D'importants ralentissements étaient à prévoir sur les grands axes normands ce lundi 21 mars. Malgré les annonces faites par le gouvernement la semaine dernière, la journée de mobilisation contre la hausse du prix du carburant est maintenue dans plusieurs professions.
Malgré les annonce gouvernementales de la semaine dernière, la journée de mobilisation prévue ce 21 mars contre la flambée du prix du carburant a été maintenue dans plusieurs professions, notamment chez les marins-pêcheurs et les transporteurs routiers indépendants.
Les pêcheurs mobilisés sur l'A13 et le Pont de Normandie
Dans le Calvados, la première action s'est déroulée ce lundi matin sur l'autoroute A13. Des pêcheurs ont mis en place un barrage filtrant au péage de Dozulé durant une heure. Cette action s'est achevée aux environs 8 h 30.
Ils ont ensuite décidé de partir en convoi vers le Pont de Normandie où ils sont arrivés vers 9 h 30. Un barrage filtrant a été mis en place par les manifestants, entre 150 et 200 personnes, des pêcheurs venus de toute la région selon notre équipe sur place.
Principale revendication : une aide plus conséquente pour pallier la flambée du gasoil. Les 35 centimes par litre accordés par le gouvernement sont jugés insuffisants et trop ponctuel. Les professionnels de la mer réclament des mesures s'inscrivant sur un plus long terme. " On nous donne des mesures qui sont faites à la hâte sur une durée de quatre mois. Ce n'est pas suffisant. Il faut qu'on ait une vision au-delà de quatre mois. On nous propose 15 centimes comme tout citoyen plus 20 centimes d'exonération sur les charges patronales. C'est très bien sur un gasoil à 1 euro. Mais si le gasoil continue à monter, 1 euro 30, 1 euro 40, c'est retour à la case départ", explique Wilfried Roberge, patron du Vauban, " Le Brexit, les éoliennes en mer, le gasoil : ça fait beaucoup pour la pêche ces dernier mois. Coup sur coup, ça n'arrête pas. Moi, en une année, ça fait quatre manifestations que je fais. Sincèrement, on a d'autres chats à fouetter. Ce n'est pas de gaieté de cœur qu'on est là aujourd'hui."
Au Pont de Normandie, les manifestants ont levé le camp aux environs de midi. Les pêcheurs se sont ensuite rendus à la raffinerie voisine pour établir un nouveau barrage.
Parmi les manifestants, on comptait ce lundi matin plusieurs patrons-pêcheurs de Trouville-sur-Mer. Dans cette commune du Calvados, les professionnels de la mer ont décidé ce weekend de se mettre en en grève illimitée. Les bateaux sont donc restés à quai ce 21 mars.
En Seine-Maritime, au Tréport aussi, les bateaux n'ont pas pris la mer mais c'était pour mieux bloquer le port. Une quarantaine de bateaux et près de 120 pêcheurs participent à cette action. Parmi les revendications, l'arrêt du parc éolien offshore, le doublement " au minimum" du quota d'espèce pélagique et surtout la mise en place d'un prix plafond pour le carburant. " Un bateau comme le notre c'est 5000 litres par semaine. Avec un litre au-dessus d'un euro, ce n'est pas rentable pour nous", explique un patron-pêcheur.
Le maire de la commune, Laurent Jacques, et le député communiste Sébastien Jumel leur ont apporté leur soutien. " La pêche, c'est l'économie réelle, l'identité de nos territoires, des emplois en mer et à terre. Là, ils viennent de finir la Baie de Seine, ça veut dire qu'ils vont devoir aller au large pour pêcher donc de dépenser plus de carburant", plaide le parlementaire de Seine-Maritime, qui réclame un blocage des prix et pas uniquement pour les marins-pêcheurs, " Ce n'est pas la seule profession concernée. Les aides à domicile n'ont plus les moyens d'aller bosser parce que ça devient plus cher d'aller bosser que de travailler. Les infirmières qui sillonnent le milieu rural, les gens qui sont obligés de prendre leur bagnole pour aller bosser, pour aller se former, pour aller se soigner, font des pleins à 20 euros parce que justement ils n'ont pas les moyens de faire le plein."
Les transporteurs routiers mobilisés autour de Saint-Lô
Dans la Manche, aux environs de Saint-Lô, se sont les transporteurs routiers indépendants qui sont sur le pied de guerre. Pas un camion ne continuait sa route après le Rond-Point de Guilberville, au croisement de la route de Saint-Lô (RN 174) et de l'autoroute A 84 ce lundi matin. Un barrage filtrant a été installé à partir de 5 heures à l'aide d'une trentaine de poids-lourds.
Tous les camions, empruntant ce rond-point, étaient conduits, dans la bonne humeur et sans résistance, à un parking voisin (celui du restaurant routier). 450 véhicules y étaient déjà stationnés à 8 heures ce matin et les manifestants estimaient qu'il y aurait 700 poids lourds à la fin de la journée.
Sur place règne une ambiance de déjà vue avec palettes et café chaud. Les véhicules légers sont ralentis mais pas arrêtés. De nombreuses personnes klaxonnent en solidarité ou saluent de la main et pouce levé, en guise de sympathie.
D'autres actions ont été menées par les transporteurs dans le département de la Manche. A Carentan, une trentaine de poids-lourds se sont répartis sur les différents ronds-points de la commune. Présence de camion également à Saint-Lô sur la route de Bayeux et à Montebourg. Les organisations professionnelles du transport routier avaient pourtant levé vendredi leur appel à manifester après avoir obtenu une aide de 400 millions d'euros pour le secteur du transport routier, à laquelle s'ajoute la réduction de 15 centimes d'euros hors taxe par litre de gazole ou par kilo de gaz. Pour les chefs d'entreprise mobilisés ce matin, à la tête de TPE ou PME, cette aide est jugée très insuffisante. Comme les pêcheurs, ils réclament une baisse des taxes sur le carburant sur le long terme et non pas une mesure ponctuelle. " Je ne devrais pas y penser mais j'y pense : soit réduire mon parc de camions soit carrément fermer", regretter ce matin Loïc Germain, un patron manchois.
Des barrages maintenus après la réunion en préfecture
Une délégation, réunissant des représentants de différents corps de métier (transports mais aussi BTP et commerce ambulant) devait être reçue ce lundi après-midi à la préfecture de la Manche, à Saint-Lô. Le représentant de l'Etat avait posé comme préalable la levée des barrages. Cette condition n'a pas été remplie mais la réunion a tout de même eu lieu et duré deux heures. Le préfet s'est engagé à faire remonté leurs revendications. Selon nos informations, les barrages établis ce lundi matin doivent être maintenus tant que les manifestants n'auront pas reçu une réponse de l'Etat. Pour l'heure, l'envoi de forces de l'ordre pour dégager les ronds-points ne serait pas envisagée. A condition que les automobilistes puissent continuer à circuler et que le barrage filtrant établi à Guilberville n'entraine pas de répercussions sur l'A84.
Selon les chiffres officiels communiqués ce lundi en milieu de journée par le ministère de la Transition écologique, le prix du gasoil serait repassé en moyenne sous la barre des 2 euros la semaine dernière (1,9755 euro le litre en moyenne), après un record de 2,1407 euros la semaine précédente. Une première baisse observée après plusieurs semaines de hausse.