L'hébergement de migrants à Lion-sur-mer jugé illégal : le maire défend "un acte purement humanitaire"

Cet été, le tribunal administratif saisi par une habitante de la commune a annulé la décision prise en décembre 2018 par Dominique Régeard. Le maire de Lion-sur-mer avait ouvert un logement attenant à l'école afin d'abriter une dizaine de personnes. Aujourd'hui, il assume cet initiative. Entretien.

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  • Dominique Régeard, pourquoi avez-vous décidé d'héberger des migrants dans votre commune ?


Quand on passe à Ouistreham et qu'on les voit vivre dehors dans le froid, n'importe qui se dit qu'il faut faire quelque chose. Je ne suis maire que depuis deux ans. Je me suis demandé : est-ce que cette fonction me donnerait quelque moyen d'agir ? J'avais la chance d'avoir à disposition quatre pièces avec deux salles de bains et trois toilettes.
 

C'est un logement situé au dessus de l'école qui ne sert que deux mois dans l'année pour accueillir les sauveteurs-en-mer recrutés par Caen-la-mer. Si une dizaine de sauveteurs s'y sentent bien en été, une dizaine de migrants peuvent y dormir en hiver ! Quand on connaît le lieu, on se dit que c'est une évidence.


Au mois de décembre, j'ai pris contact avec le CAMO, le Collectif d'Aide aux Migrants de Ouistreham. Ils se sont organisés, et trois semaines après, nous avons commencé à héberger une dizaine de personnes de 19h30 à 7h30. Cela n'a posé aucune difficulté, et aucun problème.

 
 
  • Comment cette décision a-t-elle été accueillie sur le moment ?


Je n'ai pas senti d'hostilité, mis à part celle d'un collègue d'une commune voisine (Romain Bail, maire de Ouistreham NDLR). Il me disait : en faisant cela, tu favorises leur maintien sur place. C'est la théorie de l'appel d'air. Mais en réalité, il n'y a pas d'appel d'air. Ils étaient 150 migrants à dormir dehors à Ouistreham l'année dernière. Ils ne sont qu'une cinquantaine actuellement. Je n'ai donc fixé personne, ni à Lion, ni à Ouistreham.
 


 
 
  • Qu'est-ce que la justice vous reproche ?


D'abord je tiens à dire que je ne pas condamné. C'est une décisioin qui a été annulée, rien de plus. Le tribunal administratif me reproche d'avoir informé le conseil municipal mais de ne pas l'avoir fait voter. Et je n'aurais pas dû intervenir en la matière, puisque c'est une compétence exclusive de l'État, sauf à démontrer qu'il y a carence. 

Je n'ai pas fait appel. Je ne suis pas un porte-drapeau. Je ne mène pas un combat politique. C'était un acte purement humanitaire.


 

 
  • La justice a invalidé la décision d'un maire breton qui souhaitait interdire les pesticides près des habitations. Elle juge aujourd'hui illégal l'hébergement de migrants dans un logement municipal. Qu'est-ce que ces décisions disent du pouvoir des maires aujourd'hui ?


Dans nos communes, on passe notre temps à entendre de la bouche de l'administration : vous ne pouvez pas faire cela M. le maire. Et souvent, on ajoute : c'est vous le responsable. Nous n'avons aucune marge de manoeuvre. Alors parfois, on est un peu obligés de forcer le trait. Et encore, je n'ai pas l'impression d'avoir pris une décision délirante ! 


 
  • Quelle attitude allez-vous adopter cet hiver ?


Je ne sais pas. Nous allons regarder ce qu'il est possible de faire. Disons que nous allons nous adapter. Ce qui est certain, c'est que tout cela n'entame pas mes convictions. Et localement, à Lion-sur-mer, les soutiens que j'ai reçus me confortent dans ma démarche.


Dominique Régeard, invioté du journal de France 3 Normandie ce jeudi 19 septembre 2019 :
©France 3 Normandie
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