de l’extrême précarité. Certes on ne peut nier l’exclusion volontaire, c’est un fait social.
Mais la grande pauvreté, les ruptures économiques, familiales sont le ferment d’une grande vulnérabilité conduisant souvent à un profond isolement. Comment recoller à la vie, à l’envie, après de longues et douloureuses descentes aux enfers, des problèmes majeurs liés à l’alcoolisme, à la santé ? C’est la mission d’une multitude de services et d’associations. Les plus optimistes considèrent que la France fait encore partie des pays les mieux dotés ou organisés en la matière.
Notre feuilleton hebdomadaire s’intéresse à l’une de ces associations : "Habitat et Humanisme", plus particulièrement à son antenne de Caen et l’un des corollaires dans le Calvados : l’AISCAL, Agence Immobilière et Sociale du Calvados. Elles s’emploient à reloger les plus vulnérables.
Une série de quatre reportages proposée par Rémi Mauger, Carole Lefrançois, Régis Saint-Estève et Bastien Odolant
Une pension de famille magique
Pouvoir accueillir des personnes isolées en situation de très grande fragilité dans une maison-relais, c'est le projet le plus important de l'association caennaise d'Habitat et Humanisme. Ici, dans la Maison Marc Gignoux, les vingt locataires vivent sous un même toit mais "chacun chez soi". Un accompagnant vit dans la maison et fait le lien avec les différents intervenants sociaux et médicaux pour s'assurer de la fluidité des parcours. Une présence essentielle, une communauté de vie, des activités communes qui font toute la différence et permettent aux locataires de se reconstruire. Cuisine commune, jardinage, bricolage, sorties, randonnées se combinent dans une mystérieuse alchimie et la vie reprend le dessus, comme par magie.
Baptiste, Animateur Maison-relais Marc Gignoux
Jocelyne Biette, Locataire Maison-relais Marc Gignoux
Michel Denuilly, Locataire Maison-relais Marc Gignoux
Pascal Brard, Locataire Maison-relais Marc Gignoux
Un toit pour se reconstruire, ça ne tombe pas du ciel
Les analyses sociologiques du moment semblent le montrer : le contexte social explosif que nous connaissons n’est pas le fait des plus démunis. Les très pauvres, les mal-logés ne sont pas ou peu sur les ronds-points et dans les manifestations. Mais c’est bien la crainte de l’exclusion et de la précarité qui a constitué l’un des ferments de la colère. Ceux à qui nous nous intéressons dans ce feuilleton font partie des plus fragiles. Ils ont connu la solitude, l’instabilité due à leurs problèmes de famille, d’emploi et / ou de santé. Tous n’ont pas dormi dans la rue mais beaucoup étaient tombés très bas.Depuis sa création, l’association Habitat et Humanisme a basé son action sur deux axes complémentaires : loger les personnes en difficulté et les accompagner pour favoriser leur insertion. Un toit pour se reconstruire n’est pas une vaine formule. Mais ça ne tombe pas du ciel, ça se travaille…
Jacqueline Launay, bénévole Habitat et humanisme
André Gautier, locataire Habitat et humanisme
Mireille Lefaivre, Présidente Habitat et humanisme Calvados
Annie Lebon, bénévole Habitat et humanisme
Accompagnement ne signifie pas assistanat
Qu’est-ce que l’accompagnement chez Habitat et Humanisme ? C’est un apprentissage du retour à la vie sociale. Par les liens qu’ils tissent avec leurs locataires, les animateurs et les bénévoles de l’association entendent favoriser la re-création de liens sociaux, l’insertion et l’autonomie, la citoyenneté. Selon le type d’habitat et le profil du ménage, un accompagnement personnel ou collectif est proposé à chacun. Tout est question de dosage, de juste place. Accompagnement ne signifie pas assistanat. Mais bien souvent des liens particuliers ne manquent pas de se créer. Deux exemples dans cet épisode : Virginie et Gabriel, figures « historiques » d’Habitat et Humanisme…Virginie Renouard, locataire Habitat et humanisme
Marie-France Gignoux, propriétaire Habitat et humanisme
Gabriel Chauvel, locataire Habitat et Humanisme
Pas de locataires sans propriétaires solidaires
Si les demandes de logement sont nombreuses, il n'en va pas de même pour les offres. Ce n'est pas un secret : les propriétaires sont globalement rétifs pour signer des baux avec des personnes en difficulté financière...
Pour répondre aux demandes, Habitat et Humanisme a plusieurs cordes à son arc : ses maisons-relais, nous l’avons vu dans le premier reportage, son propre parc locatif (la foncière H&H) mais elle peut aussi compter sur de nombreux propriétaires solidaires et s’appuyer sur une association « sœur » fondée il y a tout juste dix ans dans le Calvados : l’AISCAL, l'Agence Immobilière et Sociale du Calvados. C’est une agence immobilière à vocation sociale, membre de la Fapil, Fédération des Associations et des Acteurs pour la Promotion et l'Insertion par le Logement. Elle met en relation et en confiance propriétaires et locataires.
En situation de rupture professionnelle, familiale ou sociale, privées de garants, certaines personnes seules ou familles sont particulièrement impuissantes face à la prudence des bailleurs privés. L’insuffisance de l’offre aboutit parfois à leur relégation dans les fractions les plus dégradées du parc de logements.
Chacun semble y trouver son compte. Les loyers tout comme les frais d’agence sont moins élevés que dans le privé. Et pour les propriétaires l’économie sociale et solidaire prend tout son sens. Depuis sa création l’Aiscal a contribué à loger 350 familles en difficulté.
Alain Lepoutre
Gerard Poullain, locataire Habitat et humanisme - AISCAL
Dominique Lepoutre, propriétaire solidaire
Marie-Laure Jean, directrice AISCAL
Eric Deraine, locataire AISCAL
Habitat et Humanisme : plus de 30 ans de résistance
Il était une fois, à Lyon, en 1985, un professionnel de l'immobilier, devenu prêtre, qui décide d'entrer en résistance contre les injustices liées au logement, notamment dans les villes. Il s'appelle Bernard Devert.A cette époque de crise économique et de crise du logement, la rénovation et la revalorisation des centres anciens chassaient les habitants modestes vers les périphéries des villes.
Il crée alors "Habitat et Humanisme" face au quadruple constat :
- Trop d’hommes et de femmes n’arrivent pas à trouver un toit.
- Trop de familles vivent encore dans des logements insalubres, surpeuplés, précaires.
- Trop de quartiers concentrent l’exclusion et engendrent inégalités et violences.
- Nécessité de faire évoluer les politiques foncières-financières et fiscales pour l’accès au logement.
Parallèlement à l’animation et au développement d’Habitat et Humanisme, Bernard Devert a été pendant 13 ans aumônier du centre anti-cancéreux Léon-Bérard à Lyon.
En 2000, dans le sillon d’Habitat et Humanisme, il a créé l’association La Pierre Angulaire, réseau de maisons d’accueil et de soins pour personnes âgées à faibles ressources.
(Source site Habitat et Humanisme)