Le CHU de Caen organisait ce mercredi 8 février son premier job dating avec une cinquantaine de postes à pourvoir. Le dispositif, déjà expérimenté dans d'autres hôpitaux français, a également pour but de rendre attractif le secteur hospitalier, un secteur dont le profond mal-être a été mis en lumière par la crise covid.
Marine est encore étudiante. En juillet prochain, "si tout va bien", elle sera diplômée. Et pourtant, en ce début de mois de février, elle vient déjà de décrocher une promesse d'embauche pour le mois de septembre. "J'ai toujours voulu travailler dans la santé. Le côté relationnel, je pense qu'on ne peut le trouver qu'ici où on est autant proches des gens et où les gens ont autant besoin de nous. Je trouve ça formidable." La jeune femme intègrera donc prochainement, "si tout va bien", le service pédiatrique du CHU de Caen en tant qu'infirmière, un métier dont elle rêve depuis plusieurs années. "Je pense que c'est une vocation. Soit on n'y a jamais pensé, soit on s'est levé un matin en disant c'est ça qu'il faut faire."
Ce mercredi matin dans le hall d'accueil du CHU de Caen, ils sont plusieurs dizaines visiblement à avoir la vocation. L'actualité a pourtant mis en lumière depuis de nombreux mois un profond malaise chez les soignants, entre manque de moyens et manque de considération. "C'est un environnement de contraintes le milieu hospitalier, on le sait", reconnait Katia Lièvremont, directrice des soins, "On travaille les week-ends, on travaille les nuits, les horaires ne sont pas toujours aisés. La relation avec les patients est quelque chose d'absolument passionnant mais qui consomme quelques fois énormément d'énergie. Pour autant, ce sont de beaux métiers. Le succès d'aujourd'hui en témoigne."
La foule des grands jours
Car c'est bien la foule des grands jours dans le hall d'accueil de l'hôpital. Près de 150 candidats reçus durant la seule matinée pour ce premier job dating. Aide-soignant, infirmier, préparateur en pharmacie, technicien, agent de restauration, assistant de régulation ou informaticien, une cinquantaine de postes sont proposés au sein de l'établissement. Et quasiment autant de salariés du CHU (une quarantaine) sont mobilisés pour accueillir et échanger avec les candidats. "Nos sociétés changent, on est beaucoup avec le numérique mais ça ne suffit pas . On a une plateforme sur laquelle on peut candidater mais ce n'est pas suffisant. On a besoin de contacts humains, même s'ils sont courts. C'est essentiel pour pouvoir nouer une relation de départ. Les contacts et les questions directs vont apporter des réponses qui vont conforter et le recruteur et le recruté."
Marine, la future infirmière en pédiatrie, est séduite par le dispositif. "J'ai l'habitude de faire des entretiens en parallèle de l'école parce que j'ai des jobs étudiants", raconte la jeune femme, "Là, c'est complètement différent. Le fait que ça tourne, ça permet de se voir rapidement. C'est mieux qu'un entretien formel, la pression n'est pas la même. Je trouve ça beaucoup moins stressant qu'on soit dans le hall du CHU que je connais très bien. En face de nous, ils n'ont pas la blouse blanche du chef de service."
"On a du mal à se vendre à l'extérieur"
Le CHU de Caen n'est pas le premier hôpital français à organiser un job dating. Les CHU de Rennes, Nantes ou Toulouse ont déjà expérimenté un tel dispositif ces derniers mois. Pour l'établissement normand, cette première constitue l'une des briques d'un plan plus vaste baptisé "Attractivité 2022" lancé l'an dernier, un plan qui sonne comme une révolution culturelle pour le directeur des ressources humaines. "Il y a une certaine humilité dans le culture de l'hôpital public, on a du mal à se vendre à l'extérieur", estime Théo Piolin, "C'est une bonne chose pour les professionnels eux-mêmes de se valoriser, de montrer qu'on fait beaucoup de choses à l'hôpital. Il y a de très bonnes initiatives, surtout dans un CHU comme le nôtre avec un nombre de spécialités très important."
Selon le DRH du CHU de Caen, l'établissement a déjà effectué "énormément de recrutements" cette année. "L'enjeu, il est surtout de mieux faire connaître nos métiers. On a des métiers que la population n'identifie pas très bien en général. Je pense par exemple aux assistants de régulation, c'est à dire la personne qu'on appelle quand on contacte le SAMU et qu'on a besoin d'être pris en charge rapidement. C'est sur ces métiers là notamment qu'on souhaite communiquer auprès du grand public." Et ce premier job dating en est l'occasion. "On a la chance d'avoir un panel de services qui est très large et donc d'avoir des professions très diverses. On n'écarte aucune candidature et on essaye de proposer un maximum de choses à nos candidats."
Le plus bel argument de vente
Pour se vendre auprès des potentiels candidats, le CHU de Caen ne mise pas que sur la diversité des métiers. Si la santé semble demeurer une vocation, il ne faut pas se reposer uniquement sur celle-ci pour donner envie. "On a bien avancé en termes de modalités de recrutement", plaide Théo Piolin, "On propose d'avantage de CDI, d'avantage de mises en stage donc d'accès à la fonction publique qui permettent de sécuriser nos emplois."
Le DRH estime enfin que le plus bel argument de vente du CHU de Caen, c'est son avenir. "On a un atout majeur, un avantage pour les prochaines années, c'est qu'on va avoir un nouvel hôpital, neuf, totalement repensé, totalement moderne, ce qui va permettre d'avoir un environnement de travail plus confortable pour nos professionnels et pour nos patients." Un nouvel hôpital qui devrait s'accompagner, assure Théo Piolin, "de plus en plus de postes" à pourvoir.
Ci-dessus le reportage de Kanwaljit Singh et Cyril Duponchel