L'association écologiste Surfrider Foundation lance ce lundi 15 avril une campagne pour alerter sur les effets du réchauffement climatique sur les communes littorales. Elle s'appuie sur des images chocs et imagine des stations balnéaires, notamment normandes, sous les eaux.
Depuis des années, les habitants de Gouville-sur-Mer voient avec angoisse la mer grignoter petit à petit le cordon dunaire protégeant cette commune de la Manche. La municipalité a testé plusieurs idées pour tenter d'ériger un rempart efficace contre l'assaut des flots. Le 9 avril, la dernière solution "miracle", des sapins de noël plantés dans la dune pour la renforcer, a été balayée par les grandes marées.
"On ne peut pas lutter contre la montée des eaux, contre l'océan. Le combat est perdu d'avance", estime Lucie Leteurtre, chargée de projet à Surfrider Foundation. C'est l'un des messages que souhaite faire passer l'association écologiste dans sa nouvelle campagne de communication diffusée sur les réseaux sociaux à partir de ce lundi 15 avril. "Le but, c'est de sensibiliser et d'alerter le grand public au phénomène de la montée des eaux, un thématique dont l'actualité parle beaucoup ces derniers mois et sur laquelle on travaille depuis longtemps." La campagne, choc et visuelle, imagine le devenir - sous les eaux- des communes du littoral français.
Dans la vidéo et les cartes postales (voir plus haut) imaginées par l'association, la Normandie figure en bonne place. Selon un récent rapport du Cerema (Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement), près de 80 000 pourraient être menacés par le recul du trait de côte dans les départements de la Manche, du Calvados et de la Seine-Maritime d'ici la fin du siècle. Et c'est justement une commune de la côte fleurie qui est mise en avant dans le spot diffusé par Surfrider ce lundi. Villers-sur-Mer se voit rebaptisée Villers-sous-Mer.
"Aucune volonté de stigmatiser"
En 2022, la cité balnéaire, comme deux de ses voisines, avait refusé d'être inscrites sur la liste des communes vulnérables dans le cadre de la loi Climat et résilience, comme le rapportaient à l'époque nos confrères du Pays d'Auge. "Le décret était assez violent : il nous demandait, dans un délai réduit, de prendre des mesures allant jusqu'à l'expropriation", se défend le maire de l'époque, Thierry Grandturco. "En aucun cas, nous contestions le réchauffement climatique. On essaye désormais de tourner le plus possible la ville vers la campagne. On va prochainement faire une conférence avec le GIEC. Le principal défi, c'est le déni, c'est faire comprendre qu'il y a un vrai problème."
Pour Surfrider, pas question de surfer sur une quelconque polémique. "Il n'y a aucune volonté de stigmatiser une commune plus que l'autre", coupe immédiatement Elise Leteurtre, "On souhaitait simplement partir sur des communes dont les noms sont parlant". Et des communes "sur mer", la Normandie en regorge. "Villers offrait un cadre idéal avec vue sur mer qui nous permettait de mieux faire passer le message et d'avoir plus d'impact."
Si l'association appelle à agir sur les activités humaines contribuant au réchauffement climatique, elle invite surtout à travers cette campagne baptisée "sous-mer" à repenser l'urbanisme sur le littoral, pour préserver les populations d'une part mais aussi l'environnement. "Il faut envisager de déplacer des structures plus à l'intérieur des terres. Si on dégage ces zones, on pourra permettre à la nature de faire son oeuvre. Il y a pas mal de solutions qui ne peuvent pas être mises en place parce que les littoraux sont trop urbanisés", assure Elise Leteurtre. Et de citer en exemple les écosystèmes de carbone bleu (herbiers marins, marais salés ou mangroves) qui, en plus de capter le carbone, permettent d'atténuer la force des vagues.
Du rêve au cauchemar
Avant de déplacer des bâtiments, l'association invite tout un chacun à revoir dans les plus brefs délais ses priorités. "Cette campagne vise le grand public. La cible principale, ce sont les touristes et plus particulièrement les propriétaires de résidence secondaire. On rêve tous d'avoir une maison de vacances les pieds dans l'eau. Mais demain, ça peut devenir un cauchemar." Diffusée sur les réseaux sociaux, la campagne doit également avoir une vie dans le monde réel. Surfrider met à disposition des ses membres partout en France des stickers "sous mer" afin de faire passer son message sur tous les panneaux d'entrée de commune du littoral.