Dans son premier film en tant que réalisateur et scénariste, Hank Bedford souhaité dépeindre de la manière la plus juste le Sud américain dans lequel il a grandit.
Lors de la conférence de presse qui a suivi ce mardi matin la projection de "Dixieland", une jeune femme, tout comme lui originaire du Tennessee, a voulu remercier le réalisateur pour avoir tordu le cou à certains clichés collant à la peau des habitants du Sud, des gens souvent décrits comme racistes, homophobes, réactionnaires. "J'ai essayé de rendre les décors, les personnages, de la façon la plus précise possible, la plus réaliste possible, d'adopter un regard neutre", lui a répondu Hank Bedford, qui présentait son premier long-métrage comme scénariste-réalisateur.
Cette affirmation, il est permis d'en douter, ou du moins la nuancer, tant le metteur en scène semble avoir livré des choses personnelles dans cette première réalisation. Plutôt que de neutralité, on parlera de bienveillance à l'égard d'une région, où il a grandi, et de ses personnages, à qui pourtant, il n'épargne pas la cruauté du destin.
Son héros, Kermit, sort de prison quand le film débute. Son caractère un peu sanguin lui a valu de passer quelques années à l'ombre. Le jeune homme se promet de ne plus y retourner. Mais la misère des mobile-homes offre peu de perspectives d'avenir. Pour aider celle qu'il aime, il va renouer avec ses anciennes mauvaises fréquentations.
Cette histoire, voilà plus de dix ans qu'Hank Bedford veut la raconter. "J'ai grandi entouré d'adolescents un peu à la marge, comme ceux qui sont dans le film". Parmi eux, un des ses amis, "un garçon un peu sauvage, un peu dangereux, un peu violent". Un garçon dont le destin l'a, dit-il, profondément marqué et semble presque le hanter.
Si le réalisateur sort des sentiers battus dans la caractérisation de ses personnages, le Sud qu'il dépeint est celui d'une certaine misère sociale, tel qu'on a pu le voir dans le magnifique "Les bêtes du sud sauvage" ou la première saison de "True detective", un monde dans lequel ses personnages, aussi nuancés soient-ils, semblent n'avoir aucune chance face au déterminisme social.
Cette impression est renforcée par l'approche "documentaire" voulue par le metteur en scène, qu'il s'agisse des témoignages de vrais habitants du sud jalonnant le film ou de la réalisation, caméra portée à la main et mise au point fluctuante, une réalisation qui puise son inspiration dans le septième art français, selon le réalisateur. "La Haine, pour le travail graphique, Melville pour sa façon de filmer les comédiens, de les mettre en valeur, le montage d'A bout de souffle", cite Hank Bedford.
Une réalisation qui n'est sans doute pas non plus étrangère à l'économie du film tourné en seulement 18 jours avec 600 000 dollars de budget.