“Femmes, Vie, Liberté” : le slogan de la révolte en Iran se scande aussi en Normandie grâce à un collectif de femmes. Face à la terrible répression en Iran, elles ont choisi de mener plusieurs actions locales. Leur objectif : faire pression sur le pouvoir islamiste en faisant résonner le mouvement à l’international.
Il y a six mois, en Iran, un mouvement de protestation débutait après le décès de Mahsa Amini. Cette jeune femme iranienne de 22 ans était tuée en détention, trois jours après son arrestation par la police des mœurs car son voile était mal ajusté.
Près de 530 personnes ont perdu la vie dans la terrible répression orchestrée par le régime. 109 manifestants risquent encore la peine de mort. Somayeh faisait partie des manifestantes. Face à la violence du régime, la jeune femme a décidé de fuir son pays.
"J'avais deux options : rester et mourir ou bien sortir du pays et sauver ma vie"
Somayeh, réfugiée Iranienne
La réfugiée iranienne nous confie avoir été "une manifestante active" : "J'ai même été arrêtée deux fois et mise en prison. Les autorités ont enquêté sur moi. À ma deuxième arrestation, j'ai compris que si je restais dans le pays, je signais mon arrêt de mort."
Pour faire taire les rebelles, le régime des mollahs en Iran use des condamnations à mort. Fin 2022, 17 personnes avaient été condamnées à mort - 5 ont officiellement été exécutées. Une centaine risquent aujourd'hui la même sanction. En janvier, on dénombrait 50 pendaisons pour des motifs fallacieux en lien avec la révolution.
Des totems en Normandie pour soutenir les condamnés à mort
Somayeh et sa sœur se sont réfugiées en France. Mais malgré la distance, elles continuent à se battre pour les femmes et les hommes de leur pays. Les deux femmes, ainsi que le collectif "Liberté pour l'Iran", font appel aux mairies normandes pour empêcher les prochaines pendaisons.
C'est le cas de la commune de Louvigny, dans le Calvados, où on peut croiser un totem à taille humaine. Il s'agit du portrait géant d'un condamné avec quelques éléments de sa biographie ainsi que les prétextes qui ont mené à sa condamnation.
Au-delà de tout parti politique, la mairie s'engage à soutenir le mouvement "Iran stop exécutions": "On a la photo d’un condamné à mort qu’on soutient et qu’on accompagne. C'est une action personnalisée pour envoyer également un message au peuple iranien et leur dire qu'on est derrière eux", nous explique Patrick Ledoux, maire de Louvigny.
Initiatrice, Louvigny a déjà été rejointe par plusieurs autres communes de Normandie - comme Fleury-sur-Orne, Maltot, Vieux, Feuguerolles-Bully, Cormelles-le-Royal et Saint-Germain-la-Blanche-Herbe. Avec derrière chaque totem, un Iranien ou une Iranienne, qui ont bravé le pouvoir en place pour défendre les libertés de plus de 80 millions d’Iraniens.
Début décembre, des condamnations à mort ont été prononcées par le gouvernement de l’ayatollah Ali Khamenei à l’encontre de certains de ses ressortissants partisans de la révolution populaire. Pour ne pas rester dans le silence, des députés et sénateurs français parrainent les manifestants condamnés. C'est de là que l’idée est née d’afficher les portraits des condamné(e)s aux portes des mairies dans la région.
Des Iraniennes qui continuent leur combat à distance
Lutter contre le pouvoir islamiste est devenu l'essence même des existences de Somayeh et de sa sœur. C'est pour avoir plus de poids qu'elles s'unissent avec d'autres femmes au sein de "Liberté pour l'Iran", comme nous l'explique Tara, membre du collectif.
"En Iran, on n’a pas le droit de chanter, de danser. Maintenant, ils favorisent le fait que les jeunes filles n’aillent pas à l’école, qu'elles ne soient pas éduquées. Ils assassinent les femmes juste parce-qu'elles montrent leurs cheveux"
Tara, membre du collectif "Liberté pour l'Iran"
Pour protester, les membres du collectif, n'hésitent pas à couper leur cheveux en criant "Liberté, égalité". D'autres encore reprennent le chant du soulèvement haut et fort : "Pour danser dans la rue, pour ne plus avoir peur de s’embrasser, pour ma sœur, ta sœur, nos sœurs, pour changer les cerveaux qui ont pourri".
La route reste encore longue pour retrouver un semblant de "vie normale" en Iran. Bahar le sait mieux que personne, cela fait déjà 17 ans qu’elle a fui le pays. Quand elle se replonge dans les photos de sa vie d'avant, les larmes lui montent aux yeux. Avec beaucoup d'émotion, elle nous confie : "On ne regarde pas beaucoup les photos. On a tellement de souvenirs de notre famille, de nos proches, de nos amis, tout ça c'est difficile".
"Mon pays me manque, j'ai dit à mon mari que même l'odeur de mon pays me manque"
Bahar, membre du collectif "Liberté pour l'Iran"
Toutes ces femmes espèrent un jour rejoindre l'Iran en tant que femme libre. Un rêve devenu, aussi, le combat d'une vie.
Découvrez le reportage France 3 Normandie :