Les associations d'aide aux migrants et la municipalité de Ouistreham se retrouvaient une nouvelle fois devant le conseil d'Etat ce jeudi 21 mars pour trancher leur conflit sur les points d'eau. Cette fois-ci, le rapporteur de la plus haute juridiction administrative a donné raison à la mairie.
C'est un bras de fer qui se joue depuis plusieurs mois déjà. Plusieurs associations d'aide aux migrants réclament à la municipalité de Ouistreham et à l'Etat des points d'eau en nombre suffisant pour les migrants installés dans un campement de fortune sur le quai Charcot, à un kilomètre de la mairie. Cette bataille se joue aussi bien sur le plan de la communication (manifestations lors des conseils municipaux) que sur le terrain judiciaire. Et sur ce dernier, les associations ont remporté plusieurs victoires. Mais ce jeudi 21 mars, un premier revers semble s'esquisser pour les soutiens des migrants devant le Conseil d'Etat. Conseil d'Etat
En juin dernier, le tribunal administratif de Caen leur donne raison. La préfecture du Calvados et la commune de Ouistreham doivent fournir un accès à l'eau aux exilés. Le Conseil d'Etat confirme cette décision un mois plus tard. Mais rien ne se passe. Les associations saisissent une nouvelle fois la plus haute juridiction administrative. Deux blocs sanitaires ont été installés quelques semaines plus tôt à proximité du camp mais ils ne sont pas raccordés au réseau d'assainissement.
1 000 euros par jour de retard
La commune se fait une nouvelle fois taper sur les doigts. Le Conseil d'Etat la somme de "prendre les mesures nécessaires au fonctionnement effectif des équipements sanitaires installés à proximité immédiate du campement" mais également de prendre "des mesures d’adaptation de la nature et du nombre des installations sanitaires en tenant compte du nombre de personnes présentes sur le campement". Et y adjoint une astreinte de 1 000 euros par jour de retard.
Les semaines passent et les associations estiment que le compte n'y est toujours pas. Selon elles, les trois douches, trois toilettes et le point d'eau mis en place sur le quai sont bien loin de répondre aux besoins des 200 migrants en moyenne vivant sur le campement. Elles demandent donc au Conseil d'Etat de mettre à exécution l'astreinte de 1 000 euros par jour.
Un avis défavorable aux associations
Mais pour la première fois depuis le début de ce bras de fer judiciaire, un premier revers semble se profiler pour les associations. Ce jeudi 21 mars, si le rapporteur public a rappelé que l'entretien des équipements sanitaires restait à la charge de la commune, il a également estimé que ces équipements étaient proportionnels aux besoins exprimés quelques mois plus tôt. Et invité les associations à lancer une nouvelle procédure si le campement voyait sa population croître de façon importante. L'astreinte de 1 000 euros par jour n'a donc pas à être mise à exécution, selon l'avis du rapporteur public.
Si cet avis n'a pas valeur de décision, il suscite inquiétude et pessimisme parmi les associations d'aide aux migrants. "Si le juge suit le rapporteur, il n'y aura aucune pression financière et je pense qu'on peut gager que sans pression financière, rien ne sera fait", déplore Johanès Si Mohand, de l'association Vents Contraires, "la dernière année de déboires juridiques nous a montré que s'il n'y a pas une véritable assignation du juge et une pression financière derrière, rien n'est fait par les pouvoirs publics, en tout cas quand il s'agit de personnes exilées. Ils ont très vite fait de se dédouaner." De son côté, la municipalité de Ouistreham reste fidèle à sa ligne de conduite observée depuis le début de ce bras de fer judiciaire : aucun commentaire.
La plus haute juridiction administrative rendra sa décision dans quelques semaines. Elle suit, dans la majorité des cas, l'avis du rapporteur public.