Pour la deuxième année de suite, la station SNSM de Ouistreham a organisé une opération de nettoyage du fond du canal. Plusieurs tonnes de ferraille ont été remontées. Leur revente permettra d'aider au financement d'un nouveau bateau pour les sauveteurs.
Sur le quai Charcot ce samedi matin, Bertrand Desvallées, canotier à la SNSM depuis sept ans, veille au bon déroulement des opérations. Il s'enquiert tout d'abord de l'état de forme des plongeurs dont les têtes viennent d'émerger de l'eau. Puis surveille attentivement le relevage d'un bac contenant les "trésors" découverts par ses collègues au fond du canal. Un butin peu reluisant. "Des engins de pêche comme des casiers à bulots, des couteaux pour monter sur les dragues à coquilles Saint-Jacques, des amortisseurs, des câbles, des bouts de portique", énumère le sauveteur en mer. Pas loin de 400 kilos de ferraille en tous genres dans le bac. Et certaines découvertes sont trop imposantes pour être chargées dans un bac. "Là on ne sait pas trop ce que c'est, on voit une poulie, c’est peut-être un ancien bout de treuil de chalutier."
Depuis le début de la semaine, les plongeurs de la SNSM, avec l'aide de bénévoles de l’association Caen-Ouistreham Plongée ont mené un grand nettoyage de printemps au fond du canal. Une opération lancée pour la première fois l'an dernier par la SNSM de Ouistreham. "De temps en temps, les pêcheurs appellent nos plongeurs parce qu’un portefeuille ou une paire de belles lunettes est tombé à l’eau. Il n’y a pas longtemps, c’était le trousseau de clés de la voiture avec laquelle ils devaient repartir", raconte Jacuqes Lelandais, le président de la SNSM de Ouistreham, "Nos plongeurs se sont aperçus qu’il y avait énormément de déchets ferreux et autres. Ça a donné l’idée à quelques uns d'organiser une opération de nettoyage."
Ecologique et économique
L'an dernier, la première opération avait permis de récolter près de dix tonnes de déchets au fond de l'eau, des déchets recouverts de vase qui dormaient là depuis parfois plusieurs années. Et qui, de retour sur la terre ferme, pourraient connaître une nouvelle vie. "Cette opération est importante tout d’abord dans un esprit écologique. Ces hommes qui sont sous l'eau préfèrent nager dans de belles eaux transparentes avec rien au fond, sans plastique. Quand ils ont vu ça, ça les a un peu bousculés. Et ils se sont dit : on cherche aussi toujours à récupérer des subsides pour assurer le fonctionnement de la station mais aussi pour nos acquisitions futures." La première opération avait permis de collecter près de 3000 euros. La ferraille, récupérée au milieu des déchets, est revendue à l'entreprise Derichebourg.
"Le prix de la ferraille ne vaut pas le prix du cuivre", lâche dans un sourire Jacques Lelandais avant d'ajouter : " Les petits ruisseaux font les grandes rivières. Un petit peu plus, un petit peu plus ,un petit peu, c'est comme ça qu'on fait un grand." Et grand pour la SNSM de Ouistreham, c'est l'acquisition d'un nouveau bateau. La station est loin d'être un cas isolé. "Toute la flotte est vieillissante", indiquait en 2021, Philippe Auzou, délégué départemental de la SNSM, "D'ici les 7 prochaines années, on aura pratiquement toute la flotte du Calvados à remplacer." Après 25 ans de bons et loyaux services à Ouistreham, le Sainte-Anne a bien besoin de passer le relais. "On a perdu 20% de vitesse d'intervention. Ça se manifeste aussi par plein de petites choses, comme des problèmes électriques, qui mises bout à bout font qu'il va falloir y penser très sérieusement", confiait l'an dernier son capitaine Philippe Capdeville.
Un nouveau bateau pour 2024
Voilà déjà quelques années que la station prépare l'arrivée de son successeur, un bateau plus puissant (25-26 nœuds contre 17 aujourd'hui) et capable d'aller plus loin (50 miles des côtes contre 20). Ce lourd projet, financé pour moitié par le Conseil départemental et le Conseil régional, a connu quelques péripéties comme le désistement d'un généreux donnateur. Si la chance a finalement tourné en faveur de la SNSM de Ouistreham, la facture entre temps s'est alourdie. "En 2020, il fallait qu’on trouve environs deux millions d’euros. Je pense qu’en 2024, il faudra mettre encore quelques centaines de milliers d'euros supplémentaires", estime Jacques Lelandais, "Et il faudra que l’ensemble de la station continue toutes ses actions pour récupérer des dons, comme par exemple la fête de la coquille, la vente des calendriers et plein de choses, comme cette opération d’aujourd’hui."
Si la SNSM bénéficie d'un soutien financier des collectivités comme les mairies et les départements, son budget provient à 60% de ressources privées. Les sauveteurs en mer vont bientôt pouvoir obtenir une nouvelle source de financement grâce à l'éolien marin : 5% de la taxe sur les éoliennes maritimes va être reversée à la SNSM à partir de cette année. La somme estimée à 400 000 euros en 2023 pourrait augmenter dans les prochaines années, au rythme de la mise en service des parcs éoliens en mer.