Coronavirus : un éboueur témoigne, « on a peur, on ne sait pas ce qui a pu être touché »

Ils bravent les règles du confinement. Pendant la crise sanitaire liée au coronavirus, les éboueurs poursuivent leur activité. Des ordures en plus grand nombre, des incivilités mais aussi du soutien. A quoi ressemble leurs tournées ? Ludovic Brunet, éboueur dans le Calvados, raconte.

Confinement ou pas, impossible de télétravailler. Ludovic Brunet, 39 ans, est éboueur. Il ramasse les déchets ménagers et recyclables d’une quarantaine de communes du Calvados, situées au Sud de Caen. Pour lui, le quotidien n'a presque pas changé. « Les gars font leur travail normalement », constate-t-il.

Par équipe de trois, les éboueurs du Syndicat mixte de collecte et de traitement des ordures ménagères (SMICTOM) de La Bruyère réalisent leurs tournées en porte-à-porte. Un à l’avant pour conduire le camion-poubelle et deux à l’arrière pour ramasser les ordures ménagères des habitants.

Le travail d’équipe, n’a jamais aussi bien porté son nom. Ensemble, ils doivent travailler mais aussi prendre les mêmes précautions et se faire confiance.
 

On est un trinome et il faut que les trois personnes appliquent les consignes d'hygiène, Ludovic Brunet, éboueur


Plus de déchets, moins de civisme…

Confinés chez eux, les Calvadosiens, comme tous les Français, travaillent, s’occupent mais aussi cuisinent. Les déchets ménagers s’accumulent. Et les emballages, habituellement jetés sur les lieux de travail, remplissent aussi les poubelles des habitants. Ludovic Brunet et ses co-équipiers ne chôment pas. « On a plus de boulot », affirme l’éboueur.
 

Ce n’est pas parce qu’on a du temps, qu’on fait du rangement et qu’on tond sa pelouse, qu’on met tout aux poubelles ! On doit respecter le travail de l’autre, Ludovic Brunet, éboueur


Dans les 39 communes où travaille Ludovic Brunet, des conteneurs d’apport volontaire sont à la disposition des habitants. Mais pendant le confinement, rares sont ceux qui trient les emballages recyclables. L’éboueur s’insurge : « Ce n’est pas parce qu’on a du temps, qu’on fait du rangement et qu’on tond sa pelouse, qu’on met tout aux poubelles ! On doit respecter le travail de l’autre ».

En attendant la réouverture des déchetteries, l’éboueur recommande de stocker les déchets verts dans le jardin privé ou encore d’en faire du compost. Il suggère aussi de profiter de l’autorisation journalière de sortie pour aller à pied jusqu’au conteneur. Il lance : « c’est ludique pour les enfants, ça leur apprend le tri ! ».
 

… mais aussi des remerciements

Malgré les incivilités, les éboueurs reçoivent aussi le soutien des habitants. « C'est touchant », reconnaît Ludovic Brunet. Depuis le confinement, les lettres de félicitations ont remplacé les habituelles lettres de plainte. « On a eu une bouteille de vin. On a eu un paquet de gâteaux. (…) Il y a quand même des gens généreux, super sympa et reconnaissants », se réjouit le travailleur.
 


Protégés mais inquiets

Ces travailleurs ont renforcé leurs bonnes habitudes. Ils désinfectent les camions, leurs mains à plusieurs reprises et portent en permanence un masque. Ce nouvel accessoire ne leur facilite pas la tâche. « Au volant, c’est gênant mais cela reste supportable », souligne Ludovic Brunet avant d’ajouter : « mais derrière, on souffre. On descend, on monte. La respiration n’est pas la même ».

Au niveau sanitaire, tout semble avoir été prévu pour protéger les éboueurs. Mais l’angoisse est présente. « On a peur, quand même. On ne sait pas ce qui a pu être touché. On n’est pas à l’abri d’avoir une goutte sur nous. On y pense forcément », confie le presque quadragénaire.
 

Ma compagne a un peu peur. Peur, que je ramène ça à la maison. Que je tombe malade. Que je refile ça à nos enfants, Ludovic Brunet, éboueur


Et il n’est pas le seul à avoir des inquiétudes. A la maison, ses proches sont préoccupés. « Ma compagne a un peu peur. Peur, que je ramène ça à la maison. Que je refile ça à nos enfants et puis même à elle », raconte Ludovic Brunet.

Mi-mars, Ludovic Brunet est tombé malade. Après avoir distribué des sacs poubelles aux administrés d'une commune, l’éboueur se sent fiévreux. Le lendemain, il a 39,7° de fièvre. S’agit-il du Covid 19 ? Difficile de le savoir. Ludovic Brunet est alors placé en quatorzaine chez lui.

Guéri, l’éboueur reprend son travail deux semaines plus tard. Amoureux de son métier, il veut continuer de « rendre service » à la population. « Je suis utile à travailler. (…) Il y en a qui galèrent à l’hôpital, je ne vois pas pourquoi on resterait chez nous », insiste ce père de famille.
 
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