"Les années 30: et si l'histoire recommençait ?" s'interrogent deux historiens dans un ouvrage publiés il y a quelques semaines aux éditions de la Martinière. Une de nos équipes a rencontré l'un des deux auteurs au Mémorial de Caen.
L'histoire est-elle un éternel recommencement ? Cette question, "grand classique" des dissertations de philosophie, les deux historiens Pascal Blanchard et Farid Abdelouahab la posent de nouveau dans leur ouvrage "Les années 30: et si l'histoire recommençait ?", publié en février dernier aux éditions de La Martinière. Pas question pour eux d'apporter une réponse définitive mais de dresser plusieurs correspondances entre notre époque et le premier tiers du XXe siècle. "L'esprit, c'est de comparer les deux périodes, y compris en creux et quand elles en sont pas comparables, c'est à dire que leurs différences vont nous apporter aussi des informations sur notre période contemporaine", explique Farid Abdelouahab
Reportage de Jérôme Raguenau et Thierry Cléon
Les deux auteurs ont choisi de débuter leur livre par la crise de 1929. "C'est une date qui était une évidence puisque c'est le début de toutes les émergences des populismes et des nationalismes, de l'expression de la haine de l'autre qui va s'intensifier en Europe et dans le monde entier. Avant 1929, on pourrait dire qu'il y a la Première guerre mondiale et la révolution russe qui vont représenter un véritable séisme dans l'histoire, une sorte de grande coupure, et on pourrait faire une comparaison avec le 11 septembre qui lui aussi correspond à la fin d'un chapitre et au début d'un autre".
Parmi les parallèles dressés par les auteurs et renforcés par l'iconographie de l'ouvrage, "des dyptiques de réflexion" associant le nouveau président américain Donald Trump au leader fasciste Mussolini, Poutine face à Staline ou François Hollande et Léon Blum. "Ce sont des éléments de réflexion qui nous permettent de voir quels sont les points communs et quelles sont les différences. La question des raccourcis ne se posent pas parce que nous somems dans l'interrogation permanente et dans le constat, quand on ne peut plus faire autrement, des mécanismes équivalents. Et ils sont nombreux."
Au-delà des jeux de miroirs entre différentes personnalités, les deux historiens se penchent sur les discours relayés au cours de ces deux époques. "Il s'avère qu'il y a une remise en cause du système, des élites, on n'entend que ce mot là dans la bouche des personnes qui se présentent aux élections aujourd'hui. La crise durable qu'on est en train de vivre nous amène à des discours qui résonnent avec ceux des années 30. L'antiparlementarisme des années 30 fait écho avec la notion du complot aujourd'hui".
Pour autant, pas question de conclure à une répétition automatique de l'histoire. D'abord parce que le monde d'aujourd'hui (la mondialisation, l'Europe, les enjeux environnementaux) n'est pas celui d'hier. "Ensuite, on peut espérer que le regard en arrière, la mise en perspective, la conscience historique puisse nous amener à évoluer de façon constructive", estime l'historien.
Interview intégrale de Farid Abdelouahab