Une nouvelle marche pour le climat est organisée, ce samedi 25 mai 2024, à Caen (Calvados). Lancée à Paris il y a 10 ans, popularisée par Greta Thunberg, ces déambulations ont parfois rassemblé des centaines voire des milliers de personnes. Où en sont ces marches aujourd'hui ? Sont-elles efficaces?
Le rendez-vous est donné à Caen ce samedi 25 mai 2024, à 14h30 devant la bibliothèque Alexis de Tocqueville pour marcher pour le climat. L'appel a été lancé par le collectif, Uni-e-s pour le climat.
Les marches pour le climat ont évolué
Pendant que les administrations de Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique, planchent sur les adaptations nécessaires face à la montée des températures, les citoyens sensibilisés au réchauffement climatique s'expriment.
Ils veulent rester visibles dans l'espace public. Mais les marches symboliques pour le climat se sont faites plus rares depuis l'automne 2022.
Membre du collectif qui organise la mobilisation à Caen, Michel Moisan constate une évolution. "Les premières marches s’adressaient toutes aux États et gouvernements. Greta Thunberg allait de sommet mondial en sommet mondial, rencontrait les chefs d'Etat et la présidente de la commission européenne. L'idée, c'était qu'avec de bons arguments fondés scientifiquement, un jour ou l’autre les bonnes décisions politiques seraient prises."
Cette idée s'est-elle avérée efficace ? La réponse de Frédérick Lemarchand, sociologue et professeur d'université à Caen spécialiste de la transition écologique, claque : "Si renverser l'ordre mondial et le système économique par des manifestations dans l'espace public marchait, on le saurait."
À quoi ça sert une marche pour le climat ?
Une chose est certaine pour le militant Michel Moisan: "il faut être nombreux lors de ces marches. Même si elles ne sont pas l'unique moyen de pression de faire évoluer les choses. C'est la combinaison de plusieurs types d’actions qui peut aboutir. Les combats au quotidien, ceux qui sont locaux, comptent pour arrêter un projet estimé nuisible ou faire progresser la situation locale."
Sensibiliser les acteurs politiques au niveau local, c'est bien l'un des buts des marches pour le climat. La lutte contre le réchauffement climatique se joue dans les "petits" gestes individuels. Elle a aussi des ressorts locaux, au niveau des collectivités territoriales.
Un exemple concret qui concerne les transports : Michel Moisan défend l'idée que les transports publics doivent être gratuits pour limiter les rejets de gaz à effet de serre. À Rouen, ils le sont le samedi uniquement et des villes comme Montpellier ou Dunkerque se sont lancées dans le dispositif. La végétalisation des espaces publics est aussi du ressort des collectivités.
La barre des enjeux climatiques est très haute à franchir mais les mouvements sociaux ne sont pas vains.
Frédérick Lemarchand, universitaire spécialiste de la transition écologique
Le sociologue Frédérick Lemarchand le confirme. "L'action contre le réchauffement climatique exige de prendre des mesures pour une très longue durée, qui sort totalement du temps de la politique conventionnelle. On engage plusieurs générations. Mais il faut distinguer le niveau de gouvernance mondiale, où les choses sont verrouillées, et locale. La transition écologique passe par les territoires, et en Normandie, il y a beaucoup de territoires pilotes remarquables."
Que disent de nous ces marches pour le climat ?
Pour Frédérick Lemarchand, les marches sont "la manifestation d'un souci au sens du "care" généralisé du monde, du soin du lien social et de la nature aussi. C'est aussi celle d'une angoisse diffuse face aux changements à venir. Les marches permettent de ne pas se sentir seuls pour défendre les enjeux climatiques."
Michel Moisan complète : "pour samedi, le nombre de marcheurs est important parce que ça montre qu’on n’est pas isolés comme un zombie avec des idées bizarres, cela permet de vérifier qu’une fraction importante de la société a envie que ça change. On ne va pas convaincre le ministre de la transition écologique Christophe Béchu, mais il s’agit de construire un lien social en faisant le contact avec les nouvelles générations."
Repenser un nouveau pacte social et citoyen
L'universitaire va plus loin : "le fait de se rassembler, c'est l'occasion de récréer des imaginaires sociaux, de mettre au jour des boîtes à idées et une nouvelle manière d'être ensemble, de se déplacer, d'envisager la santé et les ressources... Il faut tout changer. La société civile doit se retrouver autour de l'idée d'un nouveau contrat social."